SÉRIES, FEUILLETONS, SAGA, TRILOGIES...
SUR ÉCOUTE
The Wire
de David Simon, Ed Burns
2002, 5 saisons, USA, Couleurs
avec Dominic West, Idris Elba, Michael K.Williams…
RÉSUMÉ : Quand la police s’efforce de démanteler un réseau tentaculaire de trafic de drogue et du crime à Baltimore.
COMMENTAIRES : Les créateurs de la série télévisée The Wire, basée sur le jeu du chat et de la souris livrés entre vendeurs de drogues et policiers, avaient choisi de ne pas divulguer des outils technologiques accessibles au grand public qui permettaient d’échapper à la surveillance policière.
Quelle est la responsabilité morale d’un créateur de série TV policière qui raconte aux spectateurs comment meurtriers ou trafiquants de drogue arrivent à déjouer les enquêtes menées contre eux ? Plébiscitée pour son réalisme, l’excellente série The Wire (ou « Sur écoute » dans sa version française) diffusée entre 2002 et 2008 sur HBO avait toutefois préféré taire certaines techniques qui permettaient aux petits gangsters de banlieue de déjouer les mises sous surveillance.
Interrogé dans le Baltimore Sun (via The Verge), le showrunner de la série David Simon raconte que les créateurs de The Wire avaient été contactés par la police pour ne pas dévoiler certaines techniques d’investigation, ou pour ne pas évoquer des outils qui échappaient à toute mise sur écoute.
Les scénaristes ont ainsi renoncé à confier à leurs personnages des téléphones qui utilisaient la technologie Nextel Direct Connect rachetée par l’opérateur américain Sprint. Comme un talkie-walkie, le service dit de « Push-to-talk » permet d’appuyer sur un bouton pour parler immédiatement à d’autres utilisateurs du réseau Nextel, gratuitement tant que c’est dans une zone géographique limitée. Les utilisateurs peuvent créer des groupes jusqu’à 100 clients, qui peuvent tous parler en même temps, en utilisant un réseau propriétaire basé sur le réseau Integrated Digital Enhanced Network (iDEN) de Motorola. Or les policiers, au moins jusqu’à l’arrêt de la série, n’auraient pas eu les moyens d’intercepter les communications émises à travers ce réseau spécifique — notez que depuis, Sprint bascule progressivement tous les utilisateurs de la fonction Push-to-talk vers des applications qui utilisent le réseau cellulaire classique, susceptible de mises sur écoute.
Le co-créateur de The Wire, Ed Burns, aurait alors décidé de ne pas évoquer cette faille dans la série, car « mettre en avant cette vulnérabilité dans notre série aurait conduit de façon irresponsable les communications de toute bande criminelle vers un trou impénétrable » .
Et désormais, on ne compte plus le nombre de séries TV qui vous montrent ou vont font croire que plus rien n’est à l’abri de la surveillance policière, comme Person Of Interest (hélas de plus en plus proche de la réalité) ou Criminal Minds. Guillaume Champeau.
Nils Ahl et Benjamin Fau sont spécialistes des séries télévisés. Après avoir passé un grand nombre d'entre-elles au peigne fin, ils expliquent pourquoi The Wire se place au dessus de toutes les autres.
Depuis quelques années, une affirmation péremptoire revient invariablement lors des dîners en ville ou des déjeuners sur l'herbe: Sur Ecoute est la meilleure série télévisée de tous les temps. En général, votre interlocuteur se pare du plus grand sérieux - et le dit en V.O.: The Wire ("Ze Oaieurh")... Tout le monde opine, personne ne conteste. D'ailleurs, le moindre doute est dissipé comme un vulgaire nuage par les coups de canon de l'évidence. Ah bon? Ze Oaieurh? Bien sûr! Le cuistre l'affirme, et l'amateur le concède. Et nous, nous ne dirons pas autre chose: Sur Ecoute est la meilleure série de tous les temps! Ça, c'est fait... On peut passer à une autre, maintenant? Non: il faut y revenir nous dit-on.
Car l'affirmation est remarquable d'abord par son unanimité (plutôt rare dans l'histoire de l'art et de sa critique). The Wire est la meilleure série de tous les temps parce qu'on vous le dit, tous. Ou presque. Même Irvine Welsh (Trainspotting, Glu) le dit: "the best thing on TV. By far.". Même Barack Obama le dit... ou presque. Avouons-le, surtout: une grande majorité de critiques de séries télévisées le dit - ce qui est le début du soupçon de quelque chose. Car c'est comme avec les listes (Top 10, Top 5, tous ces plaisirs de petite fille de 10 ans, entre le poney et la poupée): décider de la meilleure série de tous les temps, c'est d'abord un autoportrait du téléspectateur et de la télévision. Et pas forcément tels qu'ils sont.
Pour le dire autrement, Sur Ecoute est la meilleure série de tous les temps parce qu'elle est idéale. Une série telle qu'on rêverait que la télévision en produise tous les ans: littéraire, politique, exigeante, profonde... Et policière aussi. Une série qu'on pensait impossible sur un média de masse comme la télévision. D'ailleurs, ses audiences furent confidentielles. On ne doit ses cinq saisons qu'à la bienveillance d'une chaîne câblée dont le modèle économique permet ce genre de production (même à cinquante millions de dollars par an). Voire l'encourage, puisqu'il est aussi question d'image, ici, pour HBO dont le slogan était jusqu'en 2006: " It's not TV. It's HBO." The Wire est l'enfant parfait d'une télévision qui veut être autre chose. L'exigence, la lenteur narrative, le demi- échec de la diffusion de Sur Ecoute valent pour autant de qualités insolites. Le succès est venu autrement - grâce au téléchargement, mais aussi à la distribution des DVD. Parce qu'elle est écrite différemment, débarrassée d'un grand nombre de tics de télévision, elle est regardée et se regarde différemment.
Elle est l'exemple d'une série dont on enchaîne les épisodes. Non pas pour son suspense, mais pour sa densité. Parce que l'on y est immergé et qu'il n'est pas facile d'en sortir. The Wire est une série typique des années 2000, en partie libérée du format hebdomadaire de la dramatique classique. Impensable avant Internet, le DVD ou la VOD, elle est l'enfant d'une télévision qui est déjà autre chose. Et surtout, The Wire est une extraordinaire réussite esthétique. On ne dira pas "cinématographique" ou "littéraire" mais si les deux adjectifs valent pour elle. Elle invente un territoire, déjà effleuré et esquissé, qui est propre à la série télévisée du 21e siècle: la ville.
Elle la dissèque, la met en scène - sa sociologie, sa criminalité, ses identités, ses pouvoirs, son économie... Tout cela au prétexte d'une banale opération de surveillance policière dans les bas-fonds de Baltimore. David Simon, créateur de la série, cite souvent Balzac: Baltimore répondrait à Paris. Le rapprochement est séduisant, mais la série télévisée n'a rien à voir ni avec la Comédie Humaine, ni avec les romans de Dickens (une autre référence avouée). Autant du point de vue de la forme, que du rythme, ou de la construction des intrigues. Et c'est tant mieux.
En revanche, l'immense ambition est bien celle-là: ne pas être qu'une série télévisée. La vision du monde que véhicule Sur Ecoute est d'ailleurs très inhabituelle pour une série télévisée américaine. A la différence d'une grande partie des récits typiques de la culture populaire outre-Atlantique, ici, l'individu n'est pas maître de son destin - et ne le sera jamais. Série chorale, qui maltraite beaucoup ses personnages principaux, The Wire montre, épisode après épisode, que le système dévore tous ses enfants. A l'exception temporaire d'Omar Little (une figure de Robin des bois du deal, gay et chevaleresque), tous les personnages courbent l'échine: c'est le jeu ("the game", le trafic de drogue) qui décide, le jeu dont tout Baltimore fait partie, du petit consommateur au maire, des flics aux voyous. A la manière du destin de la tragédie, probablement, faisant au passage du capitalisme et de la démocratie américaine les Dieux du récit.
On vous le disait bien: une immense ambition littéraire, cinématographique et politique. De fait, Sur Ecoute interroge le monde contemporain: ses logiques de pouvoirs, ses représentations, ses façons de parler aussi. Et elle le fait avec la précision et la vraisemblance d'un documentaire. Peut-être parce ses créateurs sont un ancien policier et un ancien journaliste, et que ses scénaristes sont des écrivains. Ce n'est pas tout à fait de la télévision, ce n'est pas tout à fait de la série. C'est quasi comme un roman, c'est presque un reportage. C'est intense comme la vie - enfin celle qu'on n'a pas (et ce n'est pas plus mal).
Même Les Soprano ne peuvent pas rivaliser avec The Wire
Une telle ambition est inédite à la télévision, en effet. Tout simplement parce qu'elle n'était pas possible, avant. Ni économiquement, ni culturellement. Et Twin Peaks? me direz-vous. Et Les Soprano? Deadwood? Berlin Alexanderplatz? Le Prisonnier? A la maison Blanche? Buffy contre les vampires ?... Buffy... heu... bref. Tout classement est une comparaison. Et avant Sur Ecoute, personne ne se posait vraiment la question de savoir quelle était la meilleure série télévisée de tous les temps. De fait, la série de David Simon et d'Ed Burns est venue remplir un vide. Elle est la série du consensus. Celle à qui on ne reproche rien parce qu'il n'y rien à reprocher. Celle qui est capable à la fois d'un extraordinaire cop show en première saison, et d'une critique belle et douloureuse de l'école des pauvres dans la quatrième...
Sur Ecoute est meilleure que les autres plutôt que la meilleure de tous les temps. Elle n'est pas l'oeuvre trop identifiable de son créateur (comme Twin Peaks, L'Hôpital et ses fantômes). Elle ne se limite pas à un genre (Hill Street Blues, A la Maison Blanche, Battlestar Galactica). Elle n'est pas anglaise (et donc plein d'un "non sense" pas assez universel, même pour le critique si snobe). Elle n'est pas comique comme Seinfeld (parce que le comique, ce n'est pas sérieux, hein). Elle n'est pas jaune comme Les Simpson (et puis un dessin animé, ce n'est pas sérieux, hein). Elle n'est pas inachevée comme Deadwood. Elle n'est pas les Soprano...
Car à certains égards, en effet, la seule autre série, dont l'ampleur, le raffinement, la qualité d'ensemble, les ambitions littéraires et culturelles, se comparent avec celles de The Wire, c'est Les Soprano. Mais la série de David Chase, aussi admirable soit-elle, ne peut rivaliser vraiment: elle s'inscrit dans le sillage de Coppola et la filiation d'un Philip Roth. Elle se permet des anecdotes, elle s'autorise des épisodes pour rien (voire un peu moins bons), pour le plaisir d'une intrigue de genre. Sur Ecoute, c'est Homère et Walter Benjamin, et il n'y a pas une note de trop. Sur Ecoute est une chance pour tous les critiques, une façon de les faire taire une fois pour toutes... ! Nils C. Ahl et Benjamin Fau, auteurs du livre Les 101 meilleures séries télévisées.
À l’époque de la diffusion de la quatrième saison de The Wire (Sur écoute), affirmer que la série fonctionnait comme un «roman à la Dickens» était déjà un cliché de soirée mondaine. Sous beaucoup d’angles, c’était totalement pertinent, vu la forme en feuilletons de la série, sa conscience politique progressiste et son cadre tentaculaire. Mais la référence littéraire de David Simon remonte à bien plus loin –elle est plus vieille que Shakespeare même, et de plusieurs siècles. The Wire, disait-il, est, fondamentalement, une tragédie grecque.
«Les anciens appréciaient la tragédie, pas seulement pour ce qu’elle leur disait du monde mais pour ce qu’elle leur disait d’eux-mêmes, expliquait-il. Presque toute la communauté de la télévision et du cinéma américains réussit à fuir cette vraie catharsis, que la tragédie est ouvertement conçue pour canaliser. Nous ne tolérons pas la tragédie. Nous nous en moquons. Nous la déprécions. Nous choisissons le rire, le sexe, la violence. Nous faisons triompher l’individu sur son destin, encore et toujours. »
Dans cette version olympienne de Baltimore, le rôle des dieux était joué par les forces aveugles du capitalisme moderne. Et tout mortel assez orgueilleux pour prôner le moindre changement se voyait, dans le style classique, inéluctablement et implacablement mordre la poussière, voire était violemment effacé.
«On s’est contentés de s’approprier une tradition très ancienne et totalement ignorée, et ça a eu l’air complètement nouveau et extrêmement improbable, racontait-il. Ce n’est pas un thème récurrent sur les écrans américains parce que ce n’est pas le genre d’histoire qui attire les foules. »
Cela a été possible à ce moment et à cet endroit- là parce qu’avec le nouveau modèle de TV câblée payante, qu’il y ait foule ou pas n’est plus primordial.
Pourtant, The Wire était aussi d’une incontournable modernité; ses personnages se basaient sur de véritables psychologies singulières, refusant d’être manipulés comme des pions sur un échiquier. Ils allaient parfois jusqu’à surprendre leurs créateurs.
Il y a eu un débat passionné dans la salle des scénaristes autour d’un moment crucial de l’avant-dernier épisode de la saison 1, Cleaning Up: l’exécution du jeune trafiquant de drogue Wallace par le voyou plus dur mais à peine plus âgé Bodie Broadus. Juste avant d’abattre son ami, Bodie hésite, et la main qui tient le pistolet tremble. Ed Burns, co-créateur de la série, avait émis une objection: le Bodie vu jusqu’ici était l’incarnation même d’un monstre de la rue, un jeune tellement abîmé et immunisé à la violence par la culture de la drogue qu’il n’aurait jamais hésité à appuyer sur la gâchette, même pour tirer sur un ami.
«Ça ne cadrait pas avec le personnage. Bodie était quasiment un psychopathe, limite. Moi je me disais: “On emmène le public dans cette direction, et maintenant ce type va se mettre à reculer?” Ça collait pas. C’était des conneries», raconta Burns, en se remémorant ce qu’il avait ressenti sur le moment.
Dans les saisons suivantes, Broadus allait devenir le pendant côté drogue du détective solitaire Jimmy McNulty: un soldat qui tente de tracer son propre chemin et finit écrasé par le système. Sa mort déclencha une émotion inattendue. Et tout cela, concéda Burns, avait été préparé par son moment d’humanité inopiné de la première saison.
«Le résultat c’est que ça a donné une dynamique formidable qui s’est maintenue pendant quatre saisons. Ça a fait surgir une bonne dose d’humour dont les psychopathes sont dépourvus», estima-t-il.
«Ça m’a permis d’apprendre très vite. Au départ, ça ne m’avait tout simplement pas plu parce qu’on ne joue pas ce genre de tour au public. Mais maintenant quand j’y pense, je me dis “C’est cool. Ce truc a permis d’entrer dans une autre dimension.” Ça a marché. Ça a très bien marché.»
Ce genre de débat n’était qu’un aspect de ce qui devint, à mesure que s’amplifiait la portée de The Wire pour englober de plus en plus de facettes de Baltimore, une danse intime et complexe en constante évolution entre les exigences de la réalité et de la fiction. Et si cette tension créatrice revenait de façon récurrente dans la salle de travail des auteurs, c’était aussi une réalité quotidienne pour les acteurs qui donnaient vie aux personnages de la série.
Pour des raisons de transparence ou d’ingérable manque d’organisation, la police de Baltimore a ouvert grand ses portes aux acteurs de The Wire dont beaucoup ont accompagné, dans un but pédagogique, les policiers dans leur tournée. Même pour ceux qui se considéraient raisonnablement blasés en termes de réalités urbaines, cela a été un choc.
«J’ai grandi en HLM, mais c’était pas des rangées de maisons aux fenêtres murées ni des bébés tout nus dans les bras d’héroïnomanes de 12 kilos», commenta Seth Gilliam, qui jouait le sergent Ellis Carver. Lui et Domenick Lombardozzi (Herc) furent assignés aux côtés d’un agent de la brigade des stupéfiants particulièrement zélé surnommé Super Boy. Un jour, ils se retrouvèrent pliés en deux sur la banquette arrière pendant une fusillade. «Je me disais: “Ma tête n’est pas couverte! Ma tête n’est pas couverte! Est-ce que je vais sentir la balle quand elle va me toucher?», se souvint Gilliam.
Wendell Pierce, qui jouait Bunk Moreland, John Doman, le formidable Major Bill Rawls et Dominic West (Jimmy McNulty) étaient dans un autre groupe. «On a été sur les lieux de fusillades et d’agressions au couteau. Il y avait un type qui avait encore un couteau fiché dans le corps. Un autre qui s’était fait tirer dessus, et que le flic essayait d’emmener en ville pour l’interroger», raconta Doman. «Tous on se disait “c’est inimaginable.”»
Loin de chez eux et de leurs familles laissées à New York, Los Angeles ou Londres, les acteurs passaient beaucoup de temps ensemble. Au moins deux groupes se formèrent. Le premier tournait autour de la maison que Clarke Peters, qui interprétait le rôle de Lester Freamon, avait achetée après la saison 1. Peters est un érudit quinquagénaire né à New York. Adolescent, il quitta les Etats-Unis pour Paris où subsistaient les vestiges d’une grande communauté de noirs américains. Au bout de quelques semaines, il y rencontra James Baldwin, Maya Angelou et le pianiste de blues Memphis Slim, entre autres. Quand la comédie musicale Hair arriva en France, il travailla comme créateur de costumes d’une des productions et finit par rejoindre la distribution. Il s’installa ensuite à Londres, jouant principalement au théâtre, rencontra David Simon et interpréta le junkie avunculaire Fat Curt dans la première série de Simon pour HBO, The Corner.
À Baltimore, la maison de Peters devint un genre de salon bohême et branché fréquenté par les acteurs les plus âgés et les membres de l’équipe comme Doman, Jim True-Frost (qui jouait Roland Pryzbylewski) et d’autres. Plusieurs finirent par y louer des chambres. Peters, strictement végétarien, cuisinait des repas collectifs très sophistiqués. Il y avait un piano et des bœufs improvisés carburant au vin rouge et à la fumette. Pour ceux qui auraient été pris d’une envie subite de peindre une aquarelle en nocturne, des toiles posées sur des chevalets étaient installées au sous-sol. Ses habitués appelaient la maison «L’Académie».
Pendant ce temps, les acteurs plus jeunes vivaient des expériences moins sages –sans entraves, loin de chez eux, ils avaient souvent besoin de relâcher la pression. Ce groupe-là se retrouvait dans le centre, sur le Block, un bout d’East Baltimore Street où s’alignent les clubs de strip- tease (et, dans une ambiance de semi-détente, le commissariat central de Baltimore). Les acteurs de The Wire, devenus des visiteurs de légende du Block, comptaient un noyau dur comprenant Dominic West, Seth Gilliam, Domenick Lombardozzi, Wendell Pierce, Andre Royo (Bubbles), J.D. Williams (Bodie) et Sonja Sohn (Kima) –qui tenait la dragée haute aux garçons tant hors caméra que dans la série.
«Nous finissions de tourner vers 1 heure et, vous savez, les établissements normaux ferment à 2 heures, alors on allait au Block, juste pour palper l’énergie, racontait Royo. Les propriétaires des clubs sortaient, les filles sortaient. C’était comme si on était des héros. Les héros locaux.»
Lors d’une partie de softball entre les acteurs et l’équipe, Royo loua une limousine et une équipe de strip-teaseuses pour jouer les pom-pom girls.
Dominic West, comme on pouvait s’y attendre, attirait l’attention des femmes dans le cadre professionnel comme ailleurs. «N’importe quel mec se serait contenté de ses restes», disait Wendell Pierce. Tous étaient des buveurs invétérés et parfois les choses partaient en sucette. Seth Gilliam appréciait particulièrement peu d’être approché pendant qu’il profitait de son temps libre.
«Il pouvait se changer en pochard mauvais d’une minute à l’autre, rapportait Andre Royo. Si quelqu’un disait: “Oh vous êtes les gars de The Wire” Seth répondait: “Apprends la politesse, on était en train de discuter là.” Et c’était des types qui n’avaient pas l’habitude qu’on leur parle comme ça. Qui déjà avaient pris sur eux pour venir nous voir.»
En général s’ensuivaient quelques cris et bousculades, mais ça n’allait pas plus loin grâce à l’omniprésence des videurs.
«Sonja avait toujours un des videurs en ligne de mire et elle pouvait lui faire signe des yeux. C’est une meuf sexy, alors ils s’assuraient que tout allait bien pour elle.»
Seth Gilliam et Domenick Lombardozzi, Bert et Ernie à l’écran, partageaient un grand appartement à Fell’s Point. Ils organisaient des soirées épiques à base de bière et de jeux vidéo, notamment des tournois de Madden NFL opposant «Les Gentils et les Méchants», les flics contre les dealers. Les parties duraient jusqu’à 5 ou 6 heures du matin, moment où la moitié des joueurs devait partir pour être sur le pont à 8 heures (Clarke Peters, le bohémien raffiné, exprima le fossé des générations qui divisait la distribution après avoir entendu Lombardozzi se vanter d’un coup particulier sur Madden qu’il avait joué la veille au soir: «Il disait: “Yeah, man, ce que tu fais c’est tu appuies sur x, x, y, x, y, y ...” et je me disais: “C’est quoi ce bordel? C’est à ça qu’ils passent leur temps libre?”»).
L’énergie refoulée qui alimentait toutes ces festivités avait un pendant plus sombre. Pour beaucoup de ces acteurs, particulièrement ceux qui travaillaient de nuit pour de longues prises dans des rues glauques, le tournage était épuisant, tant physiquement que mentalement. Andre Royo trouvait particulièrement difficile d’incarner Bubbles, le junkie clairvoyant. Le père de Royo possédait un magasin de vêtements à Harlem et il mettait un point d’honneur à soigner son apparence et à se rendre à l’école en souliers chic et costumes croisés. Il savait que le voir habillé en junkie crado ferait particulièrement mal au cœur à ses parents –pas seulement pour des questions vestimentaires, mais parce que c’était le genre de rôle auquel les acteurs noirs étaient trop souvent cantonnés. Lors de son casting, devant Simon et les producteurs Clark Johnson et Robert Colesberry, Andre Royo exprima son inquiétude à l’idée que Bubbles ne soit qu’un stéréotype de junkie black de plus.
«Ils m’ont juste regardé et m’ont dit: “Oh mais tu n’as pas idée de ce qu’on a dans notre manche”»
Mais si Bubbles a pu être davantage qu’un stéréotype, il n’en était pas moins un personnage difficile à interpréter au jour le jour.
«Le monde intérieur de mon personnage n’était pas particulièrement rose, expliquait Royo. Je regardais Idris? Il n’y avait que des gonzesses devant sa loge. Dom West? Des gonzesses. Sonja? Des mecs et des gonzesses. Moi? Des junkies. Ils tombaient amoureux de Bubbles. J’allais dans la loge, je me débarrassais de toutes mes merdes, je ressortais et ils me regardaient genre “T’es pas comme nous. Va te faire foutre.” Et quand je remettais le costume de Bubbles, c’était “Hey! Ça va? Cool que tu sois de retour!” C’est une prise de tête, man. Cette merde, ça te bouffe.»
À la troisième saison, se rappelait-il: «Je buvais. J’étais déprimé. Je regardais le scénario en me disant “Qu’est-ce que je fais aujourd’hui? Je me défonce ou je pousse ce putain de chariot?”»
Il n’était pas le seul. Dans le bouillon de culture isolé de Baltimore, immergés dans le monde de la rue, les acteurs de The Wire montraient une propension curieuse à reproduire leurs rôles à l’écran d’une manière qui prélevait un tribut sur leur vie réelle: Lance Reddick, qui jouait le très rigide lieutenant Cedric Daniels tourmenté par le manque de discipline de McNulty, entretenait le même genre de relations tendues avec West qui faisait l’imbécile et essayait de le faire craquer pendant les prises. Gilliam et Lombardozzi, comme Herc et Carver, passèrent la plus grande partie des saisons 2 et 3 en marge de l’action, à mijoter dans des intrigues secondaires, et finirent par faire pression pour rompre leur contrat.
Michael K. Williams, dont le rôle d’Omar était de loin le personnage le plus populaire de la série (un journaliste de GQ a dit en plaisantant que demander aux spectateurs qui était leur personnage favori revenait «à leur demander leur membre préféré d’Adele»), s’est tellement laissé emporter par sa soudaine célébrité qu’il a dépensé presque tout son argent tout neuf en jeans, baskets et pour faire la fête. À l’apogée de sa popularité, Williams s’est fait expulser du HLM de Brooklyn où il avait grandi, pour défaut de paiement. Lui et Royo, entre autres nombreux anciens de The Wire, ont raconté avoir cherché de l’aide pour se faire désintoxiquer une fois l’expérience terminée. Sans parler des membres de la distribution qui n’étaient pas acteurs et qui ont été transportés de la vraie Baltimore dans la fausse –parmi lesquels Little Melvin Williams, qui a inspiré Avon Barksdale, en liberté conditionnelle et jouant le rôle d’un parrain avisé et marqué par la vie.
Jouer dans une série comme The Wire signifiait vivre dans un état d’angoisse permanente, la mort (donc le chômage) étant toujours susceptible de vous attendre au prochain retournement d’intrigue. Dans une autre série, la mort d’un personnage peut très bien être le début d’une longue et fructueuse série d’apparitions fantomatiques et autres séquences oniriques. Mais la plupart des acteurs de cet âge d’or de la TV avaient compris que l’un des tropes caractéristiques de l’époque –le fait que, comme dans la vie, n’importe qui peut disparaître à n’importe quel moment– avait d’importantes conséquences pour la sécurité de leur emploi.
La situation avait transformé les acteurs en limiers décortiquant chaque nouveau scénario en quête du moindre signe qu’ils étaient condamnés. «Chaque fois que vous lisiez le script vous recherchiez un indice: quand ils racontent trop votre histoire vous vous dites “oh merde ils en font trop, je vais passer à la trappe”», expliquait Andre Royo. Lui et Michael K. Williams s’étaient dit entre eux que l’un de leurs deux personnages, Omar ou Bubbles, allait obligatoirement y passer avant la fin de la série (et c’est Williams qui remporta ce sinistre concours). Après quelques saisons, Royo finit par développer un genre de syndrome de Stockholm. Il alla voir Simon et lui demanda si garder Bubbles en vie ne desservait pas le réalisme de l’histoire, étant donné l’espérance de vie moyenne d’un mouchard junkie.
«David m’a regardé et m’a dit: “Mais ta gueule. Je ne sais pas ce qui va se passer, mais ce que je sais c’est qu’il faut un peu d’espoir, sinon les gens ne vont pas avoir la force de se lever le matin.”»
L’angoisse des acteurs de The Wire a pu être aggravée par le fait que la communication avec ses acteurs n’a jamais été le fort de Simon sur le plateau. «David avait un problème avec le fait de dire aux gens comment ils allaient mourir. Il ne se contentait jamais de dire “Bon, tu vas mourir.” Il y avait toujours cette énergie bizarre», raconte Andre Royo. Larry Gilliard Jr., qui jouait D’Angelo Barksdale, avait piqué une colère en apprenant son départ précoce dans la saison 2: Simon était tombé sur lui sur le plateau et lui avait dit:
«Tu vas adorer ce que je t’ai écrit pour cet épisode.» «Génial!», avait répondu Gilliard.
«Je veux dire, c’est probablement ton dernier épisode en fait...», avait continué Simon.
La leçon n’avait apparemment pas porté ses fruits à la fin de la saison 3. Tous s’accordent à dire que les producteurs avaient honnêtement l’intention de s’asseoir en face d’Idris Elba pour évoquer avec lui le moment et la façon dont Stringer Bell allait mourir. En réalité, cette réunion n’eut jamais lieu, et il apprit la nouvelle en lisant le scénario –ce qui lui fit péter un câble. Circonstance aggravante, le scénario indiquait qu’Omar devait pisser sur le corps de Bell, ce qui est apparemment une vraie tradition dans les gangs de Baltimore. Idris Elba se rendit sur le plateau et commença à dire aux autres acteurs qu’il ne tournerait pas la scène, réussissant à en gagner certains à sa cause.
«Il était dégoûté, man. Ce que je comprends, parce qu’en effet, on le virait», explique George Pelecanos, l’auteur de polard qui avait écrit l’épisode.
«David et moi on est allés dans sa loge et on a essayé de le calmer. On lui a dit: “C’est la fin du personnage. On ne peut pas continuer son histoire; ce n’est pas logique. Et c’est exactement comme ça qu’il finirait.”»
Idris Elba faisait une fixette sur l’urine. Omar ne lui pisserait pas dessus, justifièrent Simon et Pelecanos; il pisserait sur un personnage de fiction. «Pas sur mon personnage», rétorqua Elba.
Simon et Pelecanos auraient pu avoir recours à l’une des répliques préférées de David Chase lorsqu’il doit faire face à ce genre de récriminations:
«Qui a dit que ce personnage t’appartenait?»
À la place, ils l’ont cajolé et se sont excusés jusqu’à ce qu’Elba se laisse fléchir. La scène de la mort fut tournée dans un hangar vide de Baltimore et terminée à 4 heures du matin. En descendant une rue obscure pour retourner à sa voiture, Pelecanos entendit des pas lourds derrière lui et se retourna, angoissé. C’était Elba. «Je voulais juste te serrer la main, dit-il au scénariste. C’est que du boulot.» Brett Martin
POINTS DE VUE : Le 9 mars 2008, « The Wire » achevait son parcours en recueillant la même attention que celle suscitée par la publication d'un recueil d'économistes sur la croissance potentielle - plutôt réduite. Ils n'étaient ainsi que quelques centaines de milliers égarés devant leur télévision à suivre l'ultime épisode de cette série de cinq saisons, quand aujourd'hui n'importe quelle tête coupée par une illuminée prétendant avoir donné naissance à des dragons en attire dix fois plus.
Les Etats-Unis, visiblement, avaient à l'époque la tête à autre chose qu'à cette fresque exigeante centrée sur le trafic de drogue à Baltimore, ville en pleine décrépitude. C'était même pire que ça : au vrai, la réalité semblait presque démentir tout ce que la série racontait. Un Afro-américain était alors sur le point de se faire élire à la présidence, porté par des foules persuadées qu'il était possible de revivifier le rêve américain.
