GOODBYE DAVID

Le noir et blanc charbonneux, le vent et la fumée des cheminées, les cendres et le sang étaient là dès la naissance du cinéma de Lynch. Souvenez-vous du cauchemar à la Kafka d’Eraserhead (1977) et de son bébé prématuré emmailloté. Triste ironie : c’est sans doute en raison d’un emphysème sévère consécutif à des années de tabagisme forcené que David Lynch vient de trouver la mort, à 78 ans. « Ashes to ashes », comme disait Bowie, et ce au moment même où Los Angeles est encore en proie aux flammes. Cette annonce est brutale : l’auteur de Blue Velvet et de Lost Highway comptait auprès des cinéphiles comme un réalisateur majeur, sans doute le plus beau symbole d’un cinéma résolument plastique. Art total, expérimental, encore figuratif, mais au bord de la défiguration ou de l’abstraction. Ce n’est pas rien. Godard l’avait fait avant lui mais Lynch a poussé plus loin le geste artistique. À la différence de l’auteur de Pierrot le Fou, l’esthète aux faux air de James Stewart (dans la voix surtout), la chemise toujours boutonnée jusqu’au col, ne venait pas de la cinéphilie ni de la vieille Europe. Mais de l’imaginaire américain et de la peinture, qu’il a continué toute sa vie à pratiquer, au même titre que la photo, le design, la sculpture ou la musique… Jacques Morice.


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