Inimaginable dans « The Wire », où la plupart des personnages luttent en vain contre un système - l'économie de la drogue, l'institution de la police, les médias, etc. - qui leur laisse autant de chances que Rafael Nadal à ses adversaires sur terre battue. « It's all in the game » (c'est le jeu), lance Omar Little, l'inoubliable détrousseur de dealers de la série, fataliste devant ce « game » qui revient comme un mantra dans la saga. « Yes we can », lui répondait alors Barack Obama.
Dix ans plus tard, Barack Obama a perdu de sa superbe face à Omar Little (dont il est par ailleurs un grand fan). Le premier est devenu celui qui a laissé sa place à Donald Trump, quand le second est la figure emblématique d'une série jadis boudée par les Emmy Awards mais qui trimbale désormais l'étiquette de chef-d'oeuvre absolu de la petite lucarne. Revanche de la fiction qui, d'une certaine manière, annonçait déjà les crises à venir.
Soutien déclaré d'Obama, David Simon, le créateur de « The Wire », décrivait pourtant une réalité qui ne pouvait que faire prospérer un populiste comme Donald Trump, de la même manière que le fervent partisan de l'aristocratie qu'était Balzac se vouait à raconter l'ascension irrésistible de la bourgeoisie sous la Restauration et la Monarchie de juillet.
C'en est presque devenu une tarte à la crème, mais il est difficile de ne pas accoler l'adjectif « balzacien » à l'ambition folle de « The Wire ». À l'origine, David Simon avait caché son jeu aux pontes de HBO. « Hey les gars, que diriez-vous d'une série policière où l'on poursuit des dealers ? » Pas fous, les dirigeants de la chaîne devaient se douter que cet ancien journaliste du « Baltimore Sun » n'allait pas se contenter de leur pondre une sorte de « Commissaire Maigret » mangeant du burger. Mais s'attendaient-ils à ça ? Une fresque foisonnante, tragique et pleine d'humour noir, qui donne sa part d'humanité à tous ses personnages arpentant les trottoirs de Baltimore, de la place de la mairie aux tours de la cité.
L'intrigue policière nous plonge dans « l'autre Amérique », mise sous les projecteurs depuis l'élection de Trump : celle des tensions raciales, des ouvriers laissés pour compte de la mondialisation (la saison 2 sur les docks), celle des services publics qui ne corrigent plus les inégalités (sublime saison 4 centrée sur le destin de collégiens), celle souffrant d'un système politique vérolé par l'argent.
Celle aussi où l'ascenseur social est cassé. Dans une scène mémorable, l'un des dealers, D'Angelo Barksdale, tente d'expliquer les règles des échecs à ses compagnons de trafic. « Comment le pion fait-il pour devenir roi », demande l'un. Soupir, et réponse impitoyable : impossible, « the king stay the king », quoi qu'il arrive. Renaud Honoré.
Pourquoi il faut (re)voir The Wire, le chef- d’œuvre de David Simon
Peu populaire lors de sa diffusion dans les années 2000, l’œuvre de David Simon est devenue un monument de la télévision et une référence pour tous les amateurs de séries exigeantes qui prennent leur temps. Alors pourquoi est-ce qu’on vous bassine toujours avec The Wire ?
Parce que c’est une œuvre unique et radicale
The Wire n’est pas une série télé comme les autres. Elle est la création d’un ancien journaliste du Baltimore Sun, véritablement obsédé par le réalisme de ce qu’il veut montrer, à savoir tout ce qui gangrène cette ville parmi les plus pauvres des Etats-Unis. Chaque saison aborde un thème différent (drogue, politique, école, médias...) ; et si la fibre sociale de The Wire en fait une vraie série politique, elle a surtout un aspect plus proche du documentaire.
Ici, on ne retrouve pas d’acteurs très connus (le casting est majoritairement noir, une rareté à l’époque), l’histoire est lente, complexe et offre plusieurs niveaux de lecture, et la réalisation est parfaitement sobre, sans effets de manche. Et c’est un compliment, puisque cette série que l’on qualifie parfois de naturaliste est aussi comparée à de grands classiques de la littérature pour sa dimension romanesque (on y revient juste après). Toutes ces caractéristiques peuvent sembler déstabilisantes au premier abord, mais elles font toute l’originalité de The Wire.
Parce que ses personnages sont inoubliables
Omar Little le gangster gay flamboyant, Stringer Bell le businessman du deal en costard, Jimmy McNulty le flic dépassé par sa vie privée... David Simon a mis un point d’honneur à s’appuyer sur des personnages romanesques qui marquent durablement le spectateur, alors même que le casting est d’une longueur impressionnante. Et le développement des personnages ne se fait jamais au détriment du réalisme : la série montre un milieu très violent, et personne n’est à l’abri de la mort.
De même, The Wire est appréciée pour son absence de manichéisme entre les personnages de la police et du trafic de drogue. Quels que soient leurs failles, la série pose un regard sensible sur leur complexité et remet en cause la machine qui les broie au quotidien. Il n’y pas de héros, The Wire scrute d’abord la ville de Baltimore dans ses dimensions politiques et sociales pour en faire un personnage à part entière, et un symbole de tous les travers de la société américaine actuelle.
Parce que c’est l’une des meilleures séries du monde, tout simplement
Si tout le monde vous répète en boucle depuis des années que vous devez voir The Wire, c’est peut- être qu’il y a de bonnes raisons derrière, comme on vient de le montrer. La série est considérée à peu près partout comme la meilleure de l’histoire, et même si cette affirmation est largement contestable, sa notoriété comme sa pertinence ne faiblissent pas avec le temps. Au contraire, la précision clinique de The Wire est toujours remontrée pour être étudiée et disséquée sous de nouveaux angles, on y fait référence un peu partout dans la pop culture, et plusieurs générations et catégories de spectateurs se l’approprient partout dans le monde.
C’est d’ailleurs la série préférée d’un certain Barack Obama. Bref, si l’audience de The Wire a triplé sur la plateforme de streaming de HBO depuis le début du confinement aux Etats-Unis, ce n’est pas pour rien. Et on parle d’une chaîne à qui l’on doit les seules autres séries qui peuvent prétendre au titre de meilleure série de l'histoire, preuve que cette performance veut dire quelque chose. Alexis Lebrun
LE JEU DE LA DAME
The Queen’s Gambit
de Walter Tevis, Scott Franck, Allan Scott
avec Anya Taylor-Joy, Harry Melling…
USA, 2020, mini-série en sept épisodes, Couleurs
RÉSUMÉ : En pleine Guerre froide, le parcours de huit à vingt-deux ans d'une jeune orpheline prodige des échecs, Beth Harmon. Tout en luttant contre une addiction, elle va tout mettre en place pour devenir la plus grande joueuse d’échecs du monde. (USA, 2020)
POINT DE VUE : Parties d'échecs, prouesses, contexte historique... La série phénomène "Le Jeu de la Dame" est-elle réaliste ?
Le scénario de la mini-série Netflix Le Jeu de la Dame fait rêver. Orpheline, la jeune Beth Harmon se transforme en prodige des échecs et bat coup sur coup les meilleurs joueurs du monde dans l’Amérique conservatrice des années 1960. Le drame se transforme en conte de fée lorsque monsieur Shaibel, le concierge de l’orphelinat, initie l'enfant solitaire aux échecs dans le sous-sol de l'orphelinat, révélant en elle un talent hors du commun. Mais chez Beth, le génie côtoie les névroses et les addictions, notamment celle aux calmants distribués par les responsables de l'établissements, puis à l'alcool. Autant de freins dans son ascension vers les meilleurs classements.
Inspirée du roman éponyme de Walter Tevis publié en 1983 et réalisée par Scott Frank et Allan Scott, Le Jeu de la Dame rencontre un immense succès depuis sa sortie le 23 octobre. La fiction a même battu le record Netflix du nombre de vues d’une série. Il faut dire que cette œuvre relève un pari de taille : rendre les échecs passionnants pour le grand public, tout en ravissant la communauté des joueurs d’échecs par sa justesse. Le tout porté par le jeu remarquable de l’actrice Anya Taylor-Joy, qui incarne avec brio l’héroïne.
On aimerait croire que Beth Harmon ait existé, ou qu’une femme ait pu dominer de la sorte le monde ultra-masculin des échecs dans les années 1960 (et encore aujourd’hui). On espère également que cette série au récit passionnant n’a pas délaissé les règles du jeu des échecs, et met en scène des parties crédibles. Mais qu’en est- il vraiment ? Franceinfo a traqué les failles du scénario et passé en revue les scènes d’échecs. Malgré une histoire romancée, la fiction rencontre souvent la réalité dans Le Jeu de La Dame. Et si quelques erreurs dans le jeu ont été décelées, elles restent très peu nombreuses et hissent la série au rang de fiction la plus crédible jamais réalisée sur le thème des échecs, selon les spécialistes que nous avons interrogés.
Beth Harmon a-t-elle existé ?
Au risque d’en décevoir certains, Beth Harmon n’a jamais existé. Elle a néanmoins probablement été inspirée par des personnages réels, à commencer par l’auteur du roman dont elle est issue. Walter Tevis était en effet un passionné d’échecs, et lui aussi rongé par une dépendance aux médicaments.
L’écrivain se serait également appuyé sur des joueurs réels. Les ressemblances entre Beth et le champion américain Bobby Fischer sont troublantes. La période couverte par la série, de 1958 à 1968, coïncide avec l’apogée de la carrière du joueur. Comme Beth, Bobby Fisher est précoce, et remporte le championnat des Etats- Unis à 14 ans. En 1972, il est champion du monde à 29 ans. Le joueur émérite avait la réputation d’être associal, intéressé seulement par les échecs. Si l’héroïne du Jeu de la Dame est plus sympathique, certains traits de son caractère sont similaires et elle rencontre des difficultés dans ses relations avec les autres. Dans l’épisode 4, Beth prend des cours de russe pour être prête à affronter les joueurs soviétiques. Bobby Fischer a lui aussi appris cette langue, seul, pour lire les magazines d’échecs soviétiques, considérés comme la meilleure source d’information à l’époque. Enfin, le champion a été l’un des premiers à gagner sa vie uniquement grâce aux échecs, tout comme Beth.
Il reste que s’inspirer de Bobby Fischer est un beau pied de nez à certains propos sexistes du joueur. Dans une interview donnée en 1963, il assurait que les femmes étaient de "terribles joueuses", et ce, parce qu’elles n’étaient pas si intelligentes que ça.
Que signifie le titre de la série ?
Le Jeu de la Dame, en voilà un nom étonnant pour une série qui parle d'échecs. Est-ce une référence à un coup célèbre ? Un clin d'œil à la virtuosité de Beth ? Un peu des deux. The Queen's Gambit, qui est le nom de la série en anglais, est une ouverture très connue des joueurs d'échecs, selon Anthony Wirig, Grand maître des échecs français et cofondateur du site "Apprendre les échecs en 24h". La traduction littérale serait "le gambit dame", car c'est l'appellation exacte de cette ouverture en français. Le Jeu de la Dame, un titre étrange qui aurait même tendance à faire penser au jeu de dames selon l'équipe du site d'apprentissage des échecs, mais qui est, certes, plus sexy.
Beth est aussi comparée au champion du monde cubain Raul Capablanca qui jouait beaucoup le gambit dame. Un autre joueur célèbre, Emanuel Lasker, dira de lui : "J'ai connu beaucoup de joueurs d'échecs mais un seul génie : Capablanca". Une citation qui aurait tout aussi bien pu s'appliquer à l'héroïne de la série. Le Cubain partage un autre point commun avec Beth : un jeu très naturel et intuitif qui lui a permis de rester invaincu pendant 6 ans de 1917 à 1923. Ça ne vous rappelle personne ?
Les parties d'échecs de la série sont-elles réalistes ?
Le Jeu de la Dame a été saluée par la critique pour le réalisme avec lequel elle dépeignait l’univers des échecs dans les années 1960 aux États-Unis, que ce soit à travers ses décors, ses costumes, et surtout, ses parties. Et c’est normal : pour réaliser la série, Scott Frank et Allan Scott ont travaillé de concert avec Garry Kasparov, champion du monde pendant de nombreuses années, et Bruce Pandolfini, un coach très réputé aux États-Unis.
Pour Anthony Wirig, il s'agit d'une collaboration réussie. Le champion français a été impressionné par la présence, les tics et les regards des acteurs, très proches de ceux des joueurs réels. "On prend tout de suite Anya Taylor-Joy au sérieux en tant que joueuse d’échecs. Elle a l’air confiante, ce qui est très important pour gagner. Quand elle perd, on sent l’émotion l’envahir, elle s’énerve, comme de nombreux joueurs", s’enthousiasme-t-il. L'expert salue également la façon dont les acteurs déplacent les pièces, "pas parfaite, mais vraiment impressionnante". Anya Taylor- Joy raconte dans une interview donnée à TV Insider qu’elle a appris à jouer aux échecs pour la série. Mais, bien loin du niveau de son personnage, elle apprenait tous ses mouvements par cœur. Aidée par sa pratique de la danse, elle travaillait ses parties comme des "chorégraphies pour les doigts".
Les amateurs et les passionnés des échecs seront également ravis de reconnaître des coups et ouvertures bien connus. "Le concierge apprend le coup du berger à Beth dans le premier épisode. Par la suite, elle utilise aussi beaucoup la défense sicilienne, qui est une ouverture populaire aux échecs", se réjouit Marie Sebag, Grand maître international des échecs et joueuse numéro un en France. Par ailleurs, de nombreuses références à des parties célèbres sont glissées dans la série, et ce, dès le premier épisode. Dans une scène impressionnante, la jeune Beth bat en simultané tous ses adversaires du lycée voisin de son orphelinat, et joue en fait des variantes des parties des grands champions américains Bobby Fischer et Paul Morphy. Rien que ça.
Lorsque Beth remporte le tournoi du Kentucky face à Harry Beltik dans le deuxième épisode, leur partie fait référence à celle jouée par Rashid Nezhmetdinov contre Genrikh Kasparian en 1955. Dans l’épisode final, Beth bat le champion du monde Vasily Borgov en reprenant des coups joués au festival de Bienne en 1993 par Vassily Ivanchuk et Patrick Wolff.
Y a-t-il des erreurs dans les parties d’échecs ?
Nos experts ont décelé très peu d’erreurs dans les parties. "La case blanche est toujours bien placée dans le coin droit en début de partie", note Marie Sebag.
"Il y a quelques défauts, mais il fallait souvent mettre sur pause pour les voir, et je ne les ai pas tous repérés dès le premier visionnage", poursuit Anthony Wirig. Selon lui, quelques positions sont fausses lors de la scène de la simultanée dans le lycée voisin de l’orphelinat. Dans un passage de l’épisode 3 dans lequel la prodige des échecs s’entraîne dans l’avion, elle enchaîne deux coups de la même couleur. Anthony Wirig relève également des infractions aux règles du jeu. "Normalement, on doit rester assis pendant une partie, on ne peut pas se lever comme Beth le fait dans l’épisode 4 quand elle joue contre un jeune adversaire soviétique à Mexico. Lors du premier tournoi de Beth, un des joueurs tente de lui proposer un match nul avant d’abandonner. Ça non plus, ça ne se fait pas. Enfin, à haut niveau, on ne couche pas son roi comme dans la série", souligne-t-il. Même son de cloche du côté de Marie Sebag. "Les joueurs jouent trop vite, dans la réalité c’est beaucoup plus lent. Il est aussi interdit de parler pendant les parties. Les ajournements existent, mais il n’est pas possible de décider soi-même du moment", mentionne la vice-championne féminine d’Europe.
La série est-elle fidèle sur le plan historique ?
Foule en délire, demandes d’autographes... Il règne une véritable ferveur autour de Beth quand elle se rend en URSS disputer le championnat du monde. Une scène tout à fait plausible, selon Yannick Gozzoli, Grand maître et commentateur de tournois sur Chess 24. "Demander si les échecs étaient populaires en URSS, c’est comme demander si le foot est populaire au Brésil", plaisante- t-il. "En plus d’une importante culture des échecs dans les pays de l’est, la discipline revêtait une portée symbolique immense pendant la guerre froide", poursuit l’historienne Emilia Robin. Pour les Soviétiques, les échecs étaient selon elle la métaphore parfaite de l’intellect poussé à son paroxysme : "Ce jeu, qui mobilise des qualités de stratégie, d’analyse et de maîtrise de soi, était une façon de prouver leur supériorité intellectuelle. La puissance de l’esprit face à la puissance financière des Américains". Ainsi, la chercheuse confirme que les Soviétiques dominaient les échecs depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les jeunes talents étaient recrutés et entraînés dès leur entrée à l’école. De 1948 à 1972, il n’y aura que des champions du monde soviétiques. Selon Emilia Robin, la partie finale de Beth contre Borgov est inspirée de celle qui opposa Bobby Fischer contre Boris Spassky en 1972, et marqua la première défaite russe depuis plus de 20 ans.
L’atmosphère de la guerre froide est néanmoins légèrement édulcorée selon l’historienne. Elle explique que l’ambiance du championnat de 1972 était très tendue par rapport à celle dépeinte dans la série : "Spassky s’était senti faible et les Soviétiques auraient alors vérifié que les Américains n’avaient pas installé de dispositifs électromagnétiques visant à le perturber, selon Emilia Robin. L'historienne précise qu'aux États-Unis, les échecs étaient moins populaires qu’en URSS. Mais à la fin des années 1960, une "Fischer mania" a réveillé l’instinct patriotique des Américains. Comme le champion américain, Beth devient au fil de son parcours un phénomène national. Enfin, comme dans la série, des mouvements chrétiens investissaient des fonds dans les voyages des champions pour contrer le communisme, anti-religion.
Les prodiges aussi jeunes et impressionnants que Beth existent-ils ?
Beth ne rencontre aucune défaite avant d’affronter le champion du monde Vasily Borgov. C’est prodigieux, mais est-ce vraiment plausible ? "Pas du tout", selon le Grand maître Yannick Gozzoli : "Ça demande un travail phénoménal, ça n'existe pas quelqu'un qui se réveille comme ça et qui devient champion sans jamais perdre", s'exclame le joueur, qui n'a d'ailleurs pas apprécié la série qu'il ne juge pas crédible. Pour Marie Sebag, le scénario est clairement trop beau pour être vrai. Ainsi, elle qualifie la partie en simultanée dans le lycée de curieuse". "Normalement, c’est compliqué d’atteindre un tel niveau en quelques mois", explique-t- elle. Pour l’experte, Beth gagne trop, surtout au début. "Elle n’a aucune expérience des compétitions, mais elle n’essuie aucune défaite lors de son premier tournoi, qui est quand même d’un niveau élevé. Certains facteurs comme la gestion du stress sont indispensables pour réussir, et ils s’apprennent au fur et à mesure, en situation", poursuit-elle. "Le problème, c'est que les réalisateurs ont occulté toute la dimension du travail au quotidien", tranche Yannick Gozzoli.
Anthony Wirig ne partage pas le même avis. Pour lui, les épreuves que traverse Beth sont particulièrement compatibles avec le développement d’un talent inouï. "Elle arrive à l’orphelinat à 8 ans, elle en sort à 15, elle s’ennuyait et les échecs étaient son seul échappatoire. Pendant toutes ces années, elle a probablement passé tout son temps à y penser et à y jouer, avec monsieur Shaibel ou dans sa tête", déclare-t-il. Pour l’expert, le fait que Beth remporte son premier tournoi est "un peu fort", mais pas impossible. "De très jeunes prodiges des échecs, c’est très rare mais ça arrive", affirme le champion français. L’un des meilleurs joueurs américains des années 1930 à 1970, Samuel Reshevsky, battait ainsi régulièrement des adultes aguerris dans des parties simultanées alors qu’il n’avait que 8 ans.
Existait-il des femmes championnes des échecs dans les années 1960 ?
Comme le montre Le Jeu de la Dame, l’univers des échecs est très masculin, surtout dans les années 1960. Des championnes qui ont concouru dans des épreuves mixtes, comme Beth, ont néanmoins existé. C’est le cas de la Hongroise Judit Polgar. Elle a régulièrement battu les meilleurs joueurs, dont le numéro 1 mondial en 2002, qui n’était autre que Garry Kasparov. Judit Polgar est la seule femme à s’être jamais rangée dans le top 10. Mais pour elle, Beth Harmon bénéficie d’une bienveillance peu crédible de la part de ses concurrents masculins. Dans une interview donnée au New York Times, la joueuse confie que certains de ses adversaires ont refusé de lui serrer la main. Pour elle, la scène de l’épisode 7, dans laquelle Shapkin abandonne face à Beth en lui faisant un baisemain, est inconcevable. D’autres femmes ne sont pas du même avis.
Marie Sebag, numéro 1 actuelle des joueuses françaises, raconte que son expérience concorde avec la série, et qu’aujourd’hui, les joueurs ne sont pas hostiles aux femmes. Elle ajoute que la discipline s’est fortement féminisée depuis les années 1960. Quoi qu’il en soit, comme au temps de la série, Marie Sebag regrette qu’aujourd’hui encore, "très peu de femmes jouent dans des tournois mixtes". Au sein des 1700 Grands maîtres mondiaux, seules 37 sont des femmes. Et une seule, la Chinoise Hou Yifan, se classe actuellement dans le top 100. En plus d’attirer un nouveau public vers les échecs, Le Jeu de la Dame aura donc permis d’ouvrir un débat sur la place des femmes dans cette discipline encore très masculine. Faustine Mazereeuw - franceinfo -
COMMENTAIRES : Échec et mat ? Une juge américaine accepte l’action en justice intentée par Nona Gaprindashvili contre Netflix pour diffamation. Cette célèbre joueuse d’échecs d’origine géorgienne décidait d’attaquer le géant du streaming. La raison ? Une réplique prononcée dans la série à succès, « Le Jeu de la Dame », qui ne passe pas. Et pour cause. Dans le dernier épisode, un personnage évoque la carrière de Nona Gaprindashvili et déclare qu’elle ne s’est jamais mesurée à des hommes lors d’un tournoi. Ce qui est faux. Elle en a même affronté 59, rien qu’en 1968 – l’année durant laquelle ledit épisode se déroule. Une affirmation inexacte que la championne internationale considère « sexiste et dévalorisante ».
« La réplique “a déformé l’une des réalisations les plus importantes de sa carrière... devant des millions de téléspectateurs à travers le monde” et “a terni sa réputation personnelle et professionnelle” », déclarent les avocats de la plaignante, dans des documents juridiques relayés par «Variety ».
Pour tenter de se justifier, Netflix a fait savoir que « Le Jeu de la Dame » était une œuvre fictionnelle avant d’opter pour la carte du premier amendement, relative à la liberté d’expression. La plateforme de streaming a également tenu à souligner qu’ils « ne voulaient pas offenser Nona Gaprindashvili » et que « la référence à la plaignante dans la série visait à la reconnaître et non à la dénigrer, rapporte « Variety ».
Des arguments qui ne semblent pas avoir convaincu la juge fédérale Virginia A. Phillips, qui donne raison à Nona Gaprindashvili. En effet, elle considère que « les œuvres de fiction ne sont pas à l’abri de poursuites en diffamation si elles dénigrent de vraies personnes », rapporte le média américain. Par ailleurs, la magistrate pense que la série - qui tente de valoriser les joueuses d’échecs dans un monde exclusivement masculin - n’envoie pas le bon message avec cette fausse information. Selon elle, la réplique mise en cause valorise les exploits d’un personnage fictif, Beth Harmon, au détriment de ceux réellement réalisés par Nona Gaprindashvili dans les années 1960 et 1970.
La joueuse géorgienne a été championne du monde d’échecs entre 1962 et 1975. Trois ans plus tard, elle est devenue la première femme à obtenir le titre de Grand maître international.
Lorsque « Le Jeu de la Dame » débarque sur Netflix le 23 octobre 2020, la série remporte un franc succès. Binge watché par des millions d’abonnés, le destin prodigieux de Beth Harmon passionne les foules. À tel point que de nombreux curieux chercheront à savoir la part de vraie dans l’histoire racontée à l’écran. Elle Culture.
L’HOMME DE FER
Ironside
de Collier Young, 1967-1975, US, Couleurs, 194 épisodes.
avec Raymond Burr, Don Galloway, Don Mitchell…
RÉSUMÉ : Chef de la police de San Francisco, Robert Dacier est un redoutable policier qui, après avoir reçu une balle dans le dos, se retrouve dans un fauteuil roulant, privé de l'usage de ses jambes. Il revient alors dans la police en tant que consultant... Il est entouré d'une équipe de choc avec laquelle il continue de lutter contre le crime, en commençant par enquêter sur sa propre tentative d'assassinat...
COMMENTAIRES : Cette série met en scène Robert Dacier, redoutable policier qui, après avoir reçu une balle dans la colonne vertébrale, se retrouve dans un fauteuil roulant, privé de l'usage de ses jambes. Il est entouré d'une équipe efficace avec laquelle il continue à mener ses enquêtes policières.
Les séries anciennes existent en DVD ! Cet article a pour but de vous rappeler cette réalité, vous qui appréciez les séries anciennes, qu'il existe un véritable travail réalisé par des éditeurs à la fois opiniâtres et talentueux pour vous faire découvrir ou redécouvrir des séries des années 60, 70 et 80. Tel est le cas avec L'homme de fer. En effet, cette série aura connu une sortie en DVD grâce au formidable travail réalisé par Eléphant Films. C'était en avril 2015.
L'Homme de fer est une série télévisée américaine créée par Collier Young. Diffusion entre le 28 mars 1967 et le 16 janvier 1975 sur le réseau NBC.
En France, la série a été diffusée à partir du 24 novembre 1969 sur la première chaîne de l'ORTF et rediffusée sur TMC, Antenne 2 et M6.
Cette série met en scène Robert Dacier (Raymond Burr - voix françaises : Jean Martinelli puis Jacques Berthier), redoutable policier qui, après avoir reçu une balle dans la colonne vertébrale, se retrouve dans un fauteuil roulant, privé de l'usage de ses jambes. Il est entouré d'une équipe efficace avec laquelle il continue de mener ses enquêtes policières. On citera notamment Don Galloway (- voix française : Daniel Gall), Barbara Anderson, Elizabeth Baur et Don Mitchell.
Né à New Westminster, Colombie Britannique, au Canada le 21 mai 1917, Raymond Burr est associé à deux personnages emblématiques de la télévision : Robert Dacier et Perry Mason. Engagé dans la Navy pendant la Seconde Guerre mondiale, Raymond Burr est blessé au bout de deux années, puis rapatrié chez lui. Il commence alors de petits rôles à la radio puis au cinéma. Il sera révélé par le personnage de Lars Thorwald dans le célèbre Fenêtre sur cour d'Alfred Hitchcock.
En 1955, il passe une audition pour le rôle d'Hamilton Burger, le district attorney des romans d'Erle Stanley Gardner. Ce dernier, présent à l'audition, reconnaîtra aussitôt en l'acteur celui qui doit jouer Perry Mason. La série est un succès. En 1967, Raymond Burr débute une nouvelle série policière qui remportera un énorme succès : L'homme de Fer. Il incarnera ce rôle pendant huit années, puis à l'occasion d'un ultime téléfilm Le retour de l'homme de fer. En 1977, Raymond Burr incarne R. B. Kingston, un magnat de la presse, dans la série Kingston : Confidential, mais cette dernière ne durera qu'une saison (13 épisodes).
Atteint d'un cancer du côlon qui va dégénérer, Raymond Burr finira sa vie dans un fauteuil roulant et s'éteindra finalement le 12 septembre 1993, non sans avoir tourné trois Perry Mason en plus du téléfilm Le retour de l'homme de fer.
Robert Dacier est surnommé « le flic des flics » lorsqu’un criminel tente de le tuer. Une balle, logée dans la colonne vertébrale, va changer sa vie à jamais. Cloué dans un fauteuil roulant, après avoir échappé de peu à la mort, le fin limier parvient à convaincre le chef Randall de le nommer consultant spécial au département de la police. Dans la ville de San Francisco, il traque désormais les malfaiteurs et les meurtriers avec un équipe sur mesure : Eve Whithfield, le sergent Ed Brown et Mark Sanger, ex-délinquant devenu le protégé de Dacier. Cette bande constitue une vraie « famille » professionnelle autour de l’expert en bonne déduction.
– Raymond Burr est la star de la série. Avant de s’asseoir dans le fauteuil de L’Homme de fer, l’acteur avait déjà connu le succès avec Perry Mason, diffusé près de 10 ans sur CBS. Il a retrouvé les habits du célèbre avocat dans les années 1980. En 1993, il a souhaité incarner une dernière fois Robert Dacier dans Le Retour de l’homme de fer. Malade, Raymond Burr a achevé le tournage et est décédé le 12 septembre 1993.
– L’Homme de fer a tout un attirail à sa disposition pour mener ses enquêtes. En effet, il est régulièrement sur le terrain grâce au camion-bureau mis à sa disposition. Cet engin est même équipé d’une plate-forme hydraulique pour lui permettre de monter et descendre. Le personnage a installé ses appartements au sein de locaux inutilisés de la police. Il est également aménagé en conséquence.
– Au terme de la saison 1970 / 1971, Barbara Anderson a quitté la série suite à un désaccord avec la production. Elle a été remplacée par Elizabeth Baur, qui devient Fran Belding. Les deux actrices ont participé au téléfilm Le Retour de l’homme de fer en 1993.
– En 1974, Raymond Burr a été victime d’une crise cardiaque. Il est ensuite parti se reposer sur une île du Pacifique. La société de production Universal a imaginé concevoir une série autour de L’Homme de fer au paradis. Cette idée a rapidement été abandonnée.
– Aux États-Unis, L’Homme de fer (Ironside en VO) est presque toujours restée une série du jeudi soir. Elle a démarré en septembre 1967 à 20h30. En janvier 1975, la fiction était encore programmée le même jour, mais à 21 heures. La saison 1970 / 1971 a été la meilleure en terme d’audience. Ironside s’est alors classée quatrième des meilleures performances annuelles, entre Here’s Lucy et Police des plaines. En janvier 1975, lors de son arrêt brutal, trois épisodes n’ont pas été diffusés.
– Le générique très célèbre de la série a été composé par Quincy Jones.
– En France, L’Homme de fer a été découverte sur la première chaîne de l’ORTF en novembre 1969. Elle a notamment été rediffusée sur Antenne 2 et M6.
Ironside : le remake de L'Homme de fer annulé après seulement 4 épisodes
La chaîne américaine a officiellement mis fin aux enquêtes du policier en chaise roulante incarné par Blair Underwood…
Ce n'est pas dans les vieux pots... qu'on fait les meilleures audiences. NBC a officiellement annulé Ironside, le remake de L' Homme de fer. La série policière avec le « badass » en chaise roulante interprété par Blair Underwood, qui en est également le producteur, quittera l'antenne le 23 octobre prochain, au terme de son 4ème épisode.
Ereintée par la critique et boudée par le public (5,6 millions de téléspectateurs de moyenne), elle était de toute façon condamnée à plus ou moins court terme à rejoindre We Are Men et Lucky 7 au cimetière des nouvelles séries annulées. Oct. 2013.
PREUVE À L’APPUI
Crossing Jordan
de Tim Kring, 2001-2007, US, série policière, Couleurs
avec Jill Hennessy, Miguel Ferrer, Steve Valentine…
RÉSUMÉ : Après avoir passé quelques années à Los Angeles, le Dr Jordan Cavanaugh revient à Boston, sa ville natale pour reprendre son ancien job au département de médecine légale de la police. Obstinée et forte tête, Jordan suit son intuition et mène sa propre enquête pour démontrer sa théorie...
COMMENTAIRES : Série américaine se déroulant à la fois dans le milieu médical et policier, "Preuve à l’appui" propose à ses fans une plongée au cœur d’un cabinet de médecins légistes, un cabinet où le docteur Jordan Cavanaugh mène une vie bien mouvementée. Personnage obstiné et souvent têtu, le docteur Jordan Cavanaugh ne peut en effet s’empêcher de mener ses propres enquêtes lors de chaque affaire, éprouvant bien souvent le besoin irrésistible de démontrer la véracité de ses théories. Entre enquêtes policières, intrigues et vie quotidienne des personnages qui font vivre la série, "Preuve à l’appui" est un petit bijou pour les personnes qui souhaitent se reconvertir dans une carrière de médecin légiste.
Personnage central de la série, le docteur Jordan Cavanaugh est interprété à l’écran par l’actrice Jill Hennessy, la même actrice qui interprète le rôle de Claire Kincaid dans la série "New York District". Collègues de travail de la jeune femme, les autres médecins légistes de la série sont incarnés par Miguel Ferrer (Dr. Garret Macy), habitué des séries télévisées avec "Magnum", "Chips", ou plus récemment "Les Experts" et "Médium", Steve Valentine (Dr. Nigel Townsend), Ravi Kapoor (Dr. Malesh), Ivan Sergei (Dr. Peter Winslow), Lorraine Toussaint (Dr Elaine Duchamps) et Mahershala Ali (Dr. Trey Sanders). Jerry O’Connell (Woodrow Wilson Hoyt) et Leslie Bibb (Tallulah "Lu" Simmons) interprètent, quant à eux, les détectives qui sont chargés de collaborer avec ce cabinet de médecins légistes si particulier. Télé Loisirs.
Créée par Tim Kring, à qui l'ont doit notamment la série Heroes, Preuve à l'appui est une série de la chaîne NBC diffusée pour la première fois le 24 septembre 2001. La série a été arrêtée en 2007 à l'issue de sa sixième saison et après 117 épisodes. En France, la série a été diffusée pour la première fois sur TF1 en septembre 2002. Après des rediffusions sur TMC et TV Breizh, c'est la chaîne Série Club qui la diffuse à partir du 1er octobre 2012. Elle raconte l'histoire de Jordan Cavanaugh, une femme brillante et séduisante, médecin de profession mais avec un certain penchant pour la résolution des crimes. Après avoir vécu quelque temps à Los Angeles, elle revient dans sa ville natale, Boston, pour reprendre son premier métier à l'institut médico- légal de l'Etat du Massachusetts. Elle retrouve son père, Max, un ex-flic, toujours hanté par le meurtre irrésolu de sa femme, la
mère de Jordan.
Bientôt, Jordan est amenée à enquêter sur le suicide d'une prostituée adolescente. Cette disparition pourrait dissimuler une sombre affaire, impliquant des hauts responsables... Première.
Au cours de la troisième saison, qui n'est composée que de treize épisodes, Jordan est notamment jurée lors du procès d'un meurtrier. Evidemment, éprise de justice comme elle l'est, elle revisite les preuves, les trouvant discutables. Une veuve, peut-être noire, une attaque de vampire, un corps radioactif ou les restes d'un nourrisson : autant d'enquêtes menées avec brio par Jordan et le reste de l'équipe de l'Institut médico-légal. Outre le passé de Jordan, l'énigme autour de la possible culpabilité de son père, et les amours de Jordan et de ses partenaires masculins, comme Woody ou Garret, la série permet de suivre les pérégrinations de quelques personnages attachants, comme Nigel, gothique fantasque interprété par Steve Valentine. À noter dans cette saison la participation de Jennifer Finnigan (de la série «Close to Home : Juste Cause») dans le rôle du docteur Maguire. Télérama.
LE CAMÉLÉON
The Pretender
créé par Craig W. Van Sickle, Steven Long Mitchell, 1996, US/Canada, Couleurs
avec Michael T. Weiss, Andrea Parker, Patrick Bauchau…
RÉSUMÉ : Il existe des êtres doués d'une intelligence supra normale, des génies qui possèdent entre autres la faculté d'assumer n'importe quelle identité. En 1963, les chercheurs d'une entreprise appelée "Le Centre" ont mis en isolement un de ces êtres, un jeune garçon nommé Jarod et exploitèrent son génie pour des recherches secrètes. Mais un jour le "Caméléon" leur échappa...
COMMENTAIRES : Cette série américaine raconte l’histoire de Jarod, trentenaire doué d'une grande intelligence. Véritable caméléon humain, il change constamment d'identité pour atteindre son objectif : vaincre les injustices. En 1963, des scientifiques faisant partie d'une société appelée "Le Centre" l’ont isolé dans le but d’utiliser son intelligence pour des missions secrètes. Le Centre l’utilise depuis qu’il est jeune pour des tests ayant engendré la mort de plusieurs personnes. Jarod s’enfuit dès lors qu'il découvre qu’il est utilisé pour de mauvaises causes. Alors que Sydney, psychiatre, et Mlle Parker, la chef du centre, le poursuivent, il part à la recherche de sa famille et met à profit ses dons pour réparer de nombreuses inégalités.
Même si Jarod ne fait plus partie du Centre, il continue de servir son pays, en exerçant de multiples professions : pilote de chasse puis agent du FBI ou encore officier dans la Marine, avocat...
La vie de Jarod est inspirée de celle de Ferdinand Demara, célèbre escroc plus connu sous le nom du " Grand Imposteur ", qui a emprunté plusieurs identités pendant trente ans, comme celle d’un chirurgien, d'un docteur en zoologie, d'un étudiant en droit, d'un shérif ou encore d'un enseignant.
Pour commencer, le Caméléon, c'est Jarod. C'est un individu doté d’une intelligence hors-du commun. Sans compter sur le fait qu'il est capable de prendre l'identité de n'importe qui. Echappé du Centre qui l’a maintenu prisonnier, et « entrainé » durant des années, il cherche désormais à retrouver son identité et sa famille. Il en profite pour combattre les injustices durant son périple. Mais aussi il découvre les plaisirs simples d’une vie d’homme libre. À ses trousses, une équipe formée d’une agent froide et implacable. Cette dernière est Miss Parker, de l’ancien « professeur » de Jarod. De surcroît s'y ajoutent Sydney et de Broots, un touche-à- tout en informatique.
Né sous la patte de Steven M Long et de Craig Van Sickle (duo de créateurs dont la collaboration remonte aux années 80), "Le Caméléon" arrive sur la chaine NBC le 19 septembre 1996. Forts de leur expérience chez Stephen J. Cannell (grâce à la série "Cobra" - 1993-1994, 1 saison), le duo scénarise la quasi-totalité de la série. Ils deviennent également les producteurs exécutifs du show. Assez classique sur le papier, respectant les grandes lignes des séries grand public et ses thèmes de prédilection (famille, justice, innocence, philanthropie) et flirtant souvent avec le formula-show (à chaque épisode, Jarod prendra une nouvelle identité pour aider ceux dans le besoin), "Le Caméléon" se révèle pourtant rapidement être une série à vocation feuilletonnante.
Si "Le Caméléon" trouve ses racines dans une autre série populaire, "Le Fugitif" avec David Janssen (1963/1967), il s’en éloigne rapidement (dès le deuxième épisode). Car il évite l’« héros-centrisme » et la cavale justicière pleine de bons sentiments pour s’intéresser à une pléthore de bad-guys potentiels. Parce que le personnage principal s’efface ainsi régulièrement au profit des autres personnages. Par ailleurs, tous sont plus énigmatiques les uns que les autres. Nuancés, ils permettent à la série de trouver un souffle bienvenu en évitant régulièrement le manichéisme (même si on se doute que certains personnages sont incapables du moindre mal). D’où un suspens grandissant de saison en saison où rien n’est laissé au hasard. Les bons et les mauvais ne font souvent qu’un. Bref, tous les personnages s’avèrent faire partie d’un gigantesque puzzle à résoudre.
D’un postulat de base reprenant un jeu du chat et de la souris, "Le Caméléon" démontre surtout, qu’avec peu de moyens, mais avec beaucoup d’ingéniosité, une série aura réussi le tour de force de s’imposer, en termes critiques comme en termes d’audience. Le tout en sortant des sentiers battus. Faisant preuve d’une bonne maitrise scénaristique (chaque épisode apporte des indices aux intrigues principales) et d’une parfaite définition de ses personnages, "Le Caméléon" rivalise sans mal avec le ténor d’époque qu’était "X-Files". Toutefois, tout en restant dans une thématique plus terre-à-terre. D’épisode en épisode, tout est fait pour maintenir le suspens. Notamment avec une utilisation soignée des détails et des flash-backs, jusqu’à l’inévitable cliffhanger (en général un double ou triple épisode) de fin de saison se concluant en général par une révélation cruciale (les épisodes "Mensonges" et "Patrimoine génétique" en sont des parfaits exemples).
Pour autant, la quête d’identité de Jarod ne sera jamais oubliée. Cependant, elle deviendra presque secondaire au regard d’autres énigmes qui apparaitront au fur et à mesure des saisons (l’histoire de la mère de Miss Parker, les autres caméléons, le vrai rôle de Sydney...). Jarod évoluera sans cesse. Il fera vite oublier le côté un peu lisse et gentillet du personnage tel qu’il est dépeint dans la première saison. Miss Parker, probablement le personnage le plus marquant de la série, supplantera même le héros dans le cœur des fans de la série (selon un sondage maison réalisé par M6 en 1998). Pourquoi ? Parce que les différentes facettes du personnage changeaient des habituels anti-héros de ce genre de séries. Un comble pour une série qui faisait la part belle aux sacro-saintes valeurs américaines et qui se mue en cours de route en véritable chroniques de guerre mentale, voire même parfois en tragédie grecque ! Enfin, le ton de la série laissera place à une approche plus dramatique et plus réaliste à chaque scénario. Néanmoins, certains épisodes (probablement demandés par la chaîne) casseront le rythme en imposant un ton totalement décalé, voire comique (les épisodes 3x12 et 4x11 dont on peut faire l’impasse).
Le Centre, véritable personnage à part entière dans la série, conservera malheureusement beaucoup de ses mystères. En effet, au bout de 4 saisons, NBC arrêtera brusquement la production de la série (alors que les audiences restaient plus que correctes et que la série n’avait rien d’un gouffre financier). Aussi, les droits rachetés par la chaine TNT, en 1999, offriront aux fans 2 téléfilms : "Caméléon contre Caméléon" ("The Pretender" 2001). Puis, "Le Caméléon : L’antre du diable" ("The Pretender : Island of the Haunted"). Si le premier tente de faire le raccord avec la fin de l’ultime saison, les révélations restent bien maigres au regard de la mythologie que Steven Long Mitchell et Craig Van Sickle auront réussi à créer jusque-là. Le second tentera une approche plus mystique de la série. Mais, encore une fois, le cœur ne semblait plus y être. Ni l’intrigue, ni les éléments « surnaturels » ne convainquaient.
La série s'est terminée en 2000 après 4 saisons, 86 épisodes, elle a été prolongée par deux téléfilms puis est revenue en 2013 sous forme de romans.
Le caméléon (NBC). La série met en scène Jarod (dont on ignore le nom de famille), un homme séquestré pendant 33 ans dans « le Centre », une fondation secrète. Doué d’une intelligence exceptionnelle, Jarod a été depuis son plus jeune âge soumis à des simulations, des reconstitutions de situations réelles où il devait reproduire le schéma mental de personnes ayant pris part à ces événements. Lorsqu’il apprend les objectifs malfaisants de nombre de ces simulations, il décide de s’évader. Culpabilisé par l’emploi des résultats de ses simulations, il décide de devenir une sorte de justicier secret.
Non seulement la série est génialement portée par Michael T.Weiss, mais sa mythologie qui se développe sur 4 saisons et 2 téléfilms est tout simplement passionnante et complexe.
Après 4 saisons, et en plein succès, la série est annulée car NBC, qui la diffusait, décide de mettre à sa place des matchs de footballs XFL récemment achetés, et de tout simplement... retirer la série de l'antenne. Les créateurs de la série l'apprennent en mai 2000, sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Michael T. Weiss se retrouve privé du personnage de Jarod, mais pas pour longtemps.
Et oui car après la fin de la quatrième saison en 2000, le show a été annulé sans avoir eu de conclusion. Pire encore, le dernier épisode se terminait par un cliffhanger et l'intrigue avait été laissée avec des questions sans réponses. Les fans les réclament, et la chaine TNT décide de lancer un plan de quatre téléfilms pour tout conclure.
Le premier d'entre eux, Le Caméléon - Caméléon contre caméléon (2001), reprend pile là où s'était terminée la série. Jarod rejoint la NSA pour participer à retrouver un tueur qui est appelé Le Caméléon. Le second téléfilm, L'Antre du Diable (2001), voit Jarod retrouver des reliques sur une île mystérieuse. Ces deux tentatives (diffusées en France sur M6) seront peu suivies par le public, conduisant la chaîne à annuler les deux autres téléfilms prévus... et à laisser un cliffhanger sans conclusion.
Le dernier épisode de la quatrième saison montre Jarod et Miss Parker unis et prêts à travailler ensemble pour rechercher un certain Ethan détenu par Raines. Ce dernier serait leur demi-frère. Alors que le couple vient tout juste de le retrouver et parviennent à le faire évader, ils s’engouffrent tous les trois dans le métro... qui explose brutalement ! Jarod, Miss Parker et Ethan sont-ils morts ? La réponse se trouvera dans deux téléfilms (aux intrigues un peu tirés par les cheveux) qui suivront la fin de la série.
Jarod (Michael T. Weiss)
Le caméléon ! On ne connait ni son nom, ni ses origines. Trentenaire, mais affichant une innocence adolescente et une certaine crédulité, il n’en est pas moins un redoutable adversaire face à ceux qui ont trompé la justice. Supra-intelligent, entrainé par le Centre qui l’a kidnappé étant enfant, il connait parfaitement ceux qui le pourchassent. En effet, il a pu s’emparer de leurs dossiers confidentiels avant de s’échapper. Ce qui le rend précieux pour ceux qui désirent connaitre ce que le Centre leur a caché. Mais aussi ce qui le rend dangereux pour ceux qui veulent garder sous-clé les pires secrets du Centre.
Michael T. Weiss a commencé sa carrière dans le soap "Des jours et des vies" avec un rôle récurrent de médecin. Il a ensuite joué dans les séries "La malédiction de Collinwood" (1991) et "2000 Malibu Road" (1992) avant de connaitre le succès avec "Le Caméléon". Par la suite, l’acteur fera quelques apparitions dans d’autres séries telles "Preuve à l’appui", "Profiler" (2 cross-over avec "Le Caméléon"), "Burn Notice" et "Blue Bloods". Il assurera également de nombreux doublages pour les séries animées "Justice League", "Young Justice" et "La Légende de Tarzan".
Il est très largement absent des plateaux. Âgé de 53 ans, ce militant écologiste utilise sont temps libre pour défendre la sauvegarde de la planète avec le mouvement "Earth communication office".
Michael T. Weiss (T pour Terry) est tout aussi indéchiffrable que Jarod, le personnage qu’il a interprété dans Le Caméléon. On a rarement vu acteur aussi secret que lui... alors qu’il a été été une star mondiale.
Quand il décroche le rôle principal dans ce qui est une des meilleures séries des années 90, Michael a 34 ans et est peut-être un acteur inconnu en France mais pas aux États-Unis où il a sa petite notoriété.
De 1985 à 1990, il a en effet incarné le Dr Mike Horton dans le soap Des jours et des vies (un personnage qui a changé maintes fois de tête !), il a ensuite joué dans la série La malédiction de Collinwood (avec un tout jeune Joseph Gordon Levitt), le feuilleton 2000, avenue de l’océan, annulé au bout de 6 épisodes (avec Drew Barrymore et Jennifer Beals), et il est apparu dans un épisode de la série érotique Red Shoe Diaries (aussi connu sous le titre de Fantasmes et narré par David Duchovny juste avant qu’il ne joue dans X-Files)... Et parallèlement à tout ça, il a aussi été coach sport pour des stars !
Le Caméléon est bien évidemment le rôle de sa vie. Et Michael T. Weiss fait des merveilles dans la peau de Jarod, cet enfant enlevé puis élevé au sein du Centre, un garçon surdoué qui va développer des connaissances et des capacités monumentales lui permettant d’endosser n’importe rôle ou métier, que ce soit médecin, agent du FBI et même gigolo ! Un don qu’il va mettre à profit après son évasion – après plus de 30 ans de captivité pour devenir un bon Samaritain. Et tenter de découvrir qui il est vraiment.
Le Caméléon est diffusé de 1996 à 2000, pendant quatre saisons. Sans oublier deux téléfilms sortis en 2001 et qui ont frustré plus d’un fan de Jarod et Miss Parker (qui l’a traqué sans relâche) ! Et ensuite ? La carrière de Michael T. Weiss connaît un sacré coup d’arrêt.
Certes, il fait un peu de théâtre (en tant que comédien et metteur en scène), il prête sa voix à des dessins animés (il est notamment celle de Tarzan dans La légende de Tarzan, et celle de Captain Atom dans La Ligue des justiciers : Nouvelle Génération), il apparaît dans une poignée de téléfilms séries (Preuve à l’appui, Blue Bloods, Burn Notice) et on peut aussi le voir dans le film Sex and the City 2 (c’est lui qui dragouille Big lors du mariage de Stanford et Anthony – de quoi rendre Carrie jalouse !), mais rien qui ne soit à la hauteur de Jarod.
Son dernier rôle en date de 2017 est une apparition dans un film intitulé Sunset Park, sur fond de boxe. Depuis ? RAS. Il semble avoir tiré un trait sur carrière d’acteur.
On sait néanmoins qu’il s’adonne à la peinture (du genre abstrait). Car en plus d’avoir étudié l’art dramatique, Michael T. Weiss est titulaire d’une licence en beaux-arts de l’université de Californie du Sud, il a également suivi des cours d’histoire de l’art à l’université de Harvard, et il a poursuivi des études artistiques à l’Otis College of Fine Art & Design. Invisible sur les réseaux sociaux, oublié de tous, la dernière fois qu’il été photographié lors d’un événement public, c’était en 2019. Il avait les cheveux mi-longs et portait une barbe. Ah, et si vous vous demandez s’il est en couple ou papa ou autre... on ne sait pas. Michael T. Weiss est une énigme !
Et aujourd’hui ? « J’écrirai mon autobiographie quand je serai mort ! », aurait dit Michael T. Weiss. Pour l’instant, à 55 ans, il se consacre à ses trois autres passions. D’abord la peinture, pour laquelle il avait fait une pause de deux ans post-Caméléon (pause qui ne l’a pas vraiment aidé à se remettre en selle professionnellement) et expose régulièrement ses œuvres. Mais aussi le théâtre (il se produit sur scène avec diverses compagnies, à New York ou Los Angeles) ; et l’écologie. L’acteur, qui avait tenté de convertir toute l’équipe du Caméléon à la cause écolo, a l’âme verte ! Un engagement pour la planète qu’il prend très au sérieux : il est un membre actif du mouvement « Earth communication office », comme Pierce Brosnan.
CRITIQUE : Retenu prisonnier au Centre depuis sa jeune enfance, Jarod finit par s'enfuir. Pour échapper à ses poursuivants, il utilise son intelligence qui lui permet d'assumer l'identité de son choix et en profite pour résoudre des affaires criminelles.
Steven Long Mitchell et Craig Van Sickle entrent à la télévision en écrivant quelques scénarios pour la série ARABESQUE et ALIEN NATION. De la tâche de scénaristes, ils passent à celle de producteurs pour les séries FLASH et COBRA. Ils sont d'ailleurs les créateurs du concept de ce dernier mettant en scène un Michael Dudikoff redresseur de tort qui ne fera pas long feu sur les petits écrans. Inspirés par un fait divers réel, les deux producteurs / scénaristes inventent le concept du CAMELEON au milieu des années 90 et lui assurent un joli succès. De prime abord, cette série n'a pourtant rien d'innovateur puisque vue de l'extérieur, elle ressemble pour beaucoup à une énième variation du FUGITIF.
Pour créer LE CAMELEON, Steven Long Mitchell et Craig Van Sickle se sont donc inspirés de l'histoire de Ferdinand Waldo Demara. Un homme qui aura passé sa carrière à changer de vie ! À peine découvert qu'il disparaît avant d'être retrouvé dans un environnement totalement différent plusieurs années plus tard. Mais à chaque fois, il n'est pas trahi en raison d'une négligence de sa part dans ses nouvelles occupations mais simplement parce qu'il est reconnu. En plusieurs dizaines d'années, il assume l'identité de chirurgien dans la marine canadienne, gardien de prison, professeur d'université, zoologue… ou moine trappiste ! Qualifié d'escroc, pour certains des moyens employés pour aboutir à un nouveau poste, ses motivations n'étaient pas pécuniaires puisqu'il ne retirait pas de profit de ses impostures.
La construction des premiers épisodes de la première saison suivent une recette incontournable qui a au moins le mérite de ne pas perdre le spectateur. En gros, l'ouverture de la séquence pré-générique nous permet d'assister à l'arrivée des poursuivants de Jarod qui arrivent un peu tard puisque l'oiseau s'est déjà envolé vers une nouvelle identité. La suite étant une histoire assez classique où Jarod intègre une nouvelle profession pour y démasquer des criminels ou des meurtriers. La dernière partie de chacun de ces épisodes nous propose immanquablement un montage musical où le personnage principal prépare un plan machiavélique qui permet de piéger le coupable de la même façon que les infortunées victimes : un virologue est infecté par un virus, etc… En gros, le héros applique la loi du Talion, tout du moins d'un point de vue strictement émotionnel, pour faire craquer les criminels.
Une recette immuable qui perdure au delà de cette première saison et qui est la marque de fabrique de la série. Toutefois, comme la plupart des séries télévisées récentes, LE CAMELEON ne se contente pas de ce seul canevas. L'essence même de la série se trouve dans les mystères générés par les origines des personnages. D'où vient Jarod ? Quelles sont les activités réelles du centre ? Quelles sont les motivations réelles des différents personnages ? Car contrairement aux apparences, un grand nombre des protagonistes récurrents de la série ne sont pas exactement tels qu'ils nous sont présentés dès les premiers épisodes. Au fil de la série, il apparaît évident que Jarod incarne le personnage innocent et bénéfique alors que Raines est une figure sombre et maléfique. Entre les deux, il est difficile dès le départ de cerner Sidney, Parker et Broots qui seront bien vite rejoints par un bien étrange Angelo. LE CAMELEON s'ingénie à brouiller les pistes pour préparer son auditoire à toutes sortes de révélations. Complots, traîtrise et revirements de situations étonnants se succéderont dans les quatre et uniques saisons de la série suivis de deux téléfilms. Mais dans les onze premiers épisodes, tout cela n'apparaît pas totalement, finalement la série plante son décor sans trop se presser en distillant sournoisement de maigres informations à glaner au compte-gouttes. Une façon de dresser en toile de fond et discrètement ce qui se révèlera être le cœur de la série.
Sur le papier, ces onze premiers épisodes pourraient se résumer à Jarod devient médecin, policier, garde-côte, pilote de chasse… Un concept qui tournerait vite à la rengaine sur ces onze premières aventures, s'il n'y avait pas la mise en place des intrigues déjà évoquées et une mise en boîte attractive. La mise en scène, sans génie, est plutôt efficace, alors que les acteurs choisis sont parfait dans leurs rôles respectifs. En tête, Michael T. Weiss réussit assez bien à interpréter son rôle de génie ingénu en lui conférant un aspect charmeur. Car si le personnage de Jarod est capable de se glisser dans la peau de n'importe qui, il est resté isolé du reste du monde pendant des dizaines d'années. Il est ainsi une sorte de paradoxe puisqu'il est capable d'incarner un membre d'une brigade de déminage tout en s'émerveillant devant les possibilités d'un jouet (en l'occurrence Monsieur Patate). Christophe Lemonnier.
ZORA LA ROUSSE
Si on a l’impression d’avoir suivi les aventures de « Zora la rousse » pendant des années, il n’en est rien, la série yougoslave ne comprend que 13 épisodes de 26 minutes.
La série est adaptée d’un roman de Kurt Held qui a rencontré la vraie Zora et le vrai Branko durant un séjour en Croatie en 1940. Impressionné par l’organisation et les règles de solidarité en vigueur au sein de la bande, il décide de coucher sur papier les expériences des jeunes orphelins.
La série est diffusée pour la première fois le vendredi 9 janvier 1981 vers 18h succèdant à « San Ku Kaï » dans l’émission « Récré A2 ». On la retrouvera durant les étés 1983 et 1985.
Interprétée par Lidija Kovačević, âgée à l’époque de 14 ans, Zora sera son seul et unique rôle, l’actrice serbe préférant devenir institutrice puis professeur de lettres.
La superbe chanson du générique, que tous les gamins ont chanté dans les cours de récréation, a été composée par l’allemand Christian Bruhn sur des paroles de Pierre Carrel à qui l’on doit également le générique de « Jem et les Hologrammes » et plusieurs chansons du répertoire d’Annie Cordy notamment « Cho Ka Ka O ». Elle est interprétée par Kity Palm à la discographie réduite.
En 2008, Peter Kahane réalise une nouvelle adaptation du roman sous forme de long métrage cette fois.
Résumé : À Seni, petite ville côtière de Croatie, Branko, un jeune orphelin, entre dans une bande de vagabonds qui s'est donné pour nom « Les Uscoques », d'après un ordre de chevaliers autrefois maîtres de cette région. Ils ont d'ailleurs élu domicile dans le château abandonné de Nehaj, qui avait été celui des chevaliers.
Commentaires : Tout au long du feuilleton, on suit les aventures de la bande. Au quotidien, leur problème majeur est de se nourrir. Ils en sont souvent réduits à voler pour manger et ont mauvaise réputation à cause de cela (telle la mésaventure de Branko au marché). Mais on assiste aussi à leur descente aux enfers. Au vol s’ajoutent quelques menus faits qui vont précipiter leur perte. Optant pour la fuite, ils décident ensuite de revenir à Senj reconquérir leur château. L'amitié que leur porte le vieux pêcheur Gorian mettra en lumière leurs qualités de cœur et leur courage quand ils lui viendront en aide pour contrer les manigances d'une puissante société de pêche.
Zora et ses compagnons comptent aussi parmi leurs amis Ćurčin le boulanger, qui leur donne chaque jour tout son pain de la veille, et le vieux portier de l'Hôtel Zagreb.
À cause de leurs différents larcins, de nombreux villageois, dont le riche Karaman, tenteront de les faire arrêter, notamment par les deux gendarmes Đorđević et Begović.
Personnages :
- Zora : Zora est la cheffe d'une bande de vagabonds, les Uscoques. C'est évidemment la couleur de ses cheveux qui lui a donné son surnom : Zora la Rousse. Elle vient d'Albanie. Sa mère et elle sont arrivées en Croatie 4 ans plus tôt pour fuir la vendetta qui a touché sa famille. Durant une chasse, son père a tué par accident un membre d'une autre famille qui a décidé de se venger en assassinant tous les hommes de la sienne. Son oncle, son père et ses grands frères ont été tués. La mère de Zora est morte après qu'elle ait travaillé dans une fabrique de tabac. Son petit frère est décédé de maladie quelques semaines après sa mère. Zora n'a pas voulu rester à l'orphelinat, elle aime trop la liberté pour ça. Si elle est la chef des Uscoques, c'est parce qu'elle est la plus forte1.
- Branko : Orphelin de mère, son père a disparu après avoir tenté de percer dans la musique (il est violoncelliste). Chassé par sa grand-mère accusée de sorcellerie, Branko est injustement jeté en prison. Zora le fait s'évader. il réussit l'épreuve d'initiation pour faire partie de la bande et partage leurs dures conditions de vie. Il est très ami avec Zora, leur mère sont toutes les deux mortes de maladie après avoir travaillé dans la même fabrique de tabac.
- Gorian : Gorian est l'un des seuls personnages du village qui éprouve de l'amitié pour Zora et sa bande. En leur permettant de l'aider dans son travail, il met en avant leurs qualités de cœur et de courage.
- Nicola, Paul et Duro : ils font tous les trois parties de la bande des Uscoques pour des raisons différentes (orphelins, parents violents).
- Karaman : Riche, il complote sans cesse la perte de Zora et de ses camarades et les fait pourchasser sans trêve par les deux gendarmes Dordevic et Begovic.
BLACKLIST
The Blacklist
série de Jon Bokenkamp, 2013, US, 9 saisons, Couleurs
avec James Spader, Megan Boone, Hisham Tawfiq…
RÉSUMÉ : Raymond « Red » Reddington, l’un des fugitifs les plus recherchés par le FBI, se rend en personne au quartier général du FBI à Washington. Il affirme avoir les mêmes intérêts que le FBI : faire tomber des criminels dangereux et des terroristes. Au cours des deux dernières décennies, il a dressé une liste des criminels et terroristes qu'il croit introuvables par le FBI car ce dernier ne connaît même pas leurs existences. Reddington l’appelle « La Liste noire » (« The Blacklist »). Reddington coopérera, mais insiste pour ne parler qu’à Elizabeth Keen, une profileuse inexpérimentée du FBI, qui s'interroge sur l'intérêt soudain que Reddington lui porte, alors qu'il soutient qu'elle se trouve être très spéciale...
SECRETS DE TOURNAGE : Au centre de la série, le personnage de Raymond "Red" Reddington a failli être incarné par Kiefer Sutherland. C'est effectivement au héros de 24 que le rôle a été d'abord proposé. Il venait tout juste d’être libéré de son engagement avec la série Touch. Il a décliné l'offre.
Si The Blacklist est sa première incursion dans l'univers de la télévision, Jon Bokenkamp, créateur de la série, gravite autour des studios hollywoodiens depuis déjà plusieurs années. Il a notamment participé à l'écriture de The Call, avec Halle Berry (2013), et de Taking Lives : Destins violés, avec Angelina Jolie (2004).
S'il a déjà une longue carrière au cinéma derrière lui (Sexe, Mensonge et vidéo, Crash, La Secrétaire et Avengers 2), James Spader, l'interprète de Red, est aussi un habitué du petit écran. Il a déjà participé à cinq séries, trois en tant qu'acteur récurrent (The Office, Boston Justice, The Practice), deux en tant que guest (Seinfeld, Frasier).
La réalisation du pilote de The Blacklist a été confiée à Joe Carnahan. S'il s'agit de sa première participation à une série télé, on notera néanmoins que c'est lui qui a réalisé, en 2010, l'adaptation cinématographique de L’Agence tous risques.
Producteur délégué de la saison 1 de The Blacklist, John Davis est un vieux routiers des studios: Predator, Predator 2, La Firme, Waterworld ou encore Docteur Dolittle et Docteur Dolittle 2 figurent notamment sur son C.V..
Avant d’incarner le personnage de l'agent du FBI Elizabeth Keen, Megan Boone avait déjà tenu un rôle régulier dans une autre série de NBC. En 2010/2011, elle est au générique de Los Angeles : police judiciaire, dans le rôle de l'assistante du procureur Lauren Stanton. L'aventure ne dure cependant que sept épisodes...
Lorsque le pilote de la série est testé par NBC auprès d'un panel de téléspectateurs, au printemps 2013, il obtient les meilleurs retours qualitatifs enregistrés par le network au cours de ces dix dernières années, selon les responsables de la chaîne à la presse.
Dans The Blacklist, le personnage de Raymond Reddington est librement inspiré d'un criminel américain qui existe bel et bien : fugitif pendant de très nombreuses années, James "Whitey" Bulger a longtemps été une figure du crime organisé à Boston, avant d'être capturé en 2011 par le FBI en Californie. En juin 2013, devant le tribunal de Boston, il a dû répondre de multiples crimes, soupçonné entre autres d'être impliqué dans plus d'une dizaine de meurtres.
Si l'action de la série se déroule du côté de Washington, et si plusieurs scènes ont effectivement été tournées dans la capitale américaine (dans des lieux emblématiques, comme le Lincoln Memorial), la majeure partie du tournage a lieu dans l'état de New York. Plus précisément du côté de Pleasantville et Long Island.
Habitué à avoir les cheveux mi-longs depuis son passage dans la série The Office, James Spader est celui qui a eu l'idée de se raser la tête pour le rôle de Red. À la base, ce n'était effectivement pas prévu dans le script de Jon Bokenkamp. Pour Spader, c'était une façon de renforcer la tension dramatique de son arrivée dans les locaux du FBI, au début du pilote.
INFORMATION : La chaîne NBC a annoncé ce mercredi 1er février 2023 que la série Blacklist (disponible sur Netflix et également diffusée sur TF1) prendra fin à l'issue de sa dixième saison, dont la diffusion commencera le 26 février prochain outre-Atlantique. « Après 10 ans, des centaines de cas « Blacklist » et plus de 200 épisodes produits, nous sommes honorés d'arriver à notre conclusion », a déclaré le showrunner et producteur exécutif John Eisendrath. « Ce fut incroyablement amusant de créer ces Blacklisters étranges, sournois et délicieux pour défier Raymond Reddington et notre task force du FBI chaque semaine. Et nous sommes ravis de partager cette dernière saison avec les fans ».
Après le départ des acteurs Amir Arison et Laura Sohn, qui interprétaient respectivement les agents Aram Mojtabai et Alina Park, un nouveau personnage fera son entrée dans la saison 10 de Blacklist. Selon les informations exclusives de TV Line, il s'agirait de Siya Malik, une agent du MI-6 qui s'avère être la fille de Meera Malik. Un personnage qui fut tué dans le final de la saison 1. Siya Malik (incarnée par Anya Banerjee) fera son entrée dans l'équipe de Raymond Reddington pour en savoir plus sur le travail et sur la mort tragique de sa mère.
Les Français devront s'armer de patience avant de découvrir la saison finale de Blacklist. Si TF1 a diffusé les sept premières saisons de la série, c'est désormais la chaîne Série Club (qui appartient aux groupes TF1 et M6) qui diffuse les épisodes de Blacklist depuis sa saison 8. En attendant la diffusion française, les téléspectateurs peuvent dès à présent binge-watcher les huit saisons de Blacklist sur Netflix. Pour rappel, la série met en scène James Spader dans le rôle de Raymond "Red" Reddington, un ancien agent du gouvernement qui se rend mystérieusement aux autorités et leur offre de dénoncer tous les criminels pour lesquels il a travaillé. En contrepartie, il insiste pour travailler exclusivement avec Elizabeth Keen, une jeune profileuse récemment recrutée par le FBI. Après que le FBI a fait tomber un terroriste sur lequel il a fourni des informations, Reddington révèle que ce terroriste n’est que le premier de beaucoup d’autres à venir : durant les deux dernières décennies, il a dressé une liste des criminels et terroristes qu'il sait introuvables par le FBI parce que ce dernier ignorait purement et simplement leur existence. Doriane Kiniali.
MAJIN
Daimajin
de Kimiyoshi Yasuda, 1966, Japon, 1h24, Couleurs
avec Miwa Takada, Yoshihiko Aoyama, Ryuzo Shimada…
RÉSUMÉ : À Okamidani, les bruits qui proviennent de la montagne sacrée font craindre que ne se réveille Majin, un esprit guerrier enfermé dans une statue de pierre. Alors que se déroule une cérémonie destinée à l'apaiser, Hanabusa, le seigneur des lieux, est attaqué et tué dans sa demeure. Grâce à la réussite de ce complot, Samanosuke Odate devient le nouveau maître de la région, sur laquelle il va désormais faire régner la terreur. Le seul endroit où les enfants du seigneur assassiné peuvent désormais être en sécurité est la montagne interdite, résidence de Majin.
LE RETOUR DE MAJIN
Dai Majin Ikaru
de Kenji Misumi et Kazuo Mori, 1966, Japon, 1h27, Couleurs
avec Kojiro Hongo, Shiho Fujimura, Taro Marul…
RÉSUMÉ : Le lac Yokumo, qui abrite le domaine de Majin, est au coeur de deux régions florissantes, placées sous l'autorité du seigneur Chigusa. Les pauvres qui vivent dans les montagnes environnantes tentent de fuir la misère et leur cruel souverain, Mikoshiba, pour se rendre sur les rives du lac. Ne pouvant les retenir et jalousant la prospérité de son voisin, Mikoshiba le fait tuer et s'approprie ses terres. Il va jusqu'à détruire la statue de Majin, dans son sanctuaire lacustre.
LE COMBAT FINAL DE MAJIN
Daimajin gyakushu
de Kazuo Mori et Kenji Misumi, 1966, Japon, 1h19, Couleurs
avec Toro Abe, Junichiro Yamashita, Riki Hashimoto…
RÉSUMÉ : Une petite communauté de montagnards se prépare à affronter l'hiver, quand Sampei, l'un des hommes partis couper du bois, revient dans un état critique. Il révèle que ses compagnons et lui-même ont été enlevés par les hommes du seigneur Arakawa, qui les oblige maintenant à travailler sans relâche dans la "Vallée de la mort". Le seul chemin possible par lequel les prisonniers pourraient se sauver passe par la montagne interdite, le territoire de Majin. Les chutes de neige prévues empêchent d'envoyer qui que ce soit prévenir les prisonniers de cette possible voie de salut. Quatre gamins, décidés à sauver leurs pères et leurs frères, partent en secret pour cette périlleuse aventure.
POINTS DE VUE : Rival élégant et médiéval de Godzilla, Majin était un beau monstre qui a marqué de son empreinte le cinéma fantastique japonais des années 60, le temps de trois films magnifiques tournés la même année, 1966.
Mise en chantier par le studio Daei pour concurrencer la série des « Godzilla » produite par la firme rivale Toho, la trilogie des « Majin » organise la rencontre du film à costumes (« jidaï geki ») et du film de grands monstres (« kaiju eiga ».) Croisement entre un golem géant et une statue de samouraï, Majin est une divinité de pierre protectrice de la montagne et des paysans, régulièrement dérangée dans son sommeil par la folie sacrilège des seigneurs de guerre et les prières des villageois persécutés. Dans le premier épisode sobrement intitulé Majin (Daimajin) et réalisé par Kimiyoshi Yasuda, Majin trône au sommet d’une montagne. Dans le deuxième, Le Retour de Majin (Daimajin ikaru), il siège dans une grotte aquatique tandis que le troisième, Le Combat final de Majin (Daimajin gyakushû) de Kazuo Mori se déroule entièrement sous la neige. À chaque fois, les images en scope couleur subliment la beauté des paysages naturels, la mise en scène est élégante et les effets spéciaux brillent par leur poésie. Dans Le Retour de Majin (peut-être le meilleur des trois) du grand Kenji Misumi, les eaux d’un lac s’ouvrent sur le passage du dieu en colère dans une scène qui évoque le fameux partage de la Mer Rouge des Dix Commandements de Cecil B. DeMille. Les trois films répondent au même principe : les deux premiers tiers sont consacrés aux intrigues et complots de palais, le dernier au réveil de Majin qui détruit tout sur son passage et écrabouille les vilains. Le message écologique à l’instar de Godzilla est également au cœur de ces fleurons du fantastique nippon. Il ne s’agit pas ici d’une mise en garde contre le péril atomique mais d’une glorification élégiaque de la nature sauvage. Olivier Père.
Maison de production concurrente de la Toho, la Daiei se lance dans le domaine des monstres géants histoire de profiter du succès rencontré par la série des Godzilla. Le premier essai de la Daiei, GAMERA, se montre concluant mais ils ne s'arrêteront pas là et vont produire un curieux mélange entre le film de samouraï et celui de monstre géant. Ce sera MAJIN, sorte d'adaptation japonaise de l'histoire du Golem. Des villageois mécontents du traitement que leur fait subir le pouvoir féodal supplie la divinité Daimajin de leur venir en aide. Il n'en faut pas plus pour qu'une statue géante ne vienne écraser du pied les habitations ainsi que le château du coin. Le métrage rencontrera un certain succès au Japon et suscitera la mise en chantier de deux suites : LE RETOUR DE MAJIN, signé Kenji Misumi, et LE DERNIER COMBAT DE MAJIN. Au cas où certains n'auraient aucune idée de ce qu'est MAJIN, sachez qu'il s'agit d'une gigantesque statue de pierre. Dans le Japon médiéval, des villageois vouent un culte à la statue. Celle-ci prendra vie pour écraser le joug d'un oppresseur ayant pris le contrôle de la région. Les deux autres films brodent sur le même canevas. Christophe Lemonnier.
À priori, en abordant la trilogie Majin, fresque de destruction massive en temps féodal avec géant divin, à mi-chemin entre Godzilla et le Golem, on appréhende l’ennui des mauvais films de monstres nippons des années 60, les Kaiju Eiga qui, huit fois sur dix, sondaient les eaux hasardeuses du nanar déguisé où le bâillement était de mise.
Surprise, ces inédits cinéma dans l’Hexagone, même pas édités en VHS sur notre territoire, et pourtant signés par des noms d’auteurs prolifiques à l’efficacité avérée (Yasuda, Misumi, Mori, qui ont notamment œuvré sur La légende de Zatoïchi ou Baby Cart pour Kenji Misumi) méritent largement l’investissement.
Réalisée et sortie en 1966, grâce au savoir-faire d’équipes d’artisans et de techniciens capables de soulever des montagnes en une poignée de mois, la trilogie initiée par le studio Daiei concurrent de la Toho, s’offrait une franchise franchement victorieuse, au niveau du succès qui demeurera d’un numéro à l’autre, mais surtout dans la qualité qui ne faillit pas, malgré un certain sentiment de répétition si l’on regarde les trois œuvres à la suite.
Les récits quasi identiques, avec l’éveil du Majin, divinité enfermée dans une carapace de pierre, au sommet d’une montage, ou sur une île…, provoqué par les remous politiques qui bouleversent la région (guerre locale, prise de pouvoir shakespearienne au niveau du village…), ne présentent guère d’intérêt dans leur déploiement. Ce qui compte en revanche, c’est le réel point de vue artistique des artisans à la commande et comment ils déploient leur talent pour parer les histoires d’images marquantes où l’on se surprend de la composition des images, de l’ampleur des décors et des effets spéciaux qui nous scient par leur générosité.
Aucun des trois films ne vacille ; chacun s’érige en parangon d’un savoir-faire industriel, celui d’une cinématographie opulente qui produisait à la chaîne sans forcément se fourvoyer dans la ringardise, avec à chaque fois des idées de réalisation exceptionnelles, et un montage fastueux.
La trilogie Majin est une leçon de cinéma pour les contemporains que nous sommes, tous dépendants du tout numérique pour les décors et effets spéciaux. Les trois films opèrent une totale remise en place des CGI, déplaçant le blockbuster américain contemporain dans la catégorie du film de fonctionnaire où l’on n’est jamais plus époustouflé par les moyens déployés. Les inserts du Daimajin, avec de somptueuses contre-plongées et un montage rythmé, donnent de la prestance à chacun des spectacles.
Les trois volets, même s’ils tardent à animer leur Majin face à l’oppression des villageois sous le joug d’un tyran usurpateur (comptons une bonne heure à chaque fois), effacent surtout le souvenir des déguisements grotesques de certains Godzilla et de ses ersatz, offrant grandeur et magnificence, dans son mélange de film de sabre moyenâgeux et de Kaiju Eiga.
On se demande comment l’on a pu nous cacher de telles petites réussites aussi longtemps, les trois films étant les émissaires d’une culture dans tout ce qu’elle a de singulier et d’enrichissant à offrir, tout en restant dans les balises du cinéma de genre que l’on aime. A vrai dire, on connaissait les visuels promotionnels japonais assez hideux, et même la jaquette de l’éditeur du « Chat qui Fume » qui mettait en avant le côté un peu rigide du dieu colère. Ils ne nous avaient pas séduits plus que cela. Mais une fois devant le géant de pierre, force retorse et vengeresse, qui aime écraser de ses pieds, broyer de ses mains, trancher de son sabre les impies, défoncer les murs et faire trembler les montagnes, les préjugés se dissipent et le plaisir reste jusqu’au bout des trois épisodes, même si le dernier, avec l’intrusion de quelques jeunes protagonistes cherchant à délivrer leurs pères, est moins charismatique pour les adultes. Frédéric Mignard.
À Okamidani, les bruits qui proviennent de la montagne sacrée font craindre que ne se réveille Majin, un esprit guerrier enfermé dans une statue de pierre. Alors que se déroule une cérémonie destinée à l'apaiser, Hanabusa, le seigneur des lieux, est attaqué et tué dans sa demeure. Grâce à la réussite de ce complot, Samanosuke Odate devient le nouveau maître de la région, sur laquelle il va désormais faire régner la terreur. Le seul endroit où les enfants du seigneur assassiné peuvent désormais être en sécurité est la montagne interdite, résidence de Majin.
Alors que la Toho cartonne avec ses "Godzilla", la Daiei, son concurrent, cherche la parade. Dès 1965, c’est avec "Gamera, le monstre géant" qu’elle répond, initiant une série qui compte aujourd’hui 12 films. L’année suivante, nouvelle incursion dans le genre avec un nouveau venu : Majin, ou Daimajin, le géant de pierre, qui sera au centre de trois films, tous trois réalisés en 1966 : "Majin", "Le Retour de Majin" (Daimajin ikaru) et "Le Combat final de Majin" (Daimajin gyakushû). Si vous connaissez ces films sous une autre dénomination, c’est presque normal : vous trouverez difficilement la même version sur deux sites différents, Le Retour de Majin étant parfois utilisé pour le troisième film, tandis que le deuxième peut-être connu sous le nom de La Colère de Majin. Et pour couronner le tout, certains poussent le vice jusqu’à reprendre l’appellation Daimajin, ce qui donne un bordel sans nom quand on veut s’y retrouver...
Trois films tournés la même année donc, par trois réalisateurs différents : Kimiyoshi Yasuda, Kenji Misumi et Kazuo Mori, notamment connus pour avoir mis en scène plusieurs épisodes de la longue saga Zatoichi, ainsi que les premiers Baby Cart pour Misumi. Ces réalisateurs expérimentés de jidai-geki (les films d’époque, historiques), regroupés autour de Yoshiyuki Koruda qui réalisera les séquences à effets spéciaux des trois volets, vont permettre d’insister sur la principale particularité de Majin : contrairement à Godzilla ou Gamera, il ne s’agit pas d’une créature gigantesque destinée à détruire des villes modernes, mais d’une statue de pierre, lointaine cousine des Golem européens, qui sévira dans le Japon médiéval.
Majin va ainsi pendant la plus grande partie du film délaisser l’aspect kaiju eiga pour se concentrer sur cette histoire de complot et de trahison, les hommes de Samanosuke prenant le pouvoir et réduisant en esclavage, torturant et pillant les villageois. Assez classique, cette partie est néanmoins très réussie grâce à des personnages aisément identifiables (le grand méchant et son bras droit, la prêtresse, les sauveurs) et une narration plutôt rapide, nous amenant directement sur les principales péripéties. Tout cela sans oublier de régulièrement nous rappeler la présence du Majin, notamment par le biais de quelques scènes aux limites du fantastique.
Si la menace du géant de pierre est présente dès les premières minutes, où l’on se livre à un rituel destiné à calmer sa colère, où l’on entend des bruits de pas monstrueux, il n’interviendra finalement que dans les vingt dernières minutes, durant lesquelles il nous fera admirer l’ampleur de sa fureur. D’une taille bien plus raisonnable que ses cousins atomiques, il va écraser, broyer, empaler ses victimes, dans une démonstration de violence renforcée par des effets spéciaux de qualité, rappelant ceux de Ray Harryhausen.
Ce premier Majin est donc un très bon film, mêlant aventures dans le Japon médiéval et film de monstre. Malgré un rythme relativement lent, on ne s'ennuie pas une seconde, grâce à une histoire prenante et bien mise en images, le tout sur une musique du formidable Akira Ifukube (on pense d’ailleurs fortement à Godzilla pour le thème de Majin). Un kaiju eiga qui ne ressemble à aucun autre, avec son guerrier protecteur des opprimés et son ambiance rappelant le jidai-geki, et qui mérite d’être découvert. Steeve Raoult.
Né en 1954 avec le premier film de la saga Godzilla, le kaijū eiga (ou « film de monstres géants japonais ») est un sous-genre du film catastrophe dont la popularité ne s’est jamais réellement démentie depuis les années 50. Même si de nouveaux kaijūs sont encore régulièrement produits de nos jours, c’est surtout dans le contexte d’un Japon post-Hiroshima que le genre a trouvé son âge d’or, notamment grâce au dévouement pour le genre d’Ishirō Honda. Cela dit, et même si de nombreux monstres géants sont parfois parvenus à se démarquer de l’ombre de Godzilla – on pense à Gamera, Mothra, Rodan, King Ghidorah, Ebirah ou encore King Kong – on pourra tout de même admettre que le genre s’est assez rapidement mis à tourner en rond, comme si tous ces monstres radioactifs couraient inlassablement derrière leur propre queue de quinze gigatonnes. En gros, durant toute la décennie des années 60, deux à trois kaijūs sortaient tous les ans sur les écrans japonais, le plus souvent réalisés par Ishirō Honda. Les maquettes, les villes en carton et types costumés en grands monstres latexoïdes variaient bien entendu d’un film à l’autre, avec parfois une surenchère dans le nombre de créatures se foutant sur la gueule à l’écran, mais en gros, le genre était assez répétitif, au point que l’on puisse parfois avoir l’impression de voir toujours à peu près le même film. Des dizaines de longs-métrages ont vu le jour au fil des années, chacun d’entre eux s’imposant néanmoins comme une variation sur le même thème que les précédents. Essayez donc de retrouver dans quel film vous avez vu tel ou tel monstre, ou tel ou tel personnage – une vraie galère en vérité tant ils se ressemblent tous. Et ce même si tous développent un charme qui les rend, à leur manière, uniques et/ou attachants : une vraie galère de s’y retrouver quand même. Dans le cas de Majin, le titan de pierre dont les trois films sortiraient coup sur coup tout au long de l’année 1966 (il faut battre le fer tant qu’il est chaud !), il faut admettre que les choses sont fort différentes. Bien sûr, un monstre géant est bel et bien au centre de la saga, mais pour le reste, rien à voir. Déjà, contrairement à ce qu’on pourrait penser, les films de la trilogie Majin ne sont non pas produits par la mythique Toho mais par une firme concurrente, Daiei Film, qui n’en était pas à ses débuts puisque c’est à elle que l’on doit des films tels que Rashomon, Gamera ou encore la saga Zatoïchi. La grande – et assez géniale – idée de la Daiei réside dans le fait de mélanger les deux univers qui ont fait leur gloire : le film de sabre ou chanbara d’un côté (le Japon féodal et ses samouraïs) et le film de monstre géant de l’autre. Le premier Majin est d’ailleurs bien d’avantage axé sur le film de samouraï que sur le kaijū – la statue du géant n’est en réalité qu’un élément de background, une créature mythologique apparaissant en arrière-plan de l’intrigue durant les deux premiers tiers, et ne se « réveillera » qu’à l’occasion de la toute dernière partie du récit.
Majin : Les qualités formelles et narratives de Majin sont plus qu’évidentes, et s’imposeront en l’espace de quelques minutes de film seulement. Le film de Kimiyoshi Yasuda nous propose donc d’entrée de jeu les prémisses d’un scénario extrêmement bien construit, où rien n’est ce qu’il parait être et orchestrant déjà des rapports de force complexes entre les différents personnages. Ainsi, lorsque le seigneur Hanabusa est assassiné par son chambellan Samanosuke Odate, ses deux enfants Tadafumi et Kozasa sont sauvés in extremis par Kogenta, qui reste fidèle à leur famille. Leur tante, une singulière prêtresse aux dents noires – signe d’une certaine classe sociale à l’époque au Japon – les cachera au cœur d’une montagne sculptée à l’effigie de Majin, une divinité guerrière. Les bases du récit sont ainsi posées, mettant un accent prononcé sur les personnages bien plus que sur la statue en elle-même, qui pourtant est bien là, observant en silence tout ce qui se trame à ses pieds. Et si Majin ne se « réveillera » que lorsque Samanosuke et ses hommes tenteront de le détruire, il semble évident que la colère de la statue géante a été nourrie tout à la fois par les frustrations et le ressentiment de Tadafumi et Kozasa – qui durant dix ans vivront cachés et dans le dénuement le plus total – et par l’attitude inhumaine de Samanosuke vis-à-vis de ses ouvriers, traités comme des esclaves et même comme des bêtes. Ainsi pourra-t-on voir le châtiment que leur réserve Majin comme une allégorie de la vengeance du prolétariat sur la classe dominante, et notamment sur les grands patrons. Ce premier film de la saga Majin s’avère donc une œuvre originale, subtile, chorégraphiée au millimètre et visuellement superbe. Derrière la caméra, Kimiyoshi Yasuda prend le temps d’installer ses personnages, ainsi que de les développer au fur et à mesure que son intrigue – quasi-Shakespearienne – avance, sans jamais provoquer le moindre ennui. Sa mise en scène est d’une intelligence rare, enchainant sur fond d’ambiance fantastique les passages de calme et ceux de violence. L’alternance entre les deux est excellente, et contribue à maintenir l’intérêt du spectateur en éveil, même 55 ans après sa sortie.
Le retour de Majin : Auteur des scénarios des trois films de la trilogie Majin, Tetsurō Yoshida reprend approximativement le même concept que précédemment sur Le retour de Majin, qui sera cette fois réalisé par le légendaire Kenji Misumi, réalisateur des cinq premiers films de la saga Baby Cart. La structure narrative de ce deuxième film est grosso modo la même que sur le précédent : l’histoire s’intéresse en effet avant tout aux personnages, en transposant l’intrigue sur une petite île, et en évacuant la portée politique prolétarienne du film original au bénéfice d’une idée finalement assez morale de punition divine, Majin intervenant à la fin du film pour détruire un seigneur de guerre assoiffé de sang et de territoires, et libérer des villageois du joug de leurs oppresseurs. Déjà très à l’aise avec les scènes de violence, Misumi se régale de la description d’un seigneur de guerre absolument diabolique et sans pitié. S’il est mis en boite par la même équipe technique, Le retour de Majin se révélera néanmoins assez différent de son modèle du strict point de vue visuel. Tentant, consciemment ou pas, de se démarquer de son travail sur le premier épisode, le chef opérateur Fujio Morita nous livre des plans de toute beauté, sur lesquels plane constamment une présence fantomatique. L’ambiance du film est en effet extrêmement soignée, avec des compositions de plans sublimes ainsi qu’une utilisation remarquable, selon les séquences, soit de contrastes nets opposant des couleurs vives, soit du clair-obscur. Bref, s’il ne fait finalement que recycler la formule – réussie – du premier opus, Le retour de Majin le fait avec un soin formel indéniable, qui en fait au final une « réimagination » très réussie et enthousiasmante du premier film / l’originalité en moins, évidemment.
Le dernier combat de Majin : Délaissant l’île qui servait de décor au deuxième film, Le dernier combat de Majin, cette fois réalisé par Kazuo Mori, retourne à la montagne, mais cette fois, sous la neige. La nuance est importante et contribue mine de rien à faire des trois films de la saga Majin des œuvres formellement très différentes et reconnaissables du premier coup d’œil. L’autre particularité du Dernier combat de Majin est également de ne plus proposer d’intrigue dominée par des adultes, avec ce que cela implique de manipulations et de luttes de pouvoir, mais par un petit groupe d’enfants, qui devront suivre un périple initiatique afin de gravir une montagne et prier Majin de libérer leur village du joug d’un oppresseur cruel et tyannique, le Seigneur Arakawa. Bien que la trame générale reste la même (Majin volera en effet bel et bien au secours des opprimés dans le dernier quart d’heure), le film s’éloigne des deux premiers en embrassant le point de vue des quatre enfants qui servent ici de héros au film. Bien construit, proposant une histoire pleine d’imagination et de rebondissements, Le dernier combat de Majin se déroule sur un rythme excellent, et le scénario de Tetsurō Yoshida fait le choix habile de considérer les enfants comme des personnages à part entière, qu’il dépeint comme autant de personnages naïfs, mais sympathiques et sincères. Flirtant avec le récit de coming of age (ou de passage à l’âge adulte), le film nous propose une efficace combinaison de séquences centrées sur leurs efforts physiques et de séquences d’avantage centrées sur leurs émotions. Le résultat est très étonnant, même si les dernières minutes consacrées à la spectaculaire intervention de Majin rompt quelque peu avec la poésie naïve développée durant les deux premiers tiers du film. Néanmoins, Le dernier combat de Majin n’en demeure pas moins une œuvre solide et attachante. Le déroulement narratif du film étant largement tourné vers l’enfance, on peut supposer qu’il pourrait plaire à un public un peu plus large que les deux précédents, qui nécessitent probablement d’avantage d’investissement de la part du spectateur. C’est également un film qui devrait permettre aux plus jeunes spectateurs de découvrir Majin sans risquer de s’ennuyer, dans le sens où le film leur propose un récit à leur taille.
Yoshiyuki Kuroda : Impossible cependant d’aborder la grande réussite artistique que constitue la trilogie Majin sans évoquer le rôle capital de Yoshiyuki Kuroda, qui contribuera à la cohérence et à la continuité de l’ensemble en mettant en scène toutes les scènes à effets spéciaux des trois films. Auteur à lui-seul de toutes les longues et impressionnantes séquences de destruction qui ferment les trois films, Kuroda s’avère généreux en termes de rendu visuel, nous donnant à voir des maquettes et des décors faisant à coup sûr partie des plus beaux que l’on ait eu le loisir de voir au cœur d’un kaijū eiga. Son travail est une véritable merveille de poésie et d’efficacité, ce qui est d’autant plus remarquable qu’il était plus qu’habile en termes de composition de plans, tout en restant toujours au service des histoires et de l’ampleur grandiose de ses décors et de ses effets spéciaux. À voir et à revoir donc ! Mickaël Lanoye.
SUCCESSION
de Jesse Armstrong, 2018-2023, US
avec Brian Cox, Jeremy Strong, Kieran Culkin…
RÉSUMÉ : La riche et puissante famille Roy, composée du patriarche Logan et de ses quatres enfants, contrôle l'un des plus gros conglomérats de médias du monde. Alors que leur père vieillissant se retire peu à peu de la compagnie, Connor, Kendall Roman et Siobhan contemplent le futur de l'entreprise sans lui.
COMMENTAIRES : En 2010, le scénariste britannique Jesse Armstrong, spécialiste de la satire politique (The Thick of it, In the loop, Veep), s’attelle à l’écriture d’un drame inspiré par la vie du célèbre magnat des médias australo-américain, Rupert Murdoch. Avec une idée en tête, « explorer les similitudes entre des patrons de grands groupes de communication (Maxwell, Hearst, Black...) si puissants qu’ils peuvent dicter l’agenda politique ». Oublié au fond d’un tiroir, le projet renaît au lendemain de l’élection de Trump, sous une autre forme, celle d’un drame familial purement fictif, entre tragédie shakespearienne et comédie grinçante. Succession met en scène les jeux de pouvoir et les tensions intimes au sein d’un clan new-yorkais, les Roy, à la tête d’un empire des médias et du divertissement. La série s’ouvre sur le quatre-vingtième anniversaire de son président, le patriarche Logan, self- made-man qui doit laisser son trône à son fils aîné, Kendall. Un passage de témoin qui ne va pas se dérouler comme prévu...
Sous couvert de bienveillance, les quatre enfants de Logan vont se jeter avec voracité sur l’héritage. Mais le vieil homme va s’accrocher à son fauteuil...
Succession ausculte ainsi les tensions entre le « vieux » monde de Logan et le « nouveau » monde de ses enfants, celui des médias en crise, secoués par l’explosion d’Internet et des réseaux sociaux.
Armstrong, épaulé par le comédien et producteur Will Ferrell — lui aussi habituellement porté sur l’humour —, entretient un malaise tordant à coups de dialogues féroces, douloureux à force de cynisme ou de maladresse. Il espère que les Roy, antihéros arrivistes, souvent cruels mais « victimes d’un environnement toxique », finiront néanmoins par nous attendrir. Pierre Langlais.
Dans la veine anti-Trump, Succession, de Jesse Armstrong, est sans doute la fiction la plus méchante du moment. Brian Cox y incarne le personnage de Logan Roy, un impitoyable patriarche et magnat des médias, qui vient de lui valoir le Golden Globe du meilleur acteur dans une série dramatique. Le comédien entama sa carrière par un acte manqué : en 1986, il incarne... Hannibal Lecter pour Michael Mann dans Le Sixième Sens, mais sa lippe tombante et gonflée de morgue sera effacée à jamais des mémoires par un certain Anthony Hopkins, cinq ans plus tard, dans Le Silence des agneaux.
Dans Succession, Brian Cox est renversant de cruauté et de cynisme, prêt à tout pour garder son empire et son emprise sur ses enfants. Sans une once de cabotinage, à la différence d’Anthony Hopkins, qui se prend, lui aussi, pour Dieu dans Westworld. Trente-trois ans plus tard, Brian, le Britannique au génie trop discret, a gagné. Guillemette Odicino.
En général, si une histoire se termine par un mariage, c’est un happy end. Les héros, longtemps divisés, se rabibochent, réunis par l’amour, la famille, le soleil et un fastueux banquet. Pas dans Succession. La troisième saison de la série s’est refermée dans les coulisses du remariage toscan de la mère des enfants Roy. Offrant un décor somptueux à la conclusion (provisoire) de cette violente lutte pour le pouvoir.
Neuf épisodes plus tard, le champ de bataille est à feu et à sang, et Succession conserve son titre de tragédie familiale la plus impitoyable du moment, développant des merveilles de perversité.
On a cru, au début de la saison, que le combat serait simple : Kendall (Jeremy Strong), l’héritier malaimé sur le point d’être sacrifié, s’était rebellé contre l’autorité paternelle. Dans leur lutte contre Logan, ses trois frères et sœur allaient devoir choisir un camp et ainsi décider du sort de l’entreprise familiale, débarrassée de Ken ou de l’increvable patriarche.
Mais rien n’est simple dans la série de Jesse Armstrong. Chacun des rejetons s’est convaincu qu’il tenait la solution. Qu’il deviendrait le prochain pdg de l’empire médiatique, celui à qui Logan accorderait sa confiance. Même l’aîné, Connor (Alan Ruck), longtemps marginal, s’est projeté en futur président des États-Unis soutenu par papa.
La bête était blessée, menacée d’être mise en examen, attaquée de toutes parts par de jeunes entrepreneurs aux dents plus longues que les siennes. C’était bien mal connaître Succession que de croire Logan Roy défait. On peut reprocher à Armstrong de parfois tourner en rond, mais certainement pas de manquer d’imagination ou de virtuosité pour atteindre des sommets de cruauté. Non seulement l’éducation de Logan est une entreprise de démolition perpétuelle de sa progéniture, mais elle s’autodétruit tout aussi brillamment. C’est le principal intérêt de la série, renforcé dans cette troisième saison : cette valse-hésitation sadiquement orchestrée, déchirante et pathétique, entre Kendall, Connor, Shiv (Sarah Snook) et Roman (Kieran Culkin), qui se crachent au visage des « je t’aime » blasés.
Toujours en parfait équilibre entre tragédie et comédie, Succession a su mieux que jamais nous faire aimer et détester ces personnages égocentriques. Le jusqu’au-boutisme de Logan, figure opaque et brutale, finit par rendre attachants ses rejetons monstrueux, qu’il manipule comme un marionnettiste au-dessus d’un brasero. Sur le point d’être déshérités, Ken, Shiv et Roman se retrouvent dans une scène magnifique, émouvant mélange d’effleurements hésitants, de gestes de consolation et de piques désabusées. Ultime sursaut de fraternité... intéressée.
Ils s’imaginent partager le gâteau familial et vendent la peau de l’ours... qui attend, prévenu de leur « coup », pour porter l’ultime estocade — grâce à leur mère, affreusement indifférente à leur sort. Comment faire pire ? Que restera- t-il des Roy au début de la saison 4, qui pourrait être la dernière ? Une union entre frères et sœur est-elle enfin possible, alors qu’ils sont tous à terre ? Difficile d’imaginer Succession se refermer sur une note optimiste... Pierre Langlais.
Le premier épisode de la quatrième saison de Succession arrive en France, nous revoilà plongés au sein de cette famille devenue un peu la nôtre au fil des dernières années. Cette saison – qui sera aussi la dernière, a annoncé son créateur, Jesse Armstrong – s’ouvre, à nouveau, sur l’anniversaire de l’increvable mogul Logan Roy (Brian Cox). Lors du tout premier épisode de la série, celui-ci profitait de la fête pour annoncer qu’il n’avait finalement pas l’intention de quitter son poste de pdg de Waystar Royco et de laisser sa place à son aîné. Cette fois, même cérémonie cotonneuse-fastueuse, même mine exaspérée du patriarche au moment de la chanson d’anniversaire. Mais, cette fois, il manque des invités à la surprise-party. Comme le lance cousin Greg (Nicholas Braun), génial géant de la gaffe qui appuie là où ça fait mal : « Où sont les enfants ? » Logan Roy ne voit pas de qui il veut parler. Lui, les appelle « les rats ».
Le trio a fait sécession, s’extrayant enfin (pour l’instant tout du moins) du jeu de massacre de l’éternelle rivalité fraternelle. Pour la première fois, Kendall (Jeremy Strong), Roman (Kieran Culkin) et Shiv (Sarah Snook) se sont unis – le coup d’État avait été lancé en fin de saison 3. Leur idéal collectif ? Le parricide. Pour ce faire, ils tentent de monter un site d’information « un putaclic pour intellos », résume Roman.
Leur premier objectif de bataille consiste à surenchérir sur l’offre de leur père, à nouveau sur les rangs pour racheter la société de médias de la très wasp Nan Pierce (hiératique Cherry Jones). Cette dernière trouve décidément « abominable » de faire ainsi grimper les enchères mais sacrifie à l’exercice avec une perversité de violette qui vaut bien la fureur de Logan Roy. Lequel, apprenant la combine, hurle à son gendre Tom (Matthew Macfadyen, plus insaisissable que jamais d’énergie contrariée), désormais dans son camp : « Appelle ta connasse de femme. » Ambiance.
Sans rien spoiler, on notera que la haine reste le motif d’union le plus fédérateur au sein de Succession. L’ombre du fascisme plane toujours – l’élection approche, « façon 1933 », rappelle Shiv. Le langage est toujours plus fleuri qu’un tableau de Monet. Le bunker familial est aussi bourré à craquer de souffrances que traversé de fébriles moments de loufoquerie.
Capable de tous les décrochages, ce premier épisode réserve aussi un intense moment d’intimité désespéré entre Shiv et Tom. Une scène à l’os, presque atone, à mille lieues des concours d’éloquence auxquels nous a habitués la série.
Ses héros sont aussi riches qu’abjects, aussi attachants que déplaisants. “Succession” est-elle une saga écœurante de cruauté ou une satire salutaire ?
De toute évidence, Jesse Armstrong, le créateur de Succession, a bien retenu la leçon d’André Gide — « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de la mauvaise littérature. » Affreux, (hyper) riches et méchants, les héros de sa brillante série — tout simplement la meilleure du moment, selon les derniers Emmy Awards — incarnent les 0,1 % les plus fortunés de la planète et les moins dotés d’un surmoi. « J’ai reçu la haine en héritage », pourraient fredonner les quatre rejetons du magnat des médias Logan Roy (Brian Cox) prêts à toutes les turpitudes, depuis trois saisons, pour prendre la place du patriarche qui leur fait miroiter le trône sans décoller d’une demi-fesse.
Une dynastie de damnés, pris au piège du legs, dans leurs bureaux new-yorkais — on pense à Rupert Murdoch, mais le Britannique Jesse Armstrong, qui pitcha, au patron de HBO, il y a quelques années « un Dallas version Festen », évoque aussi pêle-mêle les Redstone (à la tête de l’empire ViacomCBS), les Windsor, Silvio Berlusconi ou Vincent Bolloré ! Chez les Roy, Judas est l’ami du petit déjeuner, l’humiliation un rituel familial et combattre le fléau de la bien-pensance la seule cause commune.
Quant aux autres... quels autres ? Le premier épisode donnait le ton : alors que le clan dispute une partie de softball, Roman (Kieran Culkin), le cadet dégoupillé, avise un gamin latino sur le bord du terrain et lui promet un chèque d’un million de dollars s’il gagne le point. L’éclair d’espoir dans les yeux de la mère, la déception de l’enfant qui échoue... Plus cynique, tu meurs.
Vicieux comme des chevaux borgnes dans un haras, les Roy n’en demeurent pas moins méchamment attachants. Moins grand public, plus élitiste, moins sanglante, et, pourtant, autrement plus virulente.
Succession, c’est Freud qui percute Marx dans l’open space et Shakespeare qui se marre. Qu’est-ce qui a flingué les gamins Roy ? Trop d’argent ou pas assez (voire pas du tout) d’amour ? On ausculte le générique, ses fragments de souvenirs en super-8, pour tenter de saisir une enfance en forme de parfait manuel d’éducation malveillante. On convoque Le Roi Lear et Richard III pour la folie mortifère du pouvoir, mais déjà la série ricane de nos références. La violence du capitalisme s’exprime sans faux-semblants dans l’ultra-compétitivité jusque dans l’intimité et dans l’indifférence pour le reste de l’humanité. À des années-lumière du culte enthousiaste du dollar façon Dynastie ou du glamour coquettement hors de prix d’Emily in Paris.
Devant ce monde de zombies en costumes Armani, c’est la fresque post-apocalyptique The Walking Dead qu’évoque spontanément Sandra Laugier ! « La survie individuelle à tout prix, la disparition des institutions, l’abandon de l’éducation : l’ultra- libéralisme, c’est déjà l’apocalypse. Au-delà de la critique sociale, la série amène le spectateur à prendre conscience qu’il abandonne lui-même ses principes au cours de l’expérience. »
« Tout est extrême dans Succession, jusque dans l’exigence envers le spectateur, qui témoigne d’une ambition formatrice », affirme Sandra Laugier, convaincue du potentiel d’éducation populaire des séries. On est habitués aux personnages de méchants, au spectacle brut de l’immoralité, mais ici, le rôle du langage est prégnant : le mal se dit à bâtons rompus, cela nous aiguillonne d’une façon inédite. » Oser l’accent tonique de la satire, sa capacité à réveiller les consciences : il y a urgence, alerte la série qui met en scène, au fil des saisons, la menace grandissante du fascisme. Adam McKay (Don’t Look Up), qui a signé la réalisation du pilote, martelait lors du lancement : « Les inégalités de richesse n’ont jamais été aussi profondes qu’aujourd’hui : c’est pire qu’en 1850 sous l’esclavage ou que chez les Romains ! »
Si Jesse Armstrong, lui, garde un silence têtu sur l’éthique, ce fils d’infirmière et de prof, assistant parlementaire au sein du Parti travailliste avant de passer à l’écriture, résume son œuvre en un blason à l’os : « Lutter contre le bullshit (“la foutaise”). » Au cas où vous en doutiez encore, Succession n’est pas une feuille de route pour milliardaires tout- puissants, mais un brûlot railleur qui sème la révolte à revers. Marjolaine Jarry.
MA SORCIÈRE BIEN-AIMÉE
Bewitched
de Sol Saks, 1964-1972, US, 8 saison, 254 épisodes, Couleurs
avec Elizabeth Montgomery, Dick York, Agnes Moorehead…
RÉSUMÉ : Samantha, une femme membre d'une éminente société de sorcellerie, a vécu pendant plusieurs siècles loin des humains. Un jour, cette ravissante sorcière tombe amoureuse et épouse Jean-Pierre Stephens, un « mortel » qui travaille dans l'agence de publicité McMann & Tate.
La vie de Jean-Pierre est bouleversée lorsque sa femme lui avoue le soir de leur nuit de noces qu'elle est une sorcière. Samantha n'a qu'à bouger le bout de son nez pour lancer un sortilège. De plus, sa mère, Endora, et son père, Maurice, et tous les autres membres de sa famille pratiquent la sorcellerie.
La vie quotidienne se transforme vite en une suite d'aventures loufoques et de quiproquos magiques.
ANECDOTES : Ma sorcière bien-aimée qui raconte l’histoire de Samantha, une sorcière qui épouse un humain, fait partie de ces séries des années 60 qui ont utilisé le fantastique pour parler des changements dans la vie des couples américains, à savoir l’émancipation des femmes. Ici, même si elle fait toutes les tâches ménagères comme il se devait à cette époque c’est Samantha qui a le pouvoir (magique), et Jean-Pierre a bien du mal à imposer sa volonté, même s’il essaie très fort.
Plusieurs prénoms ont été changés en V.F, comme Tabatha, qui est Tabitha en V.O. Alfred Tate est prénommé Larry (qui est le diminutif de Lawrence, prénom qu’on voit sur la plaque de sa porte au bureau). Les voisins Albert et Charlotte Kravitz sont en fait Abner et Gladys. Jean-Pierre, quant à lui, est Darrin.
Jean-Pierre, en V.F. est appelé, la plupart du temps, Jean-Piètre par Endora, sa belle-mère. En V.O. il y a plus de variété, ça va de Dar-Dar, Darwood, Dobbin à Durweed, Dustbin (poubelle), Dum-Dum, en passant par What’s-His-Name.
Au début de la sixième saison, Jean-Pierre est joué par un acteur différent, Dick Sargent, sans qu’aucune explication ne soit donnée. Dick York, le Jean-Pierre « original » a dû quitter la série à la fin de la cinquième saison après qu’il ait perdu connaissance sur le tournage, en 1969. Il avait de graves problèmes de dos depuis le tournage du film Ceux de Cordura (1959). Pendant une scène avec Gary Cooper, sur une draisine (petite plate-forme sur rails qu’on actionnait manuellement), il s’est déchiré le dos en manipulant la draisine seul, et est devenu par la suite accro aux anti-douleurs.
Sur le tournage de Ma Sorcière Bien-Aimée, un mur penché avait été installé pour que Dick York puisse se reposer entre les prises et, plus tard, il a eu de plus en plus de scènes assis ou couché; il devait aussi être aidé pour se déplacer sur le plateau.
Cette substitution d’acteur, sans explication, venant d’une production qui pensait peut-être que les gens n’y feraient pas attention ou n’en avaient rien à faire, a donné naissance au « Darrin Syndrom » et la même série l’a fait une deuxième fois puisqu’ils ont aussi remplacé l’actrice qui jouait Charlotte, quand la première a quitté la série pour cause de maladie.
COMMENTAIRES : « Ma Sorcière Bien Aimée » Pleine de malice, elle vit désormais sur terre après avoir passé des siècles loin des humains. Elle a bien promis à Jean-Pierre, son mari, de ne plus utiliser la magie une fois mariés, mais elle se retrouve dans des situations tellement délicates qu’elle ne peut s’empêcher de bouger le bout de son nez pour jeter des sorts. Pas facile de vivre comme une mortelle lorsque des catastrophes déboulent à longueur de temps dans le salon : entre Endora sa mère, Serena sa cousine et une foule d’oncles et de tantes plus décalés les uns que les autres et les clients de Jean-Pierre, les situations loufoques ne sont jamais très loin !
En France, il faut se contenter d’une seule chaîne, puis deux, jusqu’en 1972. C’est dire si le public est encore captif, et les références communes d’autant plus fortes qu’elles sont moins nombreuses. Les baby-boomers regardent des feuilletons français qui leur tendent un miroir, du Temps des copains, « la » série de l’époque yéyé (1963), à la comédie conjugale Les Saintes Chéries (avec Micheline Presle et Daniel Gélin, dès 1965), mais apprécient déjà des productions importées d’Amérique (de Ma sorcière bien-aimée à La Quatrième Dimension), ou redécouvrent le western en série (Au nom de la loi, avec Steve McQueen).
À PROPOS : La date du 22 novembre 1963 reste à jamais gravée dans les esprits comme étant le jour de l’assassinat de John Fitzegarld Kennedy, trente-cinquième président des États-Unis. Il s’agit aussi du jour où étaient censées démarrer les répétitions pour l’épisode pilote de Ma Sorcière bien-aimée.
Compte tenu des événements, celles-ci ont été reportées, d’autant plus que l’actrice Elizabeth Montgomery et son époux, le réalisateur Bill Asher, étaient des amis de Kennedy.
Le tournage du premier épisode de Ma Sorcière Bien-Aimée a donc pris un peu de retard et s’est terminé le 6 décembre 1963. Il a été diffusé le 17 septembre 1964 sur la chaîne de télévision américaine ABC.
Mariée à Bill Asher, qui a travaillé avec elle en tant que réalisateur sur Ma Sorcière bien-aimée, Elizabeth Montgomery s’est, au fil des saisons, rapprochée d’un certain Richard Michaels, également réalisateur sur la série. Comme le rapporte le livre « Twitch Upon a Star », signé Herbie Pilato, ils ont eu une liaison lors du tournage.
Cela a entraîné la fin de leurs mariages respectifs, mais aussi l’arrêt de la série. En effet, Ma Sorcière bien-aimée étant produite par Ashmont - la société de production d’Elizabeth Montgomery et de son mari Bill Asher - cette histoire aurait accéléré la fin des aventures de Samantha à l’écran. Elizabeth Montgomery et Richard Michaels sont restés ensemble pendant deux ans et demi au total.
Le 4 avril 1968, la chaîne américaine ABC propose l’épisode 28 de la saison 4 de Ma Sorcière bien-aimée en direct à ses téléspectateurs. La diffusion de cet épisode est interrompue par l’annonce du décès de Martin Luther King Jr., assassiné à Memphis, dans le Tennessee.
Toujours selon le livre de révélations « Twitch Upon a Star », Agnes Moorehead a très mal vécu le départ de Dick York de Ma Sorcière bien-aimée. lL’interprète de Jean-Pierre a été contraint de quitter la série pour des problèmes de santé. Il a alors été remplacé par Dick Sargent qui a repris le rôle.
Mais Agnes Moorehead n’aurait pas digéré le départ de Dick York et s’en serait alors prise à son remplaçant, se montrant particulièrement froide à son égard. L’actrice aurait même fait pleurer le comédien à plusieurs reprises sur le tournage de la série.
Ça picolait sec sur les tournages, que ce soit au niveau des acteurs, actrices ou membres de l’équipe de tournage. À tel point que dans certaines scènes, certains sont déjà saouls et que ce qu’il y avait dans leurs verres à l’écran était bien de l’alcool. Ils essayaient de faire un effort par contre quand des enfants étaient sur le plateau. Tout le monde fumait aussi comme des pompiers. La série a la réputation d’avoir été maudite, beaucoup d’actrices et d’acteurs étant morts avant 65 ans, comme Elisabeth Montgomery qui est morte à seulement 62 ans.
LES ACTEURS : Son célèbre mouvement de nez date de l'audition pour Ma sorcière… Elizabeth est anxieuse et fronce nerveusement du nez, le directeur de casting apercevant ce tic lui demande de l'intégrer à son jeu pour jouer Samantha. Après Ma sorcière bien-aimée, Elizabeth Montgomery, fille de deux acteurs n'a plus joué dans une série mais à fait beaucoup de téléfilms restés inédits chez nous. Un de ses gros regret : avoir refusé un rôle dans Dynastie. En 1995, elle meurt d'un cancer du colon foudroyant qui l'emporte en huit semaines. Elisabeth Mongtomery était très engagée politiquement et une grande activiste pour les droits des femmes, des gays et des victimes du Sida. Elle s’est servi de sa notoriété pour faire avancer ces différentes causes.
En 1959, le malheureux interprète de Jean-Pierre s’était gravement blessé au dos sur un tournage. Dick York ne tient debout qu'à coups d'anti-douleurs. Son rôle est un temps allégé mais Dick est contraint d'abandonner son rôle après s'être évanoui sur le plateau en 1969. Il sera remplacé par l'acteur Dick Sargent. La suite est un chemin de croix : un investissement immobilier hasardeux en 1976 le laisse ruiné. Il survit grâce aux aides sociales puis, un peu renfloué, il est cloué à son lit même s'il réussit à animer par téléphone une action de charité pour les sans-abris. Il meurt d'un cancer en 1992. Agnès Moorehead a débuté au cinéma dans le classique Citizen Kane, joué presque une centaine de rôles, chanté à Broadway, co-présenté les Oscars mais le grand public s'en souvient surtout comme la mère acariâtre de Samantha. Pas fan de la série, elle a même refusé le rôle d'Endora jusqu'à ce qu' Elizabeth Montgomery la croise par hasard dans un magasin et la supplie d'accepter. Son contrat stipulait qu'elle n'apparaitrait que dans 8 épisodes sur 12, Agnès Moorehead souhaitant jouer d'autres rôles. Elle n'en aura pas le temps : un cancer la fait disparaître en 1974. Elle a eu une carrière exceptionnelle, en dehors de la série. Elle a joué notamment dans Citizen Kane ((1941), Jane Eyre (1947) avec Orson Welles, et Les Passagers de la Nuit (1947) avec Humphrey Bogart et Lauren Bacall. Elle a aussi joué plusieurs pièces à succès à Broadway et a reçu de nombreuses nominations. Dans la catégorie série, c’est elle qui joue le rôle de la vieille femme, envahie dans sa maison isolée par de petits extra-terrestres, dans La Quatrième dimension (Les Envahisseurs, 3X13). Pas un mot n’est dit dans cet épisode. Vétéran de la Seconde Guerre mondiale, il a eu l'une des plus prolifiques carrières de l'équipe de Ma sorcière.. on l'a vu dans les séries Spiderman, Mission impossible, Wonder Woman, La Croisière s'amuse, Dallas, Dynastie… En 1988 son fils aîné Jonathan est tué dans l'attentat de Lockerbie. David White, très en colère, ne veut plus voir personne et s'enferme chez lui durant presque un an. Il finit par repartir en tournage mais meurt d'une crise cardiaque en 1990. Erin Murphy joue Tabatha, occasionnellement aussi jouée par sa sœur jumelle Diane. Elle a gardé un très bon souvenir de ses partenaires de l'époque : Elizabeth Montgomery lui racontait beaucoup de blagues et Dick York, très gentil, lui lisait des histoires sur les tournages qui pouvaient durer jusqu'à 14h par jour. Après Ma sorcière..., l'actrice a fait quelques rôles mineurs avant de changer de vie : mariée trois fois, maman de six enfants, elle fait aujourd'hui commerce de laine d'Alpagas.
HARRY POTTER À L’ÉCOLE DES SORCIERS
de Chris Columbus, 2001, GB, 2h32, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson…
RÉSUMÉ : Harry Potter est un orphelin élevé par son oncle Vernon et sa tante Pétunia. Alors qu'il n'était qu'un tout jeune enfant, ces deux odieux personnages lui ont raconté que ses parents avaient trouvé la mort dans un accident de voiture. Le jour de ses 11 ans, Harry reçoit la visite d'un homme gigantesque dénommé Rubeus Hagrid, qui prétend que Harry est le fils de deux puissants sorciers et qu'il possède des pouvoirs extraordinaires. Trop content d'avoir trouvé ce sauveur providentiel lui offrant l'occasion de sortir des griffes de ses détestables tuteurs, Harry Potter accepte avec joie de suivre le mystérieux personnage pour se rendre à Poudlard, la célèbre école de sorcellerie...
POINTS DE VUE : Donc, Harry, trogne de brave petit gars derrière ses lunettes cerclées, est malmené par ses parents adoptifs, mais il aura sa revanche, puisqu’il est sorcier et fils de sorciers. Il est grand temps qu’il parte perfectionner son art à Poudlard, la pension pour les gamins de son espèce...
Le film démarre comme un conte à la Roald Dahl puis — c’est son charme — se construit sur un univers fantastique autonome qui pique à toutes les mythologies. Une trouvaille de J.K. Rowling. Quand la chronique savoureuse de la vie à Poudlard fait place à l’intrigue proprement dite, le combat contre le Mal mené par Harry et ses amis, l’intérêt faiblit un peu. Chris Columbus, le réalisateur, a longtemps été l’homme à tout faire de Spielberg. Il n’empêche pas Harry Potter d’être un divertissement familial idéal, mais n’apporte rien d’autre. Aurélien Ferenczi, 2022.
Ayant plus ou moins échoué avec son univers cinématographique de super-héros, Warner trouve un nouveau prétexte pour continuer d’exploiter sa licence la plus juteuse, Harry Potter. Après avoir gonflé artificiellement son univers avec Les Animaux fantastiques, la filiale France de la Warner, pour les vingt ans de la publication du premier tome en France, a décidé de marquer le coup en sortant une version remasterisée en 4K du premier film de la franchise, réalisé par Chris Colombus.
La production, avant la projection, annonce une sortie sur 240 salles. Ce sera aussi l’occasion pour quelques unes d’entre elles d’organiser des marathons de la saga entière. Difficile, à l’issue de la projection, d’y trouver autre chose qu’un intérêt marketing. Si pour bon nombre de spectateurs ayant grandi avec les personnages l’occasion sera belle d’y amener les enfants, le souvenir qu’ils ont du film sera probablement meilleur que le film lui-même.
Chris Colombus, spécialiste de la comédie familiale qui connut son heure de gloire dans les années 80, n’est pas ce que l’on pourrait appeler un réalisateur au style personnel. Tout au plus un honnête illustrateur, bien aidé par des décors fabuleux et des effets spéciaux qui ont bien vieilli. Les incrustations paraissent aujourd’hui assez disgracieuses, et les créatures numériques bien raides.
Tout à leur volonté de présenter à l’écran un vaste univers, les scénaristes et le cinéaste se contentent de suivre le roman sans jamais se l’approprier, d’où cette impression de collage grossier de saynètes les unes à la suite des autres, vaguement liées par l’intrigue générale autour de la pierre philosophale.
Cependant, c’est avec tendresse que l’on revoit les débuts du fameux trio, Daniel Radcliffe, Emma Watson et Rupert Grint, ainsi que tous leurs camarades de classe. Un trio en parfaite alchimie, évidemment loin d’être au maximum de leur capacité de jeu, mais suffisamment charismatique pour emporter le spectateur.
Et puis tous les merveilleux seconds rôles, à commencer par le défunt Richard Harris, remplacé dans Le Prisonnier d’Azkaban par Michael Gambon dans le rôle de Dumbledore, la géniale Maggie Smith en professeur McGonagall et évidemment Alan Rickman, lui aussi décédé depuis, incomparable en professeur Rogue.
Et puis, malgré l’inconsistance du cinéaste évoquée plus haut, la magie prend malgré tout, grâce surtout à la merveilleuse partition de John Williams, qui ne demande qu’à se déployer dans une salle de cinéma.
Un retour à Poudlard un peu douloureux, donc, mais qui reste agréable grâce à la présence de vieux amis. Franck Lalieux, 2022.
HARRY POTTER ET LA CHAMBRE DES SECRETS
de Chris Columbus, 2002, GB, 2h41, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson…
RÉSUMÉ : Un soir, l'oncle Vernon, la tante Pétunia et Dudley, le cousin d'Harry Potter, accueillent des invités importants, contraignant Harry à garder la chambre. C'est alors que Dobby, un elfe, fait son apparition. Il annonce à Harry que des menaces pèsent sur l'école de Poudlard. Le garçonnet refuse bien évidemment de croire ce petit être, et surtout de suivre son conseil : ne pas retourner en classe là-bas. Faisant fi de ces considérations, Harry fait sa rentrée des classes à Poudlard. Dès les premiers jours, une voix malveillante le prévient que la légendaire et redoutable Chambre des secrets est désormais à nouveau ouverte. Bientôt, les événements étranges se succèdent à Poudlard...
POINT DE VUE : Dans un luxe de décors, nos trois mini mages en uniforme ont un poil grandi mais s’adonnent toujours à leur passe-temps favori : débrouiller quelque inquiétant mystère, même s’il faut pour cela désobéir et se mettre en danger.
Le jeu de piste pourrait donc être ébouriffant, mais plus on approche du but, plus ça tourne au jeu vidéo : ici, on évite un serpent géant, là, on se bagarre... Une lassitude rhumatisante gagne dès lors le spectateur adulte, qui perd un peu son âme d’enfant dans le fracas des effets spéciaux. Cécile Mury, 2022.
HARRY POTTER ET LE PRISONNIER D’AZKABAN
de Alfonso Cuarón, 2004, GB, 2h22, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson…
RÉSUMÉ : Le dangereux sorcier Sirius Black s'est évadé de la prison d'Azkaban après treize longues années de détention. Son but : assassiner Harry. Pendant ce temps, le jeune sorcier fait sa troisième rentrée à l'école de magie de Poudlard. Harry s'est à peine mis en route pour Poudlard qu'il est attaqué par un Détraqueur, un gardien d'Azkaban lancé à la recherche du fugitif. Le Détraqueur tente d'aspirer son âme mais Ron et Hermione, qui veillent sur lui, l'aident à se tirer de ce mauvais pas. Les nouveaux enseignements sur la Défense contre les Forces du Mal ou les soins aux créatures magiques ne seront pas de trop pour aider le jeune magicien à affronter les dangers qui le guettent de toutes parts...
POINTS DE VUE : Comment accompagner Harry vers l’adolescence ? En faisant appel au talent remuant d’Alfonso Cuarón. Le cinéaste mexicain chamboule la chronologie et expédie certains rebondissements au profit des scènes en extérieur. À raison : sa lande sous une lune gothique et ses arbres à la Tim Burton sont du plus bel effet. Il prend aussi de surprenantes libertés vestimentaires : le jean et les baskets, c’est plus confortable que l’uniforme de pensionnaire pour chevaucher un hippogriffe. Et cette impressionnante créature, mi-faucon, mi-cheval, est d’un réalisme poétique rare dans la saga Potter au cinéma. En donnant à la magie un tour plus intime et plus torturé, Cuarón offre à Harry son plus bel âge. Guillemette Odicino, 2021.
Pour sa troisième année à l’école des sorciers, Harry Potter change ses habitudes... D’abord, Chris Colombus cède les rênes à Alfonso Cuarón ; le premier avait suivi des enfants pendant deux épisodes, avec Le prisonnier d’Azkaban, nous découvrons des adolescents.
Pour trancher, adieu partiel aux robes sans âge de Poudlard, bonjour aux baskets, jeans et sweat-shirts. Plus moderne donc, et plus sombre aussi, le troisième opus annonce le monde adulte : vengeance, violence, quête d’identité et mensonge. Sentiments profonds et durs que nos jeunes protagonistes découvrent tout au long des 2h20 du film. Sombre de par le scénario et les personnages ; les détraqueurs, terribles gardiens d’Azkaban feraient presque penser aux neuf cavaliers du Seigneur des anneaux : gai, n’est ce pas ? On est bien loin du gentil Dobby...
La sensation de voir un rideau gris tomber sur le monde du jeune Potter est presque palpable. Alfonso Cuarón a quasiment gommé les couleurs, les couloirs de Poudlard ne sont plus sûrs et presque glauques, même la grande salle paraît terne, c’est dire ! Les jeux de caméra sont sans comparaison avec ceux des épisodes précédents, plus rapide, plus brutaux. Malgré de superbes transitions entre les saisons de l’année, le spectateur à presque l’impression d’être toujours en hiver.
Restent quand même quelques valeurs sûres : les traits d’humour involontaires de Ron dédramatisant toujours bien les situations et la présence insupportable, mais géniale du professeur Rogue (Alan Rickman). Enfin, chaque épisode apportant son lot de nouveaux personnages : on notera l’arrivée hilarante de Sibylle Trelawney, professeur de divination, interprété de façon loufoque par Emma Thompson, et celle nettement moins amusantes de Sirius Black et Remus Lupin. Quant aux autres, c’est avec plaisir qu’on voit évoluer lentement les camarades de classe de Harry, Hermione et Ron ; à remarquer l’impressionnant changement chez Neville... Même le remplacement de Richard Harris, décédé l’année précédente, par Sir Michael Gambon dans le rôle d’Albus Dumbledore, se fait en douceur.
Vous l’aurez compris, fanatiques inconditionnels des livres de J.K. Rowling, vous ne serez pas déçus, amateurs de grands spectacles (et des deux premiers épisodes) vous ne le serez pas non plus... Bref, à regarder en toute confiance ! Rodolphe Bouchez, 2020.
HARRY POTTER ET LA COUPE DE FEU
de Mike Newell, 2005, GB/USA, 2h37, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint…
RÉSUMÉ : Harry Potter entame sa quatrième année d'études à l'école de Poudlard. Un événement d'envergure se profile : le tournoi des Trois Sorciers, dont les participants, venus de tous les pays et de différentes écoles, sont désignés par la Coupe de feu. Contre toute attente, la Coupe sélectionne le jeune Harry. Le scandale est immédiat : l'étudiant en magie, qui n'a pas l'âge légal pour participer au tournoi, est aussitôt accusé d'avoir triché. Après une série d'épreuves ardues auxquelles il se prête pour prouver sa bonne foi, Harry comprend ce que lui réserve son destin. Il ne pourra pas échapper à un combat contre "Celui dont on ne doit pas prononcer le nom".
POINTS DE VUE : Harry et ses potes de Poudlard sont devenus des ados presque comme les autres : dès la première scène, ils s'en vont assister à la Coupe du monde de quidditch. Sans leur mode de locomotion particulier, on pourrait confondre ces supporteurs avec les fans de n'importe quel club de foot. Au fil des épreuves, l'ami Harry prouvera sa vaillance et son exceptionnelle maturité. Il fera moins le faraud lors du dernier de ses « travaux » : trouver une cavalière pour le bal de Poudlard. Qui inviter ? Sa copine Hermione ? Son adversaire canon, la blonde Fleur Delacour ? Y a-t-il un sortilège pour ne pas faire banquette ?
L'astucieux passage par l'univers du film de teen-agers humanise encore un peu plus ce Harry Potter curieusement composite. Les effets spéciaux sont discrets, chaque personnage, joliment croqué, et les acteurs — fine fleur de l'art dramatique anglais —, tous impeccables. Le long chemin vers l'âge adulte connaît des accidents dramatiques où même la magie peut se révéler impuissante. La leçon est salutaire. — Aurélien Ferenczi, 2016.
Après un troisième volet (Harry Potter et le prisonnier d’Azkaban) qui avait réconcilié tout le monde (aficionados, cinéphiles, néophytes et détracteurs proclamés), le quatrième épisode risque de diviser de manière plus tranchée. Disons-le tout net : il accuse une baisse de régime dans la saga des Harry Potter. La première déception naît de la disproportion entre le bouquin (le meilleur de la série) et le film (plutôt moyen). Primo, il manque la folie, la démesure et surtout les ambitions visuelles de Cuarón qui rappelait au passage que le cinéma n’était pas de la littérature sur bobine mais avant tout un art du renouvellement en perpétuel mouvement. Secundo, tous les éléments potentiellement intéressants du livre (coupe du monde de Quidditch, les Durlseys et les Elfes de maison) sont effacés au profit d’autres idées pas nécessairement très convaincantes. Les raccourcis narratifs ne font plaisir ni aux puristes qui ne retrouveront l’esprit du livre que par brèves intermittences, ni aux profanes qui se demanderont au mieux si certaines bobines importantes n’ont pas sauté au montage.
Clairement défini comme le volet le plus sombre et violent (d’où une interdiction aux moins de 12 ans au Royaume-Uni), Harry Potter et la coupe de feu bénéficie du savoir-faire de Mike Newell qui, s’il ne respecte pas toutes les étapes fictionnelles, charrie toutefois autant la noirceur que la drôlerie pure. Le passage de la coupe des trois sorciers est à ce titre une récompense bien méritée. Tel un bonbon acidulé et inoffensif, le résultat, sans être un pétard mouillé, se contente d’être plaisant comme un divertissement ludique qui remplit toutes ses vertus distractives, et limité parce qu’il ne se donne à aucun moment des ambitions plus nobles. Mais peu importent les réserves, au fond : c’est toujours mieux que les deux premiers volets de Chris Columbus qui s’abîmaient dans l’académisme bon teint et servaient de joli prétexte illustratif pour acheter le bouquin. De toute façon, tout semble programmé à l’avance : ce grand bazar (auquel on a parfaitement le droit d’être allergique) sera un succès assuré. Le phénomène est loin d’être fini. La preuve, le sixième roman vient de paraître... Edgar Hourrière/Romain Le Vern, 2020.
HARRY POTTER ET L’ORDRE DU PHÉNIX
de David Yates, 2007, GB, 2h44, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint…
RÉSUMÉ : Le ministre de la Magie impose à l'école de Poudlard un nouveau professeur de défense contre les Forces du Mal, Dolorès Ombrage. Mais très vite, cette femme se montre peu respectueuse de ses élèves. Et ses cours s'avèrent sans grand intérêt. Rapidement, une vive inimitié entre elle et le jeune Harry Potter se fait jour. L'enseignante n'a de cesse de rabaisser Harry. Avec l'aide de ses amis Ron et Hermione, il décide de fonder un groupe secret : l'armée de Dumbledore. Harry est persuadé que le vil Voldemort prépare quelque méfait. Il a l'intuition que les forces s'apprêtent à frapper à nouveau. Cette cinquième année d'études à Poudlard n'a décidément rien à envier aux précédentes. Mais le péril n'est-il pas devenu plus grand que par le passé ?...
POINT DE VUE : Dans ce cinquième volet, l’heure est venue de choisir son camp. D’un côté, Voldemort et ses disciples. De l’autre, l’Ordre, constitué avant la naissance de Harry, et qui se réunit dans la maison de Sirius Black. Comment trouver cette bâtisse clandestine ? Les façades de la rue s’étirent jusqu’à lui donner naissance — un effet spécial de toute beauté. Et puis il y a Harry, qui, comme tout superhéros en colère, découvre le côté obscur de sa force. Il a surtout la rage contre un nouveau professeur, Dolores Ombrage, ronde, rose, mielleuse, qui affectionne la torture pour faire respecter ses multiples décrets...
« Grâce » à cette grande inquisitrice, incarnée avec jubilation par l’immense Imelda Staunton, le film prend une dimension politique : Poudlard est gangrené par le fascisme, Harry et ses amis entrent alors en résistance. Cette petite armée d’adultes débutants a fière allure. C’est grâce à elle, à sa soif de liberté, que Harry Potter et l’ordre du Phénix garde un pouvoir magique. Guillemette Odicino, 2022.
HARRY POTTER ET LE PRINCE DE SANG MÊLÉ
de David Yates, 2009, GB, 2h33, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson…
RÉSUMÉ : Harry Potter, le célèbre sorcier, commence sa sixième année à l'école de magie Poudlard. Il découvre un vieux manuel de potions portant la mention : "Cet ouvrage appartient au Prince de sang-mêlé". Ce livre lui permet de briller dans le cours du professeur Slughorn et d'être invité aux dîners qu'il donne pour ses meilleurs élèves. Harry commence à en apprendre plus sur le sombre passé de lord Voldemort, qui répand désormais la terreur dans le pays. Harry et ses meilleurs amis, Ron Weasley et Hermione Granger, soupçonnent Drago Malefoy, un de leurs camarades de classe, d'être devenu un mangemort...
POINT DE VUE : Les élèves magiciens sont atteints d’un mal étrange : ils complotent, rigolent puis éclatent en sanglots. Un nouveau maléfice de Voldemort ? Non, juste un bouillonnement hormonal... C’est la fête du kiss à Poudlard ! Ron tombe dans les pattes d’une pulpeuse érotomane, Hermione abandonne sa posture de sainte-nitouche, et Ginny passe en mode allumeuse. Dans ce déferlement pubertaire, il n’y a que Harry pour rester maître de ses pulsions...
Avant le grand finale, ce Prince de sang-mêlé est un épisode de transition qui s’attache plus à la vie à Poudlard qu’à la mythologie de l’épopée. Une victoire du teen movie sur l’heroic fantasy. Et la confirmation du judicieux choix de David Yates, aux commandes depuis L’Ordre du Phénix : il a su trouver le bon dosage entre noirceur et comédie. Car c’est le grand atout de cet épisode : entre deux morceaux de bravoure, on s’y amuse. Télérama, 2022.
HARRY POTTER ET LES RELIQUES DE LA MORT 1ÈRE PARTIE
de David Yates, 2010, GB, 2h26, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint…
RÉSUMÉ : Dumbledore est mort. Désormais, Harry, Hermione et Ron devront se débrouiller seuls, sans l'aide de leurs professeurs et sans la protection du sorcier bienveillant. Pour protéger ses parents, Hermione décide de s'effacer de leurs souvenirs. Alors que Harry voyage en compagnie de Hagrid grâce aux membres de l'Ordre du Phénix, qui ont organisé sa fuite, il est repéré par Voldemort. Protégé par sa chouette, Harry parvient à arriver chez Ron. Les Weasley se préparent à fêter le mariage de Bill et de Fleur. Alors que la noce bat son plein, Harry, Hermione et Ron apprennent une terrible nouvelle : le ministère de la Magie vient de tomber aux mains malfaisantes de Voldemort...
POINTS DE VUE : Ce n’est pas un scoop, du moins pour les millions de lecteurs des livres de l’Anglaise J.K. Rowling : dans cet épisode, l’infâme Voldemort, ennemi magique numéro un, a pris le pouvoir. Ça chauffe pour Harry Potter et le monde libre des sorciers démocrates. Côté « méchants », cette septième adaptation ciné décolle plus vite qu’un Éclair de feu, le balai turbo préféré des sorciers : vertigineuses batailles aériennes, menaçante esthétique crypto-nazie du nouvel ordre voldemoriste.
Hélas pour le film, le côté obscur de la Force est mollement combattu. Qu’est-il arrivé à Harry Potter, ou du moins à son interprète, Daniel Radcliffe ? Aussi transparent que le verre de ses fameuses lunettes, il se laisse éclipser par ses comparses, Emma Watson (Hermione) et surtout Rupert Grint (Ron) — avec son look d’ado british échappé des sixties, ce dernier fait ce qu’il peut pour réveiller une ambiance franchement lymphatique.
Le Mal triomphe, et que font Harry et ses potes ? Ils partent camper dans la forêt. On subit leurs états d’âme gnangnan sur fond de paysages grandioses... en attendant la suite. Car, pour étirer la lucrative saga, la Warner a « coupé » le dernier livre en deux. Heureusement, l’ultime affrontement sera plus palpitant. Cécile Mury, 2022.
Adaptation du dernier tome de la saga, événement de l’automne 2010, la première partie des Reliques de la mort chemine vers toujours plus de noirceur, démontrant que depuis Le prisonnier d’Azkaban, référence artistique et cinématographique de l’épopée, les films, tous scénarisés par Steve Kloves, à l’exception de Harry Potter et l’Ordre du Phénix, n’ont pas été de simples produits commerciaux destinés au succès. Bien sûr, les chiffres de chaque nouvel épisode donnent le tournis : un milliard de dollars de recettes à travers le monde ! Mais la déclinaison sur écran de ce triomphe éditorial aura su, globalement, rester fidèle à l’esprit du récit de J.K. Rowling, ne versant pas dans la surenchère d’effets gratuits, pour satisfaire l’orthodoxie d’un spectacle hollywoodien : ce pénultième épisode en est l’illustration qui voit nos trois héros à la recherche des Horcruxes - ces morceaux d’âme de Voldemort lui garantissant l’immortalité - aux fins de les détruire. L’atmosphère y est nettement privilégiée par rapport à une série de "scènes à faire", lorgnant parfois sur une esthétique burtonienne (on pense en particulier au "conte des trois frères", avec ses ombres décharnées).
Certes, la quête peut s’avérer un peu longue, voire fastidieuse pour le spectateur. Ainsi, le séjour des héros dans la forêt s’éternise un peu trop, habillé de couleurs froides idoines, mais les moments de pause narrative permettent d’approfondir le propos sur la relation qu’entretiennent Ron, Hermione et Harry, constamment cernés par des dangers, assaillis par des angoisses primaires, dont une lecture plus psychologique, voire psychanalytique, déboucherait sur une évocation de l’adolescence et de ses tourments, d’autant que, fait notable, les héros évoluent hors de leur matrice protectrice Poudlard. Les éléments du récit initiatique se cristallisent à travers cette configuration hautement symbolique.
Oui, vraiment, quittant les sentiers de l’enfance, les personnages n’ont vraiment plus le temps de rêvasser, chacun devant gérer ses propres affects : Harry se questionne sur sa légitimité dans la mission qu’il doit accomplir, Hermione hésite entre amitié et amour, Ron doit toujours gérer sa jalousie, une vieille affaire, puisqu’on se rappelle sa réaction lorsque sa très proche amie était sortie avec Viktor Krum, le champion de Quidditch.
La mue des personnages correspond à celle des acteurs même si, de ce point de vue, il existe une certaine hétérogénéité dramatique : délesté de certains artifices, le jeu d’Emma Watson confirme qu’on a affaire à une grande comédienne en devenir. En revanche, les propositions dramatiques de Daniel Radcliffe ne donnent pas l’idée d’une réelle progression.
La présence de plus en plus évidente des forces du Mal prépare à l’ultime épisode de la saga. L’ombre s’étend bien au-delà de nos trois jeunes pensionnaires, la mort du fidèle elfe Dobby, tué par l’impitoyable Bellatrix, alliée indéfectible de Voldemort, constituant l’acmé de cette impitoyable lutte entre deux mondes. L’univers coloré et merveilleux du premier film est vraiment loin. En revanche, le dénouement est très soigneusement préparé par ce divertissement tout à fait recommandable. Jérémy Gallet, 2020.
HARRY POTTER ET LES RELIQUES DE LA MORT 2E PARTIE
de David Yates, 2011, GB, 2h10, Couleurs
avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson…
RÉSUMÉ : Harry, Ron et Hermione ont détruit un des horcruxes, reliques qui renferment une part de l'âme de Voldemort, et appris l'importance des Reliques de la mort. Les jeunes sorciers partent à la recherche des autres horcruxes pour les anéantir. Cependant, leur ennemi de toujours, qui a récupéré la Baguette de Sureau, l'un des plus puissants artefacts magiques, prépare son assaut contre l'école de Poudlard. La confrontation est inévitable. C'est une véritable guerre qui s'engage entre les sorciers et les forces du Mal. Seule la destruction définitive de Voldemort pourra y mettre un terme. Mais cela impose à Harry et à ses amis de faire de douloureux sacrifices...
POINTS DE VUE : Sur les sept films de la saga Harry Potter, aucun n’est vraiment mauvais. Ce dernier volet fait partie des meilleurs, même s’il est conseillé d’être un familier de l’univers de J.K. Rowling pour comprendre les flash-back censés tout expliquer en deux temps, trois mouvements. Car l’affrontement final est ténébreux en diable. Tout le monde souffre et saigne dans des décors qui brûlent et s’écroulent : Poudlard encerclé par les forces du Mal. Les effets spéciaux sont superbes. Harry, Ron et Hermione courent partout. Voldemort éructe. Mais on n’a d’yeux que pour Severus Rogue, le professeur déchiré entre le Bien et le Mal, incarné par Alan Rickman, l’acteur le plus ensorcelant de la saga. Guillemette Odicino, 2022.
Le premier épisode des Reliques de la Mort cheminait lentement vers une conclusion, traversé par les sombres échos du troisième opus signé Cuarón, sorte de mètre étalon absolu du divertissement esthétique. Le dénouement de la saga Harry Potter, formidable succès cinématographique de la décennie 2000-2010, aura accompagné une génération qui aura grandi en même temps que ses héros, certains tourments de l’adolescence trouvant sur l’écran une projection symbolique et fictionnalisée. Il est vrai que les deux premiers longs métrages de l’épopée sont relégués dans de lointains souvenirs, puisqu’ils mettaient en scène une sorte de matrice protégée que le petit Harry rejoignait chaque année, notamment pour échapper aux Dursley, même si la menace de Voldemort planait indéniablement sur la communauté. Le prisonnier d’Azkaban fut le tournant, à partir duquel l’univers des magiciens s’assombrit, bifurquant vers une lutte finale certes attendue, mais spectaculaire, qui convoque ici la mémoire des spectateurs : ainsi, Ron, Hermione et Harry affrontent des araignées comme dans le deuxième épisode et ils retournent également dans la Chambre des Secrets, pour y chercher un crochet du Basilic.
Certes, le combat ultime entre les thuriféraires de Voldemort et les partisans de Harry advient dans une configuration manichéenne, mais on ne peut pas dire qu’il soit visuellement raté, les décors familiers aux spectateurs subissant une destruction impressionnante, qu’on peut bien sûr interpréter d’une manière symbolique, mais qui ne prend jamais le pas sur l’étonnement qu’on éprouve devant le déluge d’effets spéciaux en images de synthèse. À cet anéantissement, correspondent les morts de personnages importants, celle de Rogue en particulier, figure tragique par excellence qu’interprète le magistral Alan Rickman, sans doute le comédien le plus saillant de cette série. Il y est encore inoubliable dans ce film.
Le sacrifice d’Harry Potter pour sauver tous ses amis est bien sûr légitimé par la construction dramatique de l’histoire, mais il est aussi un adieu à l’adolescence que les adultes pourront aussi regarder en pensant à leurs propres souvenirs : le héros, porteur d’une barbe naissante, n’est plus l’enfant découvrant avec ses yeux ronds un univers nouveau, ignorant de la mort qui ici est partout. Le petit sorcier devenu grand n’a plus besoin de son lieu d’apprentissage - Poudlard - qui disparaît dans une séquence presque onirique : désormais rendu à son autonomie - parce qu’il doit s’en sortir afin d’atteindre l’âge de raison -, Harry est rejoint par ses autres compagnons, Ron et Hermione. Dans un ultime geste, il brise la baguette de Sureau dont il est le véritable maître pour dire son hostilité à un pouvoir absolu et tirer un trait sur le passé.
Et l’on n’oubliera pas de sitôt l’épilogue sur le quai de la gare de King’s Cross, où nos trois héros, littéralement transformés en parents, conduisent leurs enfants vers le train pour la célèbre école de sorciers. Passage de témoin, fin d’une époque : oui, décidément, cette saga aura aussi accompagné bien des expériences de jeunes spectateurs aujourd’hui adultes. Jérémy Gallet, 2020.
DÉTECTIVE DEE, LE MYSTÈRE DE LA FLAMME FANTÔME
de Tsui Hark, 2010, Chine/Hong Kong, 2h03, Couleurs
avec Andy Lau, Carina Lau, Li Bingbing…
RÉSUMÉ : 690, l'impératrice Wu Ze tian est sur le point d'accéder au pouvoir. Jusqu'à ce qu'une série de meurtres retarde le couronnement. Elle fait appel au détective Dee pour résoudre le mystère, qui, lui, voit le moyen de se faire pardonner de retour après 8 ans d'exil.
POINTS DE VUE : Nous voilà plongés à l'époque de la dynastie Tang, en 690. Le couronnement imminent de l'impératrice Wu Zetian attise les guerres de clans. Alors qu'un gigantesque bouddha à la gloire de la future régente est en cours d'édification, plusieurs personnes influentes meurent, dévorées soudain par un feu inexpliqué qui les réduit en tas de cendres fumantes. Craignant le complot, l'impératrice fait appel au détective Dee, qu'elle avait pourtant fait emprisonner quelques années auparavant...
On reconnaît la griffe Tsui Hark : toujours reliée au cinéma des origines, à la mécanique du film d'aventures à l'ancienne, dans un esprit proche du feuilleton. Le récit, ses rouages et son enchaînement vif d'épisodes, voilà ce qui lui importe. Il se déploie sans effets spectaculaires, y compris lors des combats chorégraphiés. Tsui Hark calligraphie l'action. Transforme le moindre accessoire — un rondin, une plaque de cuivre — en projectile poétique. Le film offre une étrange alchimie, mêlant faits historiques et magie extravagante.
La pléthore malicieuse de symboles et de subterfuges est telle qu'elle invite le spectateur à déceler un sens caché un peu partout. N'y a-t-il pas derrière le culte de la personnalité de l'impératrice et sa répression systématique une allusion à Mao Zedong ? Et cette tour monumentale, exploitée comme une arme de destruction massive, n'agit-elle pas comme ressemblance fortuite avec le World Trade Center et sa chute ? Délire d'interprétation, peut-être. Mais tout est bienvenu dans cet univers fabuleux. — Jacques Morice, 2012.
L’histoire se déroule en Chine, en l’an 690, durant la période trouble correspondant à l’ascension de l’impératrice Wu Ze Tian. Tout est prêt pour la cérémonie du couronnement et la petite ville de Chang-An est dans ses habits de fête. Mais une série de morts mystérieuses menace l’intronisation de Wu Ze Tian. L’impératrice décide alors de faire appel au seul homme capable de percer ce mystère : Le juge Ti, de retour après huit ans de prison pour insolence et insubordination...
Inspiré par un authentique détective de la Chine des Tang, le détective Dee – sous le nom du juge Ti – a fait l’objet d’une série de romans populaires écrits par l’auteur néerlandais Robert Van Gulik, diplomate et orientaliste du siècle dernier. Mais Tsui Hark n’adapte pas la prose de Van Gulik et préfère revenir aux sources chinoises de ce personnage à la fois réel et légendaire.
Tsui Hark est intimement lié à l’âge d’or du cinéma de Hong Kong dans les années 80, où il fut l’un des principaux artisans du renouveau et du foisonnement de la production locale, comme producteur et réalisateur de quelques-uns des plus géniaux films hongkongais modernes : Zu, les guerriers de la montagne magique, Green Snake, The Lovers, la saga Il était une fois en Chine ou The Blade. L’œuvre de Tsui Hark a souvent revisité l’histoire de la Chine, ses légendes et ses traditions, y compris cinématographiques (le « wu xia pian », film de sabre en costumes) en y injectant des trouvailles formelles, des effets spéciaux et des chorégraphies à la démesure de son imagination visionnaire, mais respectueuse d’un genre auquel King Hu avait apporté ses premières lettres de noblesse.
Après des réalisations moins réussies, Détective Dee : le mystère de la flamme fantôme renoue avec les meilleurs films de Tsui Hark, excitants visuellement, riches en émotions fortes et en idées délirantes (ici la combustion spontanée des victimes, les insectes de feu, la statue de bouddha géante, la ville inondée, la transfiguration de certains personnages...) Cette évocation romancée de la Dynastie Tang bénéficie de moyens gigantesques, la plupart des réalisateurs originaires de Hong Kong (Tsui Hark et John Woo en tête) mettant désormais en scène des superproductions destinées aux millions de spectateurs de la Chine continentale. Le tournage de Détective Dee : le mystère de la flamme fantôme s’est étalé sur deux ans, dans des décors immenses et avec des milliers de figurants. Mais Tsui Hark évite tout monumentalisme académique et conserve son style feuilletonesque et baroque, l’humour et l’esprit iconoclaste de ses œuvres de jeunesse. Magistral et ludique, surchargé d’images poétiques, ce « wu xia » à la frénésie virevoltante transpire le plaisir de filmer et nous montre un Tsui Hark en pleine forme. Le réalisateur a depuis signé un « prequel » aux aventures du détective Dee, Young Detective Dee: Rise of the Sea Dragon sur la jeunesse du héros – donc sans Andy Lau –. Olivier Père, 2014.
DÉTECTIVE DEE, LA LÉGENDE DU DRAGON DES MERS
de Tsui Hark, 2013, Hong Kong, 2h14, Couleurs
avec Mark Chao, Carina Lau, Chen Kun…
RÉSUMÉ : L’impératrice Wu règne sur la dynastie Tang aux côtés de l’empereur Gaozong. Elle envoie sa flotte vers l’empire Baekje afin de soutenir cet allié de longue date, envahi par le belliqueux empire Buyeo. Mais, juste après leur départ, les navires sont attaqués par une mystérieuse et gigantesque créature surgie du fond des mers. Les habitants de Luoyang, la capitale orientale, pensent qu’il s’agit d’un dragon des mers. Afin d’apaiser ce dernier, la courtisane Yin, « la plus belle fleur de Luoyang », est choisie pour être enfermée dans le Temple du Dragon des Mers ; en fait une punition qui lui est infligée pour avoir refusé les avances de riches notables. L’impératrice Wu, qui n’a guère de temps à accorder à ces superstitions, ordonne à Yuchi Zhenjin, le Commissaire en chef du Temple Suprême, d’enquêter sur l’acte de sabotage dont la flotte a été victime. Elle suspecte les sympathisants de l’empire Buyeo d’être à l’origine du complot. Par chance, Dee Renjie arrive à Luoyang le même jour pour prendre ses fonctions de magistrat au Temple suprême. Son poste englobe les fonctions de détective, juge et bourreau. Dans la rue, Dee et Yuchi assistent à la procession menant la courtisane Yin jusqu’au Temple du Dragon des Mers. Tous deux sont époustouflés par sa beauté. Sur le chemin du Temple Suprême, Dee aperçoit un groupe d’étrangers sortir d’une maison de thé, s’envelopper dans des vêtements de moines taoïstes, et se diriger vers un canal menant au temple... Ce n’est que le début des péripéties qui amèneront le Détective Dee à résoudre l’énigme de la Légende du Dragon des Mers...
POINTS DE VUE : Détective Dee II est la « préquelle » du film réalisé en 2010 – sous-titré « Le mystère de la flamme fantôme ». Il est censé relater la première enquête du célèbre détective chinois, à la fois personnage réel, figure mythologique et personnage de romans. Bien entendu, Tsui Hark prend ses distances aussi bien avec la réalité historique que les sources littéraires pour inventer des aventures fantastiques où seuls comptent le mouvement perpétuel, les prouesses physiques et intellectuelles et le grand spectacle. L’action se déroule en Chine en l’an 665, soit vingt-cinq ans avant le premier film. Le prologue montre la flotte de l’impératrice Wu détruite par un mystérieux monstre marin. L’impératrice charge le commissaire en chef du Temple suprême et le jeune Dee d’enquêter sur le désastre naval, ourdi par des conspirateurs visant à déstabiliser le pouvoir en place par divers sortilèges et complots de palais. Comme tous les travaux récents de Tsui Hark, Détective Dee II est une machine folle dans laquelle l’imagination du cinéaste visionnaire semble ne plus avoir aucune limite, dans une inflation déréglée de trouvailles visuelles et narratives sidérantes. On frise donc l’indigestion – Tsui Hark n’a jamais brillé par sa sobriété et sa rigueur. On peut regretter que son utilisation du numérique soit parfois approximative – c’est souvent le cas dans les blockbusters chinois – générant des images moins gracieuses que dans ses œuvres plus anciennes. Mais le film est traversé par des fulgurances poétiques où les couleurs, l’action et les volumes donnent naissance à des morceaux de bravoure capables de séduire et d’amuser le spectateur, de l’emporter vers des territoires de cinéma pur, entre expérimentation sans filet et divertissement forain – le film fut exploité en salles en 3D. Comparé à Spielberg à ses débuts dans les années 80, lorsqu’il révolutionna le cinéma de Hong Kong et le « wu xia pian » classique à coups d’effets spéciaux, Tsui Hark est un feuilletoniste et un savant fou, héritier d’Alexandre Dumas et d’Abel Gance – pour rester dans les équivalences occidentales. Olivier Père, 2017.
Le film se concentre sur un détective Dee plus jeune que celui chargé d’enquêter sur le mystère de la flamme fantôme dans le précédent opus. Cette suite fait donc office de prequel pour en apprendre davantage sur ce personnage attachant, roi de l’anticipation qui a toujours une longueur d’avance sur tout le monde.
Derrière la caméra on retrouve une fois de plus Tsui Hark qui confirme son sens inné de la mise en scène. À la différence du premier volet, il intègre ici un brin de fantastique dont les explications, ayant pour but d’offrir une légitime crédibilité aux monstres à l’écran, oscillent entre le rationnel et les légendes chinoises. Grâce à cet angle, on sent le réalisateur véritablement libéré de toute contrainte, pouvant s’en donner à cœur joie dans les effets de styles, les ralentis et autres prouesses visuelles.
En véritable cinéaste virtuose, il offre une réalisation impressionnante. Les chorégraphies virevoltantes jouissent d’une lisibilité infaillible, et sur une durée peut être un peu trop longue de 2h15 le spectacle est tout de même généreux, parfois grandiose. Tsui Hark s’amuse avec la 3D qui embellit ses images telles des peintures en mouvements à la fois imposante et poétique. Le mouvement toujours le mouvement, parfois chorégraphié à l’extrême, c’est vraiment sur ce point qu’on ressent la fascination du réalisateur qui cherche par tous les moyens à le capter et à le magnifier avec une facilité prodigieuse. Certaines productions américaines qui préfèrent un montage haché illisible pour créer artificiellement cette impression de mouvement devraient en prendre de la graine.
Très attaché au visuel et à la force de l’image, Tsui Hark n’en lâche pas moins son récit, tout à fait honorable même s’il est évident que certaines scènes sont prétextes à orchestrer des tourbillons chorégraphiés sans réel développement narratif. De plus la partie romance qui lorgne du côté de la belle et la bête est parfois traitée de manière trop accessoire.
L’excentricité, point commun de nombreuses réalisations asiatiques, est de la partie et prête plus à un sourire bienveillant qu’à la moquerie. Il en va de même pour les quelques invraisemblances voulues par le metteur en scène, toujours au profit de la beauté formelle.
Qu’importe ces légères faiblesses, ne boudons pas notre plaisir en présence d’un cinéaste hongkongais en pleine maîtrise de son art.
Détective Dee, parfait mélange d’un Sherlock Holmes et d’un expert en arts martiaux, est une sorte de réponse aux super-héros américains. La Chine trouve en lui son propre héros avec des aptitudes physiques et mentales proches des super-pouvoirs. Jean Dupuy, 2014.
DÉTECTIVE DEE, LA LÉGENDE DES ROIS CÉLESTES
de Tsui Hark, 2017, Chine, 2h12, Couleurs
avec Carina Lau, Feng Shaofeng, Mark Chao…
RÉSUMÉ : Une vague de crimes perpétrée par des guerriers masqués terrifie l’Empire de la dynastie des Tang. Alors que l’impératrice Wu est placée sous protection, le Détective Dee part sur les traces de ces mystérieux criminels. Sur le point de découvrir une conspiration sans précédent, Dee et ses compagnons vont se retrouver au cœur d’un conflit mortel où magie et complots s’allient pour faire tomber l’Empire...
POINT DE VUE : Depuis une trentaine d’années et la sortie de la spectaculaire épopée Il était une fois en Chine, Tsui Hark s’est imposé durablement comme l’un des grands maîtres du blockbuster chinois. Sa dernière grande fresque en date : les aventures de Dee, un détective très doué pour résoudre les mystères envers et contre tous, et surtout l’impératrice Wu qui, malgré les prouesses accomplies par le héros, peine toujours dans ce troisième volet à lui accorder toute sa confiance.
L’intrigue de ce nouvel opus commence là où s’était arrêté le second, La légende du dragon des mers, lui- même précédé du Mystère de la flamme fantôme. Cette fois-ci encore, des meurtres sanglants sont perpétrés, des sorciers démoniaques lancent des sorts à tire-larigot et une mystérieuse malédiction semble donner d’étranges hallucinations à la population de Chang-An, capitale de la dynastie Tang. Tout en essayant de maintenir ses rapports personnels et professionnels avec l’impératrice Wu, qui voit d’un mauvais œil que son époux lui ait remis Dragon Docile, une épée magique puissante, le détective Dee se lance sur les traces d’une conspiration démoniaque bien décidée à renverser l’Empire.
Rivale des États-Unis sur les plans économique et diplomatique, l’industrie cinématographique chinoise privilégie de plus en plus la production de blockbusters nationaux pour concurrencer le cinéma américain, qui continue d’attirer le peuple chinois dans les salles obscures. Détective Dee est l’un d’entre eux. Tsui Hark réussit, comme avec les deux premiers volumes de la saga, à emprunter aux codes conventionnels du blockbuster américain tout en s’en distinguant. En effet, La légende des Rois Célestes est autant un film d’action que d’époque (le récit se situe au Moyen Âge), autant un film fantastique qu’historique. C’est de cette capacité qu’ont son réalisateur et son scénariste d’aller puiser leurs idées narratives et esthétiques dans l’Histoire et la culture chinoise que le film tire à la fois toute sa beauté et toute sa dimension spectaculaire.
La trame peut paraître simple, mais elle fourmille de détails, de sous-intrigues croustillantes s’attachant à développer les personnalités des personnages et les relations qu’ils entretiennent. Voir l’étrange jeu de séduction entre Shatuo Zhong, le médecin ami de Dee, et Shuie Yue, une guerrière chevronnée au fort tempérament. Les effets spéciaux, bien plus foisonnants que dans les précédents films du cycle, sont impressionnants, les scènes de combats parfaitement réglées, le montage dynamique, qui donne un rythme soutenu au récit. L’ensemble s’accorde parfaitement dans une esthétique harmonieuse, dont le très beau relief de la 3D renforce l’appréciation aux yeux du spectateur. Et, malgré quelques longueurs, la recette n’a rien perdu de sa redoutable efficacité. Arthur Champilou, 2018.
BUFFY CONTRE LES VAMPIRES
Buffy the Vampire Slayer
Série de Joss Whedon, 1997, US, 7 saisons Couleurs
avec Sarah Michelle Gellar, Alyson Hannigan, James Masters…
RÉSUMÉ : Buffy Summers (Sarah Michelle Gellar) est une Tueuse de vampires issue d'une longue lignée d'Élues luttant contre les forces du mal, et notamment les vampires et les démons. À l'instar des précédentes Tueuses, elle bénéficie des enseignements de son Observateur, chargé de la guider et de l'entraîner.
POINT DE VUE : La plupart de celles et ceux qui regardaient la télé au début des années 2000 se remémorent parfois, non sans une certaine nostalgie, leurs soirées du week-end passées devant M6 et sa Trilogie du Samedi. Parmi les séries diffusées dans cette case horaire, l'une était particulièrement attendue. Un orgue, le hurlement d'un loup... et puis les riffs de guitares rageuses du groupe punk californien Nerf Herder. Buffy contre les vampires venait de commencer. La série de Joss Whedon (Avengers, Avengers : l'Ere d'Ultron) a marqué toute une génération de téléspectateurs, tant aux Etats-Unis qu'en France, au point d'acquérir le statut de série-culte. C’est l’occasion de dire pourquoi les sept saisons des aventures de Buffy Summers et de ses amis contre les suceurs de sang à grandes dents forment une œuvre majeure de l'histoire des séries.
Et si Buffy était l'une des plus grandes figures féminines de l'histoire ? Une affirmation volontairement provocatrice... mais loin d'être dénuée de fondements. La série a ainsi fait l'objet d'un nombre considérable de travaux universitaires, entraînant la publication d'une vingtaine de livres et de centaines d'articles étudiant ses thèmes. Parmi les plus traités, on retrouve le féminisme. Ce qui n'est pas étonnant pour Sandra Laugier, professeur de philosophie à l'université Paris 1 et auteur, en compagnie de Sylvie Allouche, de Philoséries : Buffy, Tueuse de vampires. « Buffy contre les vampires a eu certainement plus d'influence pour l'évolution du féminisme dans la société, mais aussi pour la réflexion féministe, que beaucoup de penseurs, car elle a atteint un public très large, nous explique-t-elle. Joss Whedon a réussi à retourner le stéréotype de la petite blonde au lycée, qui va soit avoir des aventures avec des garçons, soit, dans les films d'horreur, se faire massacrer à la deuxième scène. »
Il faut dire que dans Buffy, la « petite blonde » embroche les monstres à la chaîne, tels des morceaux de viande pour un barbecue, et sauve le monde plus de fois qu'à son tour. Et c'est ça qui fait la différence pour la chercheuse : « Beaucoup de séries ont eu un propos féministe, mais aucune ne l'a transmis avec une telle pédagogie et une telle ambition, celle de former les adolescents à penser qu'une femme pouvait être au moins aussi forte que les hommes. »
Buffy contre les Vampires, c'est aussi le récit initiatique d'un groupe d'ados, depuis le lycée jusqu'à leur entrée dans la vie active. Et à travers l'apparence du surnaturel, la série explore les nombreuses difficultés que peuvent rencontrer adolescents et jeunes adultes : une mère trop possessive, prenant place dans le corps de sa fille pour régenter sa vie ; un garçon changeant du tout au tout après sa première relation sexuelle avec une fille ; un beau-père apparemment au-dessus de tout soupçon se révélant être un monstre sans pitié (ou plutôt un robot tueur...) ; la dépendance à la drogue (représentée par une puissante magie autodestructrice) ; le manque de confiance en soi et le sentiment d'isolement...
À travers l'excellent épisode de la troisième saison où Buffy doit contrôler sa mère et son protecteur, revenus dans l'adolescence après l'ingestion de chocolats magiques, puis plus régulièrement au cours des deux dernières saisons, on comprend que le statut d'adulte n'est pas forcément plus enviable que celui d'ado. Car calmer ces bombes à hormones peut se révéler plus compliqué que d'empêcher l'Apocalypse... quand il ne faut pas concilier les deux. La difficulté de s'engager pleinement dans une relation sentimentale, subvenir aux besoins de son foyer, les relations amicales qui se distendent ou encore affronter la mort de proches : tant de problèmes que vos ados cerneront d'autant mieux après avoir regardé Buffy contre les vampires.
Buffy, la petite blonde complètement badass ; Willow, l'intello coincée qui se révèlera être une puissante sorcière ; Alex, le garçon dont les seuls pouvoirs (qui s'avèrent au final très utiles) sont de posséder une culture pop sans égal et un sens de l'humour à toute épreuve ; Giles, l'« Observateur » pince-sans-rire british ; mais aussi Angel et Spike, les vampires au grand cœur (et au charisme fracassant) ; Cordelia et Anya, les filles superficielles se retrouvant toujours au mauvais endroit, au mauvais moment... On se passionne pour leurs aventures d'autant plus facilement qu'un réel mimétisme s'opère au fur et à mesure des épisodes. Résultat, on finit toujours par s'identifier à l'un des membres du Scooby gang (le nom que les personnages ont donné à leur petite bande). « Buffy n'est au départ pas une personnalité extraordinaire, elle n'est pas spécialement douée pour quoique ce soit. La force de la série est de montrer qu'une personne tout à fait ordinaire peut devenir exceptionnelle », analyse Sandra Laugier. Et ça fonctionne clairement pour tous les personnages.
Il faut souligner qu'à l'époque de sa sortie, Buffy contre les vampires est une série novatrice dans sa construction. « La particularité est que chaque épisode posait ainsi des questions très profondes, tout en participant à un arc narratif annuel qui était également très structuré, ce qui n'était pas monnaie courante à l'époque. Chaque épisode a une vraie consistance, affirme quelque chose et pose un problème philosophique particulier tout en participant pleinement à l'évolution des personnages, et ceci de la première à la dernière saison », détaille la chercheuse.
S'il sera toujours mieux de revoir les sept saisons, vous pouvez aussi vous faire quelques plaisirs isolés avec des épisodes vraiment formidables. On vous conseille ainsi Alias Angelus (saison 1), centré sur la personnalité d'Angel, Un charme déroutant (saison 2) et Le Zéro pointé (saison 3), deux épisode où Alex se retrouve bien malgré lui au centre de l'intrigue, Superstar (saison 4), dans lequel un personnage complètement secondaire est, comme par magie, propulsé sur le devant de la scène, La Faille (saison 5), où l'on apprend plus sur Spike, ou encore Ecarts de conduite (saison 6) ou Sous influence (Saison 7)...
Enfin, quatre épisodes ne doivent sous aucun prétexte vous échapper : Un silence de mort (saison 4), dans lequel Joss Whedon coupe la parole aux personnage afin de répondre à certains critiques acerbes qui considéraient que la qualité des dialogues cachait la médiocrité de la série, Oprhelines (saison 5), dans lequel vous n'entendrez aucune musique, mis à part le générique, et qui se révèle d'une violence inouïe, Que le spectacle commence (saison 6), un épisode musical très bien réalisé, et À la dérive (saison 6), dans lequel on finit par se poser la question de la réalité des cinq saisons vues auparavant... Maxence Sorel, 2020.
BABY CART
de Kenji Misumi, 1972-1974, Japon, Six films, Couleurs
avec Tomisaburo Wakiyama, Minoru Ohki, Kayo Kobayashi…
RÉSUMÉ : Japon du XXVIIe siècle. L’histoire de Ogami Ittō, bourreau-samouraï du Shōgun de la région d'Edo. Les pouvoirs du samouraï sont jalousés par le clan Yagyu qui fomente un complot destiné à le renverser. Ogami Ittō est ainsi accusé de conspirer contre son maître. Déchu, il renonce à se faire seppuku et préfère la fuite. Sur les chemins chaotiques du Japon féodal, le rōnin (samouraï sans maître) erre en poussant le landau de son fils Daigorō âgé d'à peine trois ans. L'exil l'amène à proposer ses services comme tueur à gages pour survivre. De fil en sabre, Ogami Ittō cherche à retrouver son honneur perdu en se vengeant du clan qui l'a mis au ban de la société. Le mercenaire vagabond va pour cela affronter les guerriers les plus farouches du pays.
POINTS DE VUE : Sous la houlette du maître Kenji Misumi, cette saga ouvre de nouvelles perspectives au genre, en révolutionnant la mise en scène traditionnelle et en faisant souffler un petit air qui rappelle volontiers les westerns sergio-leoniens. Laurence Reymond, 2005.
Adaptation d'une BD japonaise, « le Loup et l'Enfant », cette série de six films est un sommet de l'art du « chambara », ou film de sabre nippon. Baby Cart est au genre ce que le western spaghetti a été au western classique : un spectacle baroque cultivant les excès. Vincent Ostria, 2005.
Les amateurs de manga et les cinéphiles amoureux du « chambara » (films de sabre japonais) connaissent par cœur la saga de Baby Cart, mettant en scène le bourreau déchu devenu tueur à gages Ogami Itto, combattant émérite qui possède la particularité de croiser le sabre en compagnie de son fils Daigoro, un adorable bambin mutique caché dans un landau truffé de gadgets meurtriers. On retrouve dans cette série de six films délirants (le mot est faible) l’univers des samouraïs revu et corrigé par l’esthétique de la bande dessinée et de la culture pop. Baby Cart est adapté du manga historique Lone Wolf and Cub (28 tomes) écrit par Kazuo Koike – qui portera les aventures de ses héros à l’écran – et dessiné par Goseki Kojima. Les fameux duels du « chambara » se transforment ici en ballets sadiques et surréalistes ponctués de geysers sanglants. Le meilleur de la série est le deuxième, « l’enfant massacre ». Sur sa route d’assassin errant, Ogami est approché par un fief vassal que le shôgunat veut placer sous son autorité directe, sous prétexte de troubles sociaux intérieurs. On lui explique que cette agitation a été provoquée par des espions shôgunaux pour justifier l’intervention du pouvoir central attiré par la richesse du fief : une teinture spéciale au secret de fabrication bien gardé. Pour cinq cents pièces d’or, Ogami doit retrouver, tuer l’artisan teinturier, gardien du secret, que trois mercenaires ont enlevé pour l’amener à Edo. Ce sont les sanguinaires frères Ben, Ten, Rai. Lancé à la poursuite du trio infernal, Le loup à l’enfant devra, en chemin, se méfier des terribles femmes ninjas aux ordres de la belle Saka Yagyû, chef d’une branche cadette du clan Yagyû de Retsudô...
Les trois frères, bretteurs redoutables (John Carpenter se souviendra d’eux dans Big Trouble in Little China), et les femmes ninjas demeurent les ennemis les plus inoubliables de toute la saga. Le film convoque tout un arsenal d’armes blanches, de techniques guerrières et met en scène une succession de mises à mort sanglantes et spectaculaire, avec des effets de montage et des cadres qui restituent à la perfection l’esthétique du manga. Le film est aussi remarquable par son approche émouvante de la relation entre un père et son fils. Le plus beau moment du film est sans doute celui où Daigoro prend soin de Ogami gravement blessé, et transporte de l’eau dans sa bouche pour désaltérer son père : une séquence muette d’une grande pureté, qui contraste avec les déchaînements de violence qui rythment le récit.
Derrière cette légendaire série à la frontière de la parodie se cache un grand cinéaste, Kenji Misumi (1921-1975), longtemps ignoré dans son propre pays mais dont la gloire posthume n’a cessé de grandir et ce n’est que justice. Misumi a réalisé une soixantaine de films, presque tous en costumes, et mérite de figurer au panthéon des cinéastes maniéristes qui bouleversèrent ou critiquèrent, dans les années 60 et 70, les données formelles du cinéma de genre, à l’instar de Mario Bava ou Sergio Leone en Italie. Si l’on pense évidemment aux outrances fétichistes du western italien en voyant les exploits des héros récurrents de Misumi (Baby Cart, mais aussi Kyochiro Nemuri ou Zatoichi, sabreur aveugle invincible qui décime ses adversaires grâce à l’acuité de son ouïe et de son odorat), l’art de Misumi ne se réduit pas à une subversion par la dérision et l’excès des codes du « chambara ». Misumi explore dans ses films les zones d’ombres de la culture traditionnelle de son pays. Ses héros sont souvent des bâtards, des psychopathes ou des exclus brisés par un traumatisme et murés dans la violence. Misumi, inventeur de formes stupéfiantes, cinéaste de genre d’une efficacité redoutable, est aussi un poète de la pulsion de Mort. À noter que l’acteur qui interprète Ogami Itto, Tomisaburô Wakayama, est le frère de Shintaro Katsu, le héros d’une autre saga mythique, celle de Zatoichi, dont Kenji Misumi signa les meilleurs épisodes, avant la lecture personnelle de Takeshi Kitano en 2003. Olivier Père, 2016.
SMALLVILLE
d’Alfred Gough et Miles Millar, 2001-2011, US, 10 saisons, 218 épisodes, Couleurs
avec Tom Welling, Allison Mack, Kristin Kreuk, Erica Durance…
RÉSUMÉ : Dans une petite bourgade qui a connu une pluie de météorites quelques années plus tôt, le jeune Clark Kent est élevé par une famille de fermiers. Contraint de cacher ses pouvoirs exceptionnels, il va apprendre à les utiliser pour aller au secours de son prochain.
Clark Kent doit faire face aux espoirs et aux désirs de tout adolescent, mais il doit aussi apprendre à maîtriser ses pouvoirs surnaturels dans une ville régulièrement hantée par les effets surnaturels des fragments de météorites. Le jeune Clark Kent doit faire face aux défis, aux espoirs et aux désirs de tout adolescent tout en apprenant à maîtriser ses pouvoirs.
Clark Kent tente de sauver la terre des dangers de la Kryptonite. Il devient aussi une star du football, Lana s’embarque dans une nouvelle aventure sentimentale, et l’intelligente Lois Lane arrive pour la première fois à Smallville…. Clark va devoir faire face aux Kryptoniens et accepter son destin...
Alors que Lex se rapproche de Lana, Clark se plonge, aux côtés de Chloé et de Jimmy Olson, dans de nouvelles enquêtes liées aux météorites et à son passé. De plus, il peut désormais compter sur un nouvel allié, l'Archer Vert... Kara, alias Supergirl, fait une arrivée remarquée dans la vie de Clark Kent. Lois Lane fait un bond dans sa carrière.
Après la mort de son ennemi de longue date Lex Luthor, Clark se trouve à un carrefour et est plus proche que jamais de devenir le super-héros de légende. En passant plus de temps dans la grande ville de Metropolis, Clark va relever de nouveaux défis et découvrir de nouveaux visages alors qu'il commence sa carrière au Daily Planet.
L'utilisation du Livre de Rao a permis de renvoyer tous les Kryptoniens vers leur nouvelle planète, tous, sauf Clark qui, en se faisant poignarder avec un lame de kryptonite bleue, n'a pas pas pu être téléporté sur cette nouvelle Krypton. Clark va devoir accepter sa destinée afin de sauver la Terre et ceux qu'il aime.
À PROPOS : Cela fait désormais onze ans que la série a tiré sa révérence. Relatant, le temps de dix saisons, la naissance de Clark Kent, alias Superman, la série a marqué le petit écran.
Tom Welling et Michael Rosenbaum, qui ont joué Clark Kent et Lex Luthor dans la série, continuent d'ailleurs d'entretenir la flamme. En juin dernier, ils annonçaient le lancement d'un podcast de rewatch de la série, baptisé Talkville. Dans le 3e épisode du podcast, Hothead, les créateurs de la série sont justement invité à livrer leurs souvenirs et anecdotes de production. Ils évoquent ainsi la pression des dirigeants de Warner Bros. Télévision de l'époque sur un ressort scénaristique très important : les parents adoptifs de Clark Kent, Jonathan et Martha Kent. Dans la série, les parents adoptifs et surtout terrestres du futur Superman constituaient un des aspects les plus importants dans la formation du personnage. Agriculteur, Jonathan (John Schneider) était un père attentionné mais ferme, doublé de hautes valeurs morales, très influent sur Clark pour l'aider à s'adapter à ses capacités, pour l'aider aussi à faire des choix éclairés et responsables. La relation entre les deux était très étroite. En somme, des parents bienveillants. Ce n'était, semble-t-il pas, du goût des Executives de Warner, qui souhaitaient au contraire des relations beaucoup plus antagonistes entre Clark et ses parents. « Au début de la production, avant la diffusion, nous avons eu ces réunions avec eux et certaines personnes disaient : « Ces parents devraient être beaucoup plus antagonistes, il [Clark] devrait détester ses parents ! Ça, c'était juste un autre cliché de drame pour adolescents, et nous avons vraiment eu du mal avec cette idée » raconte Miles Millar. Les dirigeants de Warner voulaient ainsi rester dans la mouvance des séries de l'époque, comme Dawson, That’s 70 Show, Les Frères Scott ou Newport Beach, qui présentaient des personnages entretenant des relations conflictuelles avec leurs parents. Rendons grâce aux showrunners de Smallville d'avoir su défendre leur position. AlloCiné.
THE WITCHER
créée par Laurent Schmidt Hissrich
avec Henry Cavill, Freya Allan, Anya Chalotra…
The Witcher n’est pas une série facile à comprendre. Ceux qui ne connaissent pas les livres ou les jeux vidéo risquent d’être perdus face à cet univers aux multiples royaumes et monstres.
Dans le même style que Game of Thrones, The Witcher est une série fantasy, adaptée de la saga littéraire polonaise Le Sorceleur d’Andrzej Sapkowski. L’histoire se déroule sur le Continent, un monde aux paysages variés : des déserts, des montagnes, des forêts, etc. On y trouve d’un côté les royaumes du Nord et de l’autre l’Empire Nilfgaardien, au sud. Les deux se retrouvent souvent en guerre. S’il fallait situer dans le temps The Witcher, on pourrait dire que l’action se passe à l’époque médiévale du fait de la présence de châteaux, de la monarchie, des paysans et des chevaliers en armure. Mais les choses ne sont pas si simples… La présence des monstres, des sorcières, des Nains et des Elfes remet tout en question. The Witcher est en réalité un multi univers dans lequel cohabitent les humains et les créatures surnaturelles.
Mais alors qu’est-ce qu’un Witcher ? Il s’agit d’un « sorceleur », un individu doté de capacités surnaturelles et formé dès son plus jeune âge pour combattre divers montres et créatures. Peu appréciés des humains, les Sorceleurs sont néanmoins prisés pour tuer les monstres qui pourraient déranger le quotidien. Parallèlement aux Witcher, on retrouve les Mages. Ce sont des sorciers et sorcières qui ont la capacité de créer des champs de force et de se téléporter. Leur puissance leur permet aussi de vieillir lentement. Les mages ont une forte influence sur le Continent et sont très souvent alliés des rois.
Le Continent, c’est donc un monde où la magie tient une place importante. La Confrérie des Sorciers réunit et gère les plus grands mages des Royaumes du Nord. Elle fait la différence entre la bonne et la mauvaise magie. Le Continent, c’est aussi un monde avec ses propres us et coutumes. Parmi eux, la loi de la surprise. Il s’agit d’une sorte de reconnaissance de dette lorsqu’une vie est sauvée par une autre. La récompense que vous recevez peut être tout ce que vous ne vous attendez pas à avoir dans votre vie. Par exemple, dans la saison 1, le Witcher Geralt de Riv se voit récompensé d’une enfant, à laquelle il se retrouve lié à vie.
Geralt de Riv, joué par Henry Cavill, est l’un des sorceleurs les plus célèbres. Connu sous le nom de White Wolf, c’est un personnage au caractère difficile mais attachant. Son but : gagner le maximum d’argent en tuant des monstres. C’est un tueur à gages très à cheval sur la morale, il pèse toujours le pour et le contre avant d’accepter ou non un contrat. Yennefer de Vendergerd, jouée par Anya Chalotra, est une sorcière influente. Son enfance fut difficiles du fait de son handicap physique (bossue et défigurée) et de ses origines à moitié elfique. Elle a été vendue à Tissaia (Myanna Buring), rectrice, pour quelques sous par sa famille. Nous voyons aussi beaucoup Triss Merigold (Anna Shaffer), une puissante sorcière conseillère du roi. Ciri, jouée par Frey Allan, est la princesse Cirilla de Cintra, un des royaumes du Nord. Elle a été élevée par sa grand-mère, la reine Calanthe (Jodhi May), à la suite du décès de sa mère. Traquée par les Nilfgaardiens, elle est obligée de s’enfuir. Pour survivre, elle doit retrouver Geralt, à qui elle est liée par cette fameuse loi de la surprise. On retrouve également Jaskier (Joey Batey), le barde qui ajoute une note d’humour à la série. Il s’impose en tant que compagnon de voyage et meilleur ami de Geralt.
The Witcher n’est définitivement pas une série de fantasy politique. Si des enjeux diplomatiques entre clans et cités guident les pas des personnages, l’accent est surtout mis sur un tout autre ingrédient clé : l’aventure. C’est une épopée, l’une de ces quêtes initiatiques qui mènent les héros et les héroïnes aux quatre coins du monde. Sur leur chemin, se dressent des ennemis, des monstres, des retournements de situation. Il y a des points d’étape, où les personnages peuvent s’arrêter, souffler, assimiler ce qu’ils ont appris dans leur quête, puis ils repartent à la découverte du monde, pour trouver des réponses ou fuir. De l’aventure, beaucoup d’aventure, et c’est grisant.
L’HISTOIRE DE JEFFREY DAHMER
Dahmer
de Ryan Murphy et Ian Brennan, 2022, US, 10 épisodes, Couleurs
avec Evan Peters, Richard Jenkins, Penelope Ann Miller…
RÉSUMÉ : Le parcours du cannibale de Milwaukee, l’un des tueurs en série les plus connus aux Etats-Unis : de son enfance difficile à sa condamnation en 1992, et comment l’incompétence et l’apathie de la police lui ont permis de poursuivre ses crimes durant plusieurs années.
POINT DE VUE : Après Ted Bundy : Autoportrait d’un tueur, Netflix remet le couvert avec une autre « pop star » du meurtre en série, Jeffrey Dahmer, alias « le cannibale de Milwaukee », qui assassina dix-sept jeunes hommes entre 1978 et 1991. Et c’est Ryan Murphy, spécialiste maison de l’horreur, qui se charge du dossier. Première (bonne) surprise : Murphy et son comparse Ian Brennan mettent la pédale douce sur le gore. Il y avait pourtant matière : viols, démembrements, nécrophilie, stockage et ingestion d’organes... Les marottes de Dahmer sont particulièrement nauséabondes, et on sait gré aux scénaristes de nous épargner les scènes trop réalistes.
Outre cette petite attention, la série part plutôt du bon pied, emboîtant le pas à la très réussie The Assassination of Gianni Versace, où la cavale sanglante du personnage servait de prétexte à un terrible tour de l’homophobie en Amérique. En s’attachant d’abord à la voisine du tueur, qui tente d’alerter la police sur son comportement suspect mais n’obtient jamais gain de cause car la majorité des victimes sont gays et afro-américaines, Dahmer met le doigt sur les discriminations systémiques. On pense alors que la série va tenter de comprendre comment la société engendre ses propres monstres, et nous éviter le portrait malsain du tueur, un genre dont on a soupé jusqu’à l’overdose.
Mais dès l’épisode suivant, les flash-back qui ponctuent l’interrogatoire de Dahmer enclenchent un profil psychologique plus attendu – la dépression post-partum de maman, la maîtresse de papa et le goût du petit Jeff pour les cours de dissection. Grâce à l’interprétation très douce d’Evan Peters, pilier du « Murphyverse », la série tente de rendre au monstre un peu d’humanité... avant de changer de point de vue dans l’épisode 6, entièrement consacré au parcours d’une de ses victimes. Puis de s’abîmer dans un interminable post-scriptum sur les suites de l’arrestation – procès, médiatisation, effroi des géniteurs et deuil des familles... À la clé, une série fourre-tout qui multiplie les hypothèses sans choisir de point de vue : « C’est inconfortable, mais on ne saura jamais pourquoi il a fait ça. » La vérité, c’est qu’après dix heures passées en compagnie d’un cannibale dépressif sur fond de photo caca d’oie, on s’en fiche un peu. On a surtout envie d’aller prendre l’air. Caroline Veunac, Télérama, 2022.
En plus de l'interprétation saisissante d’Evan Peters, la série Dahmer propose un vrai point de vue. Entre drame et thriller horrifique, elle met en lumière les inégalités au sein de cette affaire morbide. Jeffrey Dahmer résidait au cœur d’un quartier pauvre du Wisconsin avec une importante communauté noire et hispanique. Pour la police, il était inconcevable qu’un homme blanc et solitaire soit l’auteur de tels crimes.
Les nombreux signalements des voisins n’ont jamais été pris au sérieux. Beaucoup n’ont pas osé porter plainte par peur des représailles. De plus, le tueur en série s’en prenait à des catégories bien particulières. Toutes ses victimes étaient homosexuelles et la plupart étaient issues de minorités ethniques. De ce fait, les disparitions n’ont jamais réellement inquiété les autorités. Damer : Monstre - L’histoire de Jeffrey Dahmer raconte le drame à travers le regard du principal concerné, mais aussi celui des victimes collatérales. L’occasion de mettre en exergue les failles d’un système juridique américain à géométrie variable. Un sujet encore d’actualité. Thomas Desroches, AlloCiné, 2022.
IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE
Wong Fei Hung
de Tsui Hark, 1991, Chine, 2h08, Couleurs
avec Jet Li, Jacky Cheung, Rosamund Kwan…
RÉSUMÉ : A la fin du XIXe siècle à Fa Shan, en Chine du Sud. Tandis que les puissances coloniales européennes et américaines s'y affrontent pour le contrôle du commerce maritime, les premiers signes d'occidentalisation commencent à percer dans la société chinoise. Dans ce climat politique tendu, Wong Fei-hung, docteur en médecine chinoise, maître de kung-fu et chef instructeur de l'armée du Dragon noir, est chargé par le commandant Lau de maintenir l'ordre durant les guerres qui éloignent ses troupes de la région, afin de sauvegarder ce qui reste de paix et de stabilité.
POINT DE VUE : La saga Il était une fois en Chine (qui compte six épisodes et des avatars divers, mais les deux premiers titres sont les plus parfaits de la série) met en scène Wong Fei Hung, figure historique cantonaise de la fin du XIXème siècle, médecin, directeur d’une école d’arts martiaux, politicien et chef de guerre. Les faits réels ont vite cédé la place à la légende, relayée dès les années 40 par une centaine de films qui transformèrent le docteur Wong en Robin des bois chinois. En 1991 Tsui Hark, le jeune prodige du cinéma de Hong Kong qui avait déjà révolutionné le « wu xia pian » traditionnel avec le magnifique Zu, les guerriers de la montagne magique en 1983, décide de donner sa propre vision de ce personnage mythique qui syncrétise toutes les contradictions de son pays. Dans le premier épisode, le docteur Wong et ses disciples combattent d’odieux esclavagistes américains qui exploitent le peuple chinois, ainsi qu’un maître kung fu renégat. Les commerçants et diplomates occidentaux montrés comme une menace pour l’intégrité morale et culturelle chinoise pouvaient faire passer le docteur Wong pour un héros nationaliste. Tsui Hark rectifie le tir dans le second volet de la saga, La Secte du lotus blanc en 1992, où l’ennemi est une redoutable secte qui assassine les ressortissants étrangers et les chinois accusés d’occidentalisation. Docteur Wong est avant tout un idéaliste, naïf et maladroit (sauf dans l’action), plongé dans la tourmente de l’Histoire et du progrès, témoin privilégié de la naissance d’une Chine nouvelle. Il va sans dire que pour Tsui Hark la vérité historique est soumise aux lois de l’invention et du romanesque, et se transforme en une succession effrénée d’épisodes comiques et mélodramatiques. Quant aux fameux combats filmés comme des ballets et chorégraphiés par le légendaire Yuen Woo-Ping, ils se chargent d’une valeur allégorique et accélèrent le cours du récit, quittant le stade de la digression pour constituer le cœur du travail narratif de Hark. Le film est également porté par le charisme et la grâce incroyables de Jet Li, parfait dans le rôle de Wong Fei Hung et digne successeur de Bruce Lee et de Jackie Chan au firmament du star system asiatique. Relayée par des trucages artisanaux, son élasticité physique ne connaît plus de limites, dans des chorégraphies dégagées des lois de l’apesanteur si tourbillonnantes qu’elles s’approchent d’une forme d’art visuel non figuratif. Le cinéma de Tsui Hark se fond alors avec son sujet, l’Histoire de la Chine, et passe de quelque chose de presque primitif à la modernité la plus expérimentale. Il était une fois en Chine, c’est finalement la rencontre vertigineuse entre Alexandre Dumas, Mack Sennett et la tradition du film martial, la fusion (voire la confusion !) sublime d’éléments disparates qui transforme une fresque chinoise jusqu’au bout des ongles en chef-d’œuvre universel. Olivier Père, 2015.
SUPERNATURAL
de Eric Kripke, 2005, US, 327 épisodes, Couleurs
avec Jared Padalecki, Jensen Ackles, Misha Collins…
RÉSUMÉ : Deux frères, Sam et Dean Winchester, chasseurs de créatures surnaturelles, sillonnent les États-Unis à bord d'une Chevrolet Impala noire de 1967 et enquêtent sur des phénomènes paranormaux (souvent issus du folklore, des superstitions, mythes et légendes urbaines américaines, mais aussi des monstres surnaturels tels que les fantômes, loups-garous, démons, vampires, goules…).
Ils espèrent par la même occasion mettre la main sur le démon responsable de la mort de leur mère, 22 ans plus tôt, qu'ils appellent "le démon aux yeux jaunes".
De manière générale, chaque épisode se déroule dans un lieu différent du pays et correspond à une enquête sur un phénomène paranormal.
POINT DE VUE : Depuis 15 saisons, Sam et Dean Winchester (Jared Padalecki et Jensen Ackles) combattent les monstres, démons et autres engeances surnaturelles en parcourant les États-Unis à bord de leur Impala. Mais cette fois, ils sont confrontés à Chuck alias Dieu (Rob Benedict) lui-même. Celui-ci en a assez d’être défié par les Winchester qui refusent de se soumettre au destin qu’il leur a écrit ; il prend la décision de déclencher l’Apocalypse, en commençant par libérer des enfers toutes les créatures que les frères ont combattues jusqu’ici. Avec l’ange Castiel (Misha Collins) et le fils de Lucifer, Jack (Alexander Calvert), les Winchester vont tenter d’empêcher la fin du monde – pour la dernière fois.
Supernatural, c’est fini. Créée par Eric Kripke en 2005, la série qui montrait au départ deux frères affrontant un monstre par épisode est devenue, au fil des saisons, une épopée surnaturelle confrontant ses deux héros à des anges, des démons et finalement à Dieu. Sensée s’achever avec le final de la saison 5 imaginé par Kripke, Supernatural s’est poursuivie pendant dix saisons supplémentaires, parfois moins réussies, mais le public est resté fidèle. Pourtant tout a une fin, même l’odyssée des Winchester qui se conclue avec une quinzième saison.
Crise sanitaire oblige, le tournage de cette dernière saison a été interrompu durant plusieurs semaines et cette pause n’a pas été sans conséquences sur la série. Même s’il n’est pas évident de déterminer à quel point, il est clair que l’histoire elle-même est divisée en deux parties distinctes : la résolution du cliffhanger de la saison précédente puis l’affrontement avec Dieu. Bien que cette scission se ressente clairement dans le rythme du récit, les scénaristes sont parvenus à construire leur saison entre retour aux sources, conclusion définitive et clins d’œil aux fans. C’est notamment le cas dans la première salve d’épisodes, sorte de gigantesque reboot qui ramène les monstres, démons, wendigos combattus par les Winchester tout au long des 14 saisons précédentes – fantôme du clown / tueur en série John Wayne Gacy et Dame blanche du premier épisode inclus.
Cette ultime saison permet aussi de rappeler la majorité des personnages côtoyés par nos deux héros au fil de leur périple – certains le temps d’une séquence anecdotique, d’autres plus longuement et avec un vrai rôle dans l’histoire. Sans être exhaustif, citons la sorcière Rowena (Ruth Connell), Billie alias la Mort (Lisa Berry), Lucifer (le toujours génial Mark Pellegrino), Bobby (Jim Beaver), Eileen (Shoshannah Stern), Charlie (Felicia Day), Donna (Briana Buckmaster) ou même John Winchester (Jeffrey Dean Morgan).
Venons-en à cette deuxième partie totalement feuilletonante, qui oppose les Winchester (accompagnés de Castiel et Jack) à Dieu, d’abord dans un duel à distance puis dans un affrontement direct. Une lutte d’autant plus inégale que Dieu est par définition omnipotent et omniscient, ce qui lui permet non seulement d’agir à sa guise mais aussi d’anticiper la moindre décision des deux frères. Ceux-ci vont toutefois trouver des alliés inattendus pour tenter de contrecarrer le plan divin apocalyptique.
Sans dévoiler l’essentiel, disons au moins que ce final prend la forme d’une double conclusion. L’avant-dernier épisode reprend les arcs narratifs précédemment ouverts (notamment après la mort brutale d’un personnage) , met un point final à l’intrigue de la saison, montre la scène d’apothéose qu’on attendait tous, et se termine sur un montage des meilleurs moments de la série. Bref, une conclusion parfaite aux aventures de Sam et Dean.
Pourtant, la vraie fin survient dans le vingtième épisode, et celle-ci a déconcerté une partie des fans. Supernatural s’achève en effet sur un épisode indépendant du reste, presque banal dans son déroulement si ce n’était sa conclusion. Intitulé Carry on, ce dernier épisode revient aux racines de Supernatural, rappelle ce que Eric Kripke avait imaginé lors de la première saison : deux frères combattant des entités surnaturelles comme leur père avant eux. On retrouve le format initial du « monstre de la semaine » avec Sam et Dean comme seuls protagonistes – exceptée une brève apparition de Bobby. Et au cœur de ce final, un rebondissement qui pourrait sembler trivial dans la manière dont il se produit mais qui, quand on y réfléchit, est en fait cohérent et peut-être même plus logique que la scène épique que tout le monde imaginait en guise de fin.
Ce dénouement n’est pas parfait : il reste quelques questions en suspens, on regrette l’absence d’un personnage emblématique comme Castiel et une scène en particulier apparaît extrêmement mal faite (on ne peut pas dire laquelle mais vous saurez quand vous la verrez…). Qu’importe : l’émotion est bien présente, on sent que Padalecki et Ackles y ont mis tout leur cœur et la larme n’est pas loin, ce qui suffit à compenser les défauts de ce final. En outre, que l’on ait suivi les Winchester depuis le début ou que l’on ait jeté l’éponge en cours de route, que l’on ait vu les 326 (!!) épisodes ou seulement une partie, c’est une conclusion que chacun peut comprendre et apprécier. Et ainsi s’achève Supernatural : une longue scène suit les deux frères, au son de l’emblématique chanson du groupe Kansas, Carry On My Wayward Son…
Supernatural nous a accompagnés et divertis pendant 15 ans. Malgré des saisons moins réussies et des schémas narratifs parfois redondants, elle a toujours récompensé son public avec ses personnages charismatiques, son duo de frères si attachants, des épisodes mémorables et en particulier tous ceux jouant sur la métafiction (comme l’inoubliable The French Mistake.) Supernatural se conclue de manière émouvante, achève ce périple surnaturel en offrant à Sam, Dean et leur public un adieu satisfaisant malgré les embûches de la pandémie. Fanny Lombard Allegra, 2021.
GASTON PHÉBUS
Adaptation et dialogues de Jacques Armand et Bernard Borderie
avec Jean-Claude Drouot, Nicole Garcia…
RÉSUMÉ : Alors que Gaston Ier, comte de Foix et souverain de Béarn, se désespère d’avoir un héritier, deux fils lui naissent en même temps, un, illégitime, et l’autre, légitime. Le premier, Corbeyran, est mis au monde par sa première femme, répudiée et retirée dans un couvent, mais avec qui il a conservé des relations. Le second, Gaston II, né de sa seconde épouse, laissera à son tour un héritier : Gaston III, dit Gaston Phébus.
En 1343, à peine âgé de treize ans, Gaston Phébus succède à son père, tué dans la guerre contre les Sarrasins. Depuis sa plus tendre enfance, son cœur brûle pour Myriam, sa compagne de jeux, et ni l’un ni l’autre n’envisagent d’autre union que celle qui scellera l’amitié de leur jeune âge. Arrivés à l’âge adulte, ils vont se marier même si l’entourage de Gaston est défavorable à cette union entre le comte de Foix et une simple roturière. Appelé à Paris par le roi Philippe VI, Gaston Phébus et sa troupe vont donc à la capitale afin de battre les anglais. Agnès de Navarre, qui vit à la cour, est subjugué par la beauté de Gaston, et veut faire de lui son amant. Son frère, Charles de Navarre, spécialiste en magie noire et en poison, va aider sa sœur dans son entreprise...
POINTS DE VUE : Gaston Phébus était un héros oublié. Ce comte de Foix et souvent de Béarn est sorti de la poussière des archives familiales grâce à la curiosité d’un de ses lointains descendants, Gaston de Béarn. Celui-ci, à partir de documents retrouvés, écrivit en effet, avec son épouse Myriam, un volumineux roman sur le dernier souverain de Béarn, véritable héros de légende. Le chroniqueur Jean Froissart écrivait de lui « J’ai vu bien des chevaliers, des rois, des princes. Mais jamais je n’en vis qui fut de si magnifique stature et de si merveilleuse prestance. En toutes choses, il était parfait. Il aimait ce qu’il devait aimer, haïssait ce qu’il devait haïr. Mais dans son courroux nul n’avait pardon. » La télévision s’est emparée de ce personnage hors série, Bernard Borderie a réalisé six épisodes d’une heure pour ressusciter celui qu’on avait surnommé « le Lion des Pyrénées ». C’est Jean-Claude Drouot qui campe ce flamboyant Gaston Phébus, et Nicole Garcia qui incarne la redoutable Agnès de Navarre, celle que Phébus n’épousera que pour mieux assouvir une vengeance qui ne finira qu’avec sa propre vie. 1978.
Le Lion des Pyrénées en question, c’est Gaston de Foix, troisième du nom, qu’on avait surnommé Phébus parce qu’il était beau comme le jour. Il tint un rôle important mais incertain dans le conflit entre Armagnacs et Bourguignons, entre la France et l’Angleterre. Il retint prisonnier et rançonna le comte d’Armagnac, ce qui fut favorable à sa trésorerie. Il servit le roi Charles V et légua ses biens à la couronne. Gaston fut un grand seigneur et un courageux soldat, un protecteur des lettres et des beaux-arts par-dessus le marché. Le feuilleton raconte que sa femme Myriam fut empoisonnée par Agnès de Navarre, sœur de Charles le Mauvais, et que cette Agnès était folle du beau Gaston… qui voulait se venger et se vengea en effet - mais n’en fut pas plus heureux pour cela. 1978.
Une histoire de vengeance pleine de « bruit et de fureur », dans la grande tradition des films de cape et d’épée. Un western à la française, qu’il faut regarder avec des yeux d’enfant. Et aussi une pensée émue pour Bernard Borderie, récemment disparu. Juin 1978.
Un bon feuilleton français. Bernard Borderie a fait plusieurs films de cape et d'épée et il sait faire ce genre de films. L'histoire, est malgré quelques invraisemblances, assez bien composée.
Jean-Claude Drouot mène avec envie cette histoire qui doit lui rappeler son "Thierry la fronde". Il a tendance à hurler un peu trop souvent comme il l'avait déjà beaucoup fait dans "Les roses de Manara".
A ses côtés, une pléiade de jolies comédiennes: Nicole Garcia (avant de faire une grande carrière cinématographique), France Dougnac, Pascale Rivault, Mireille Audibert...
Que vient faire cet immense comédien qu'était Bernard-Pierre Donnadieu pour ne jouer qu'une trentaine de secondes ? Alain B.
LES VAMPIRES
France 1915-1916 de Louis Feuillade
avec : Musidora, Édouard Mathé…
RÉSUMÉ
Malgré le titre, il ne s’agit pas d’une histoire fantastique et le mot de vampire, dont l’anagramme donne le nom de leur égérie, n’est qu’une appellation que se sont donnée de redoutables malfaiteurs en lutte contre la société. Avec beaucoup de péripéties et de récits annexes, l’histoire peut se résumer à l’enquête menée par le journaliste Philippe Guérande pour démasquer la bande, responsable d’innombrables forfaits et toujours impunie malgré les efforts de la police. Dictionnaire des films, Larousse, 1995.
POINT DE VUE
Alors directeur chez Gaumont, Feuillade mit en chantier les Vampires pour contrer la sortie chez Pathé des Mystères de New York. Ici, plus encore que dans Fantômas dont le scénario reposait sur les ouvrages d’Allain et Souvestre, Feuillade laisse libre cours à son imagination. Et comme il est pressé, il finit par improviser au fur et à mesure du tournage et le texte destiné au film paraît chaque jour dans le Matin, en même temps que les épisodes sont distribués dans les salles à raison d’un par semaine. C’est toute la technique du feuilleton, qui, après la presse, fait étape au cinéma avant de nourrir la future télévision.
On est donc en plein divertissement populaire, et la critique dans son ensemble manifesta sa désapprobation et même son dédain, y compris Louis Delluc ; mais, sans parler du succès public, les surréalistes, eux, s’enthousiasmèrent pour le brio, le merveilleux et la poésie d’une œuvre qui faisait fi de tous les schémas savants. Il faut noter dépendant l’étonnant décalage, pour ne pas dire plus, entre ce monde abstrait à force de ne mettre en scène que des intrigues de fiction pure opposant des personnages totalement stéréotypés, et la réalité de la guerre où le pays était alors plongé.
Paradoxalement, les Vampires ressemble pourtant à un grand documentaire. Quand on le voir aujourd’hui, ce qui frappe, en effet, c’est la minutie du décor, des costumes, la présence des extérieurs ; et comme la mise en scène est d’une sobriété très controlée, avec peu d’effets, toute latitude nous est laissée pour apprécier ce portrait direct de la réalité quotidienne de l’environnement en 1915_1916. Un peu comme les peintres de la Renaissance nous renseignent mieux sur la vie de leur temps que sur les scènes bibliques qu’ils étaient censés peindre…
Et puis, il y a Musidora, cette « Dixième Muse » dont parlait Aragon, moulée dans un maillot de soie noire dont l’effet est renforcé par une cagoule identique. Elle est la première vamp et c’est normal, puisque le mot vient de vampire… Par la grâce de ce personnage d’aventurière fatale dont nul n’oubliera l’image, elle est devenue un mythe et justifie ainsi, in fine, la connotation fantastique du titre. Jean-Marie Carzou, réalisateur, 1995.
L’ATTAQUE DES TITANS
L’histoire tourne autour du personnage d’Eren Jäger dans un monde où l’humanité vit entourée d’immenses murs pour se protéger de créatures gigantesques, les Titans. Le récit raconte le combat mené par l’humanité pour reconquérir son territoire, en éclaircissant les mystères liés à l’apparition des Titans, du monde extérieur et des évènements précédant la construction des murs.
La série est un succès commercial à l’échelle mondiale, avec un tirage total s’élevant à plus de 100 millions d’exemplaires en décembre 2019. L’adaptation en anime a notamment permis une large popularisation de l’œuvre à l’international. L’accueil critique est également positif, de par l’atmosphère et le développement du récit, récompensé par de nombreux prix prestigieux, bien que l'interprétation politique de la série soit sujette à controverse.
Trame
Plus de cent ans avant le début de l’histoire, des créatures géantes humanoïdes nommées Titans sont subitement apparues et ont presque anéanti l’humanité. Ces créatures géantes font habituellement entre trois et quinze mètres de haut, avec quelques exceptions comme le Titan colossal qui en mesure soixante. Il semblerait que les Titans dévorent les humains par instinct et uniquement pour les tuer : en effet, ils ne possèdent pas de système digestif et n’ont pas besoin de se nourrir car ils puisent leur énergie dans la lumière du soleil. Néanmoins, certains sont actifs durant la nuit. Les Titans ont la peau dure, des capacités régénératrices et ne peuvent être tués que par une incision profonde à la base de la nuque.
Pour se protéger, l’humanité vit entourée par un système de trois murs concentriques de cinquante mètres de haut, distants les uns des autres d’une centaine de kilomètres . Le mur extérieur est le Mur Maria, l’intermédiaire est le Mur Rose et le central est le Mur Sina. Afin de pouvoir se défendre plus facilement et efficacement, ainsi que pour réduire les coûts nécessaires à la défense, des bastions ont été fabriqués. Ils permettent aux membres d’une garnison d’attirer les Titans à un même endroit du mur afin de les attaquer à l’aide de canons. Grâce au relief et l’altitude grandissants à l’approche du mur central, de nombreux cours d’eau irriguent la zone dans son intégralité, ce qui permet à l’humanité de ne manquer ni de ressources minérales ni de gaz naturel . Ces trois murs sont considérés comme sacrés par certains cultes, considérés comme trois déesses qui protègent les humains.
La lutte contre les Titans est organisée autour d’une armée répartie en trois branches. Le bataillon d’exploration effectue des expéditions de reconquête de territoire à l’extérieur des murs, là où se trouvent les Titans. Du fait du faible taux de réussite de ces missions, l'existence du bataillon d'exploration est souvent déplorée par le peuple. La garnison s’occupe de la protection des murs et des habitants des villes. Enfin, les brigades spéciales opèrent sous l’autorité royale dans des conditions de vie prospères et doivent maintenir la paix à l'intérieur des murs. Seules les dix premières recrues de chaque brigade d'entraînement reçoivent le privilège de demander une affectation au sein des brigades spéciales. Afin d’accéder au point faible des Titans, les soldats utilisent des lames et les équipements de manœuvres tridimensionnelles, leur permettant de se déplacer rapidement dans un espace à trois dimensions. Bien qu’elles permettent une grande mobilité à un utilisateur expérimenté, elles entraînent un grand risque de surcharge des muscles et nécessitent donc une condition physique particulière et un sens de l’équilibre maîtrisé. Un entraînement dur est demandé aux soldats.
Il est révélé plus tard que les Titans sont apparus il y a environ 2000 ans, lorsqu'une jeune femme nommée Ymir Fritz est devenue le premier Titan de l'histoire en obtenant le pouvoir du Titan originel. Quand Ymir est morte, son pouvoir a été divisé en neuf parties, donnant naissance à neuf Titans avec des capacités spéciales appelées Titans primordiaux, qui possèdent chacun un pouvoir du Titan qui peut être transféré entre les membres du peuple d'Ymir ou peuple eldien. Grâce à ce pouvoir, ce peuple a conquis le monde pour devenir le grand empire d'Eldia. La famille Fritz - avec le pouvoir du Titan fondateur entre ses mains - a gouverné le monde jusqu'à l'époque du 145e roi d'Eldia nommé Karl Fritz, qui, après la grande guerre des Titans, a décidé de mettre fin à l'empire d'Eldia, conduisant nombre de ses habitants vers une île appelée Paradis. Cependant, tous les Eldiens n'ont pas pu — ou n'ont pas voulu — aller avec lui, et beaucoup sont restés sur le continent et ont été maîtrisés par l'empire nouvellement créé de Mahr qui les a placés dans des ghettos en les traitant comme des êtes inférieurs du fait des crimes passés de leur peuple ou comme des armes de destruction massive pendant les guerres en les transformant en Titans.
En atteignant Paradis, le roi Fritz utilisa le pouvoir du Titan originel — également connu sous le terme Axe — afin de construire trois grands murs à partir de Titans de 50 mètres et il a effacé la mémoire de la grande majorité de ses habitants. Toutes ces actions ont été menées dans le but supposé de les protéger des maux extérieurs et de les empêcher de quitter les murs, en leur faisant croire qu'au-delà d'eux, il n'y avait que des Titans. Fritz est resté le roi des murs et a changé le nom de famille de sa famille en Reiss, dont les descendants ont régné dans l'ombre en utilisant le pouvoir du Titan originel.
L’histoire est principalement centrée sur les personnages d’Eren Jäger, Mikasa Ackerman, Armin Arlelt puis Reiner Braun. De nombreux personnages tiennent aussi un rôle important, comme les membres de la 104e brigade d’entraînement, du bataillon d’exploration ou encore de la garnison. Certains Titans tiennent également un rôle important dans la série, comme le Titan colossal, le Titan bestial, le Titan féminin ou le Titan cuirassé. (Wikipédia)
NYPD BLUE
Plus lointains et peut-être un peu désuets, les détectives de « The Streets of San Francisco » nous proposaient déjà une vision moins idyllique et plus réaliste de la Californie... Et toujours cette façon de filmer la ville comme un personnage. Encore récemment Los Angeles avec Harry Bosch... Il ne m’a pas été donné de voir « Hill Street Blues », mais « NYPD Blue » est une très grande série policière dans l’histoire de la télévision. Nombre d’épisodes sont bouleversants, les acteurs principaux y sont excellents et le jeu du moindre des « guests », paraît-il souvent recrutés parmi des acteurs de théâtre, est au diapason. Au cœur de ce polar choral pétri d’humanité, l’exceptionnel Dennis Franz et ses faux airs de Lee Van Cleef chargé aux hamburgers reste inoubliable en détective Sipowicz. À contempler la fiction policière française, la qualité de production américaine colore l’âme d’un « police blues » particulier… Endofdata (Télérama)
New York Police Blues ou New York Police d'État au Québec (NYPD Blue) est une série télévisée américaine en 261 épisodes de 43 minutes, créée par Steven Bochco et David Milch et diffusée entre le 21 septembre 1993 et le 1er mars 2005 sur le réseau ABC.
En France, la série a été diffusée à partir du 3 juillet 1994 sur Jimmy et du 10 septembre 2004 au 22 juillet 2009 sur France 3, et au Québec à partir du 3 février 1995 à TQS, et rediffusée à partir du 25 août 2003 à Canal D.
En octobre 2018 il est annoncé qu’ABC souhaite lancer une suite, avec comme personnage principal le fils d'Andy Sipowicz, Théo.
Synopsis
Cette série relate la vie quotidienne d'enquêteurs de police travaillant dans le commissariat de la fictive 15e circonscription (15th precinct) situé à Manhattan, New York (NYPD signifie New York City Police Department, la lettre « C » étant omise dans le sigle). La plupart du temps, un épisode se déroule sur une journée pendant laquelle les inspecteurs enquêtent sur deux affaires (souvent un meurtre et une affaire plus légère).
Point de vue
Quand on parle des programmes qui ont fait entrer les séries dans le quotidien des Français, on cite généralement Urgences, Friends, X-Files ou Buffy contre les vampires. On oublie étrangement celle par qui est arrivé le renouveau du genre dominant, le polar : NYPD Blue. Renommé New York Police Blues et proposé par Jimmy dès 1994, puis France 3 à partir de 2004, ce drame choral a collectionné les prix (20 Emmy Awards, 4 Golden Globes) et les critiques dithyrambiques, tout en conservant des audiences élevées pendant plus d’une décennie. Co-créé par Steven Bochco (La Loi de Los Angeles) et David Milch (Deadwood), il met en scène les enquêtes d’un commissariat de la (fictive) 15e circonscription de New York, à Manhattan. Retour en cinq points sur un classique à voir ou à revoir.
Lancée sur ABC outre-Atlantique en septembre 1993, NYPD Blue est l’héritière légitime de Hill Street Blues (Capitaine Furillo, en VF), série des années 1980 considérée comme le premier polar moderne du petit écran américain. Récit choral, flics faillibles, mélange d’enquêtes macabres et d’affaires plus légères... on est loin du drame procédural classique, plié sans bavures en quarante minutes chrono. Bochco et Milch s’appuient sur les conseils de Bill Clark, ancien inspecteur de la police new-yorkaise, pour soigner la crédibilité de leur œuvre. Ils s’appliquent aussi à décrire l’intimité de personnages en crise, hantés par leurs enquêtes. Formellement, NYPD Blue adopte une esthétique à l’opposée du style élégant de Deux Flics à Miami, qui a marqué les années 1980 : réalisation façon caméra à l’épaule avec mouvements brusques et zooms soudains...
La série joue la carte de la mise en scène coup de poing, qui sera poussée à son paroxysme par The Shield, dix ans plus tard.
Dans une des premières séquences de NYPD Blue, son personnage principal, l’inspecteur Andy Sipowicz (Dennis Franz), traite une procureure de « pissy little bitch » (« salope de petite pisseuse ») en se tenant les parties génitales. Quelques épisodes plus tard, lors d’une scène de sexe, on aperçoit les fesses et les seins d’une femme. Cela peut sembler anodin aujourd’hui mais, à l’époque, la série fait scandale aux États-Unis. Trente chaînes locales censées la programmer annulent sa diffusion... avant que les audiences, au sommet, ne les incitent à faire marche arrière. C’est aussi pour s’opposer à NYPD Blue qu’a été fondé en 1995 le Parents Television Council (PTC), puissant groupe de pression conservateur qui lance des campagnes contre les programmes télévisés qui ne correspondent pas à sa vision des bonnes mœurs. Même la Cour suprême a été sollicitée pour censurer certains passages de la série – en vain.
Avant Dexter Morgan, Vic Mackey (The Shield), Tony Soprano et même le plus confidentiel Jim Profit (Profit), il y a eu Andy Sipowicz. Ce vétéran du Vietnam est certes un excellent flic, mais il est aussi alcoolique, raciste, brutal, pas du tout à cheval sur les règles – il n’est pas rare de le voir coller une baffe ou deux à un suspect. Son physique détonne lui aussi : petit, gros et chauve, il est loin des standards de beauté des héros de séries populaires américaines. Mais Dennis Franz, déjà présent dans Hill Street Blues, s’est imposé en symbole d’une télé plus crue, plus réaliste, plusieurs années avant que la chaîne câblée HBO change plus radicalement encore la donne.
Déjà partenaires sur Hill Street Blues, Steven Bochco (1943-2018) et David Milch (né en 1945) sont deux des plus grands créateurs de l’histoire des séries américaines. Le premier, artisan visionnaire, a aussi créé Docteur Doogie (1989- 1993) et La Loi de Los Angeles (1986-1994), secouant les genres médicaux et légaux, mais il a aussi signé des scénarios de Columbo et produit Commander in Chief. Le second, génie ingérable, a révolutionné le western télé avec Deadwood. Sa méthode d’écriture, impulsive – il dicte ses scripts à haute voix et les modifie jusque sur le tournage –, renforce la spontanéité, l’énergie de NYPD Blue. Elle a aussi poussé à bout certains de ses acteurs, épuisés de devoir réapprendre leurs répliques au dernier moment...
Comme beaucoup de séries marquantes des années 1990, veille du dernier âge d’or des séries américaines, NYPD Blue a accueilli une pléiade de visages devenus familiers des téléspectateurs. Il n’est resté que deux saisons, mais David Caruso, futur héros des Experts Miami, est au centre de la série à son commencement. Amy Brenneman, actrice de The Leftovers et Private Practice, est à ses côtés. Jimmy Smits, futur président d’À la Maison-Blanche, fréquente le commissariat des saisons 2 à 6. David Schwimmer (Friends), Michael Imperioli (Les Soprano), Lucy Liu (Drôles de dames), Paul Giamatti (Sideways) et beaucoup d’autres noms marquants y ont fait un passage avant de devenir des premiers rôles en puissance. Plus étonnant, deux anciens enfants stars y ont cassé leur image en y interprétant des flics : Rick Schroder, le héros de Ricky ou la belle vie, et Mark-Paul Gosselaar, le Zack Morris de Sauvés par le gong... Pierre Langlais, 2022.
